Traces d’étoiles
@ Théâtre du Rideau Vert

CRITIQUE.
[ Scène ]

★★★★

 

Tout d’abord, l’émoi de Pierre Bernard à pouvoir réinvestir le sentiment de plénitude éprouvé lors de sa première adaptation de la pièce de l’Américaine Cindy Lou Johnson. C’était en 1992, avec Sylvie Drapeau et Luc Picard.

 

La mariée

était en blanc

texte
Élie Castiel

Une trentaine d’années plus tard, Mylène Mackay, étoile montante, et Maxim Gaudette, dont le talent n’est plus à confirmer, rejoignent le metteur en scène. Un besoin viscéral, organique, physique plus que tout, d’organiser l’espace scénique, en huis clos, un terrain de tous les bouleversements.

Là où la parole est souveraine, dure, écorchant les personnages plus qu’ils ne le sont, s’adaptant aux humeurs de plus en plus étranges. C’est une pièce physique qui demande, de la part des deux protagonistes, des efforts athlétiques d’endurance. Face à un univers surréaliste tant les mots, les échanges peuvent nous paraître biscornus, jusqu’à la limite de l’insolite.

Comme un soudain coup d’éclat.
Crédit : François Laplante Delagrave

L’auteure, dans son ésotérique Brilliant Traces, excite l’esprit, le for intérieur, la puissance d’évocation de deux êtres atteints dont ne saura jamais d’où provient cet étrange sensation de mal-être même s’ils s’expliquent en filigrane.

Au préalable, l’acuité de la traduction de Maryse Warda, maître en son domaine, reflète avant tout le parcours en solitaires de deux âmes perdues. Soudain, le hasard, l’incongruité des situations, les possibilités surprenantes que peut faire surgir tout acte de « création » investissent autant les comédiens que le terrain dramaturgique. En français, on ressent toute la tragédie de cette proposition. Entre une langue et l’autre, aucune disparité. Les deux réalités se rejoignent.

Une fois de plus, cette fin soudaine, doucereusement hâtive, nous projette dans le monde d’un inconscient devenue forme, rattrape la réalité et nous ramène à l’ordre. La boucle est bouclée, du moins dans ce qu’on imagine.

Des liens qui s’enlisent… et se forment.
Crédit : François Laplante Delagrave

Le décor de Daniel Castonguay, cette cabane au bout du monde, intelligemment construit, où la dureté du bois s’apparente à ces cœurs en crise provisoire et participe de ce huis clos à l’abri des regards, intense, de la découverte de l’amour, geste qui se concrétise dans le dernier « plan » abruptement, sans qu’on s’y attende tout à fait, de façon à la fois agressive, dans le bon sens du terme, que relevant de l’épiphanie. Comme un rituel unificateur des cœurs meurtris et écorchés.

Une comédienne, Mackay, tout de grâce vêtue, une force physique qui fait ses preuves de plus en plus au cinéma. Les planches la réclament et elle sait absolument à quoi s’en tenir. Maxim Gaudette (remplaçant Emile Schneider, qui a dû se désister du projet), troublant dans sa physicalité et sa vulnérabilité qu’il se résigne à assumer. Et elle, encore Mackay, en Rosannah DeLuce (un prénom de fleur, un nom de lumière), bouleversante, investissant la scène, sans nier la présence de l’autre.

Une fois de plus, cette fin soudaine, doucereusement hâtive, nous projette dans le monde d’un inconscient devenue forme, rattrape la réalité et nous ramène à l’ordre. La boucle est bouclée, du moins dans ce qu’on imagine.

ÉQUIPE PARTIELLE DE CRÉATION
Texte
Cindy Lou Johnson

Traduction
Maryse Warda
À partir de l’original
en anglais, Brilliant Traces

Mise en scène
Pierre Bernard

Assistance à la mise en scène
Marie-Hélène Dufort

Interprétation
Mylène Mackay
Maxim Gaudette

Crédit : Pierre Manning
(shoot studio)

Décor
Daniel Castonguay
Lumières
Julie Basse
Costumes
Elen Ewing
Musique
Simon Leaza

Durée
1 h 30 min
[Sans entracte ]

Diffusion & Billets @
Théâtre du Rideau Vert
Jusqu’au 10 juin 2023

 

Auditoire (suggéré)
Tout public
[ Déconseillé aux jeunes enfants ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]