Les rayons gamma
PRIMEUR
Sortie
Vendredi 10 novembre 2023
Le portrait générationnel d’un groupe de jeunes gens issus de différentes communautés ethniques vivant à Montréal.
CRITIQUE
Élie Castiel
★★★ ½
montréal
La métropole épelée avec un petit « m », pour la situer dans une agglomération particulière, un îlot de sensations, fortes, atténuées, loin de la grande ville qui a ses propres codes de conduite; ici, dans un Montréal-Nord (quartiers Villeray et St-Michel) magnifiquement filmé par la caméra poétique et collaboratrice de Philémon Crête, Natan B. Foisy et Philippe St-Gelais, des anecdotes de vies prises sur le vif, des moments intenses ou sereins que le montage de Jules Saulnier réussit à rendre plus organiques, d’où émerge une sensation de vivre dans un ailleurs qui se veut aussi protecteur que propice à l’opportun.
Entre ces adolescents, des relations intenses, de moments de solitudes introspectives chez certains, une certaine maturité précoce, des paroles qui questionnent leur quotidien, des regards portés sur l’avenir; un microcosme peuplé de ceux et celles venus de l’étranger, ou du moins issu(es) de parents d’ailleurs. Particulièrement d’Afrique et plus encore, d’Afrique du Nord, Maroc, en tête, et Algérie.
De brèves incursions dans le centre-ville de Montréal apaisent les multiples réverbérations psychologiques auxquelles sont assujetti(es) ces personnages de l’ombre qui, tant bien que mal, semblent ajustés à un Québec de souche indirectement peu sensible à la différence, notamment les tenants d’autres générations.
Un Québec qui, si la tendance se maintient, n’aura plus de choix (comme dans d’autres provinces du Canada qui se sont toujours ajustées) qu’à parier sur les multiples représentations sociales. Les trois scénaristes ont compris et leur proposition est d’autant plus enrichissante qu’elle défie la tendance actuelle du cinéma québécois de fiction, très souvent replié sur lui-même.
Après la remarquée coréalisation du documentaire À l’ouest de Pluton (2008), titre aussi « astrologique » que Les rayons gamma, son premier long métrage solo de fiction, le Québécois Henri Bernadet opte pour la différence, pour cette urgence de raconter l’autre, ces oubliés auxquels le cinéma québécois de fiction ne s’intéresse pas souvent, ou tout au plus, de façon rarissime. Les autres… connais pas.
L’approche esthétique est d’autant plus harmonieuse qu’elle crée, par volonté ou par défaut, une sorte de poésie à la fois sensuelle et organique. Surtout dans le cas de l’Afro-québécois (Toussaint, campé par l’excellent Chris Kanyembuga) du groupe qui rêve de cette fille inatteignable. Étrangement, dans ce mélange de cultures qui n’ont font qu’une, celle des autres, les garçons sont les moins agressifs (en fait, ils se cherchent constamment), les filles, plus combattantes (jalousies, insubordination, mal de vivre…).
En dépit de quelques légères réserves de parcours, en raison d’un groupe de comédiens totalement investis, Les rayons gamma est, sans contredit, une des plus belles expressions du cinéma québécois de l’année.
En tête de ligne, Fatima (exceptionnelle Chaïmaa Zineddine Elidrissi). Et pourtant, une volonté de se plier aux règles sociales, comme se trouver un travail, même temporaire. Elle cache en elle, assez astucieusement, ce désir d’être et de révolte face à une société prise dans la paralysie d’une rectitude politique environnante.
Mais avant tout, Henri Bernadet a réalisé un film sur l’amour inconditionnel qu’il porte à la métropole, dans son ensemble. S’il le fait en revendiquant le droit aux autres de s’exprimer, la proposition nous paraît d’autant plus authentique qu’elle situe le cinéma d’ici dans sa sphère la plus universelle.
En dépit de quelques légères réserves de parcours, en raison d’un groupe de comédiens totalement investis, Les rayons gamma est, sans contredit, une des plus belles expressions du cinéma québécois de l’année.
FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Henri Bernadet
Scénario
Henri Bernardet
Nicoals Krief
Isabelle Brouillette
Direction photo
Philémon Crête
Natan B. Foisy
Philippe St-Gelais
Montage
Jules Saulnier
Musique
Maxime Veilleux
Mathieu Charbonneau
Simon Trottier
Genre(s)
Chronisque sociale
Origine(s)
Canada [Québec]
Année : 2023 – Durée : 1 h 41 min
Langue(s)
V.o. : français; s.-t.a.
Gamma Rays
Dist. [ Contact ] @
Les Films Opale
[ Coop Vidéo Montréal ]
Diffusion @
Cinéma Beaubien
Cinéma du Parc
Cineplex
Classement
Visa Général
[ Déconseillé aux jeunes enfants ]
ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]