Iphigénie
@ TDP

 

CRITIQUE
[ Scène ]
Élie Castiel

★★★

 

Une version intemporelle

de la tragédie antique

 

Iphigénie, la sacrifiée, au nom de l’orgueil mâle, la puissance des Dieux. Qu’il s’agisse d’Euripide, de Racine ou même du film de Michael Cacoyannis, ce drame épique est une réflexion antique sur la condition de la femme, thème on ne peut plus actuel.

Pour le Portugais Tiago Rodriguez, nouveau directeur du Festival d’Avignon, l’occasion de contourner le récit et le situer à notre époque ou, à en juger par la mise en scène d’Isabelle Leblanc, à quelque chose d’intemporel.

Constat confirmé par un décor qui pourrait décontenancer certains, un mélange intentionnel de carton-pâte, d’éclairages fabuleux et en harmonie avec le sujet dont il est question… et surtout, en fond de scène, comme une pleine lune tout de blanc vêtu, se transformant à mesure que la tragédie se déroule.

Tragédie ? À en croire les nombreux rires dans la salle suite à quelques répliques, on se posait des questions, du moins en ce qui nous concerne, les critiques. Ou peut-être que je n’ai pas vraiment saisis ce qui se cachait derrière ces soudain éclats.

Une intemporalité inébranlable.
Crédit : Victor Diaz Lamich

Toujours est-il que la mise en scène de Leblanc déconcerte autant qu’elle fascine ; d’une part, oser aborder un genre mythique en le déconstruisant jusqu’à presque le démunir d’une certaine substance ; de l’autre, suivre le vrai cheminement d’un récit sur le sacrifice d’une jeune femme au nom de l’honneur. Ne rien ôter de ce drame familial. Clytemnestre sait de quoi elle parle et tel que campée par Catherine Allard, on ne peut que s’incliner.
Le plus proche de la tragédie grecque dans le sens classique, Étienne Pilon (Agamemnon) honore l’espace scénique. Iphigénie, le don aux Dieux, ne montre son vrai visage que vers la fin (très charismatique Alice Moreault).

Excellent travail dans la conception sonore, élément essentiel dans toutes tragédies qui se respectent.

En attendant, “Iphigénie” rentre dans l’Histoire malgré le courroux des Dieux.

Aussi, des costumes qui m’ont paru, en général grand-guignolesques, alliant les divers genres de la représentation scénique, mais c’est une question de goût. Iphigénie format TDP-2024 est une version hybride, volontairement s’en allant de tout côté, incroyablement proche de la société actuelle occidentale où tout semble permis. Sur ce point, on ne peut nier l’audace, ni la pugnacité face au classicisme, parfois intransigeant, approche de plus en plus contestée.

En attendant, “Iphigénie” rentre dans l’Histoire malgré le courroux des Dieux.

FICHE ARTISTIQUE

Texte
Tiago Rodriguez

d’après la tragédie grecque éponyme
Traduction du portugais
Thomas Resendes
Mise en scène
Isabelle Leblanc
Assistance à la mise en scène
Amélie-Claude Leblanc

Distribution
Catherine Allard (Clytemnestre) Gabriel Favreau (Achille)
Étienne Pilon (Agamemnon), Alice Moreault (Iphigénie),
Dominique Quesnel (chœur et vieillard) Éric Robidoux (Ménélas)
Aimé Tuyishime (Ulysse)

Scénographie : Étienne René-Contant
Éclairages
 : Anne-Sara Gendron
Costumes
 : Leilah Dufour Forget
Conception sonore : Éric Forget

Durée
1 h 15 min
[ Sans entracte ]
Public (suggéré)
Tout public
Diffusion & Billets @
Théâtre Denise Pelletier
(Salle principale)

Jusqu’au 07 décembre 2024

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]