Voices of Freedom
SYNOPSIS SUCCINCT
La même question est posée à des Américains de toutes les classes sociales, de ceux qu’on n’entend que rarement. Leurs réponses constituent un voyage inusité à travers une Amérique insolite.
CRITIQUE.
[ En Ligne ]
Texte.
Élie Castiel
★★★★
D’emblée, Voices of Freedom frappe par sa forme cinématographique. Le tournage, souvent à partir de l’intérieur d’une voiture servant de support technique rappelle certains films du genre mondo des années 1960, et dont Gualtiero Jacopetti demeure le chantre invétéré, la référence ultime. Une catégorie oubliée et largement méconnue par les cinéastes des nouvelles générations, sauf ceux et celles intéressé(es) par le cinéma de genre. Et même là!!!
L’Amérique nue
et violente
Force est de souligner que Jason Rodi est beaucoup plus proches des Ron Fricke et des Godfrey Reggio de ce monde, eux aussi uniques dans leur approche filmique, inventeurs de l’essai documentaire contemplatif. Même dans leurs films, on pouvait reconnaître quelques légères influences du mondo.
Ici, il n’est pas simplement question de filmer à l’emporte-pièce, brutalement, agressivement, mais d’établir les rapports entre la caméra et le filmé; non pas dans un quelconque et gratuit rapport de force, mais par le biais d’une complicité tacite, quasi indicible, qui ne peut se voir à l’œil nu, mais se devine par le regard. D’où cette volonté du réalisateur d’impliquer le spectateur, de le pousser à réfléchir.
Dans les propos des intervenants, tous issus d’une Amérique qui ne s’expriment pas à l’écran, qu’on n’entend que rarement, pour ne pas dire « jamais », des paroles qui nous semblent savantes. Si d’aucuns tiennent mordicus au Deuxième amendement de la Constitution des États-Unis, d’autres abordent la question du racisme, de la liberté individuelle, de la chance de vivre dans un pays unique, encore jeune, qui ne cesse de se construire. On parle aussi des nouveaux venus, de ce qui ont quitté leurs lieux d’origine vers des cieux plus cléments.
Ici, il n’est pas simplement question de filmer à l’emporte-pièce, brutalement, agressivement, mais d’établir les rapports entre la caméra et le filmé; non pas dans un quelconque et gratuit rapport de force, mais par le biais d’une complicité tacite, quasi indicible, qui ne peut se voir à l’œil nu, mais se devine par le regard.
Une seule question est posée à tous les participants du film : « Que signifie pour vous le mot liberté? ». On n’est guère surpris des multiples réponses, des discours qui nous poussent nous-même à revoir notre propre interprétation.
La caméra traverse la Californie, le Nevada, le Maryland, le comté de New York, le Maine et autres états. D’une région à l’autre, d’un territoire à l’autre, des manières de vivre et de voir le monde. Mais un dénominateur commun demeure : une sorte de mélancolie, de nostalgie d’un pays autrefois uni et qui, pour de nombreuses raisons, n’est plus ce qu’il était. Il y a une tristesse, un désarroi de certains de ces intervenants. D’où ces séquences vers la fin du film où des rituels païens interviennent comme substitut au vide existentiel. Car l’Amérique filmée par Jason Rodi semble être celle de la nothingness (on pourrait dire en français, le néant).
Et c’est justement cette perte d’identité, ce rendez-vous manqué avec l’Histoire qui a intéressé le documentariste, homme de cinéma québécois, mais fasciné, comme d’ailleurs beaucoup d’étrangers, par cette Amérique à la fois superbe et violente, une Amérique inconsolable lorsqu’il est question d’enfreindre les droits acquis suite aux nombreux combats livrés, une Amérique impulsive, courageuse et instantanée qui se construit sans cesse aussi bien par les héritiers des premiers pionniers que par les nouveaux arrivants. Rodi en est conscient et nous propose un documentaire essentiel, remarquable par la simplicité de sa forme et plus que tout, livrant un message conciliateur, proposition qui, de nos jours, fait amplement défaut.
Et le plus fascinant, c’est de constater l’enthousiasme du documentariste, signant le montage, le son et autres éléments filmiques afin de s’assurer que le résultat demeure selon les préceptes de son média, NOMADslow.tv, c’est-à-dire libre de toute influence extérieure.
[ Voir entrevue avec Jason Rodi ici. ]
FICHE TECHNIQUE
Réalisation : Jason Rodi
Genre : Documentaire
Origine : Canada
Année : 2020 – Durée : 1 h 26 min
Scénario : Jason Rodi
Images : Jason Rodi
Montage : Jason Rodi
Musique : Jean-Michel Blais, Reliefs
Son : Jason Rodi
Production : NOMADslow.tv
Diffusion : VSD (VOD) sur Vimeo