Anatomie d’une chute

PRIMEUR
Sortie
Vendredi 27 octobre 2023

 

Le FILM
de la semaine

CRITIQUE
Élie Castiel
★★★★

Procès

d’intention

Déjà, le titre annonce sans ambages le côté cérébral de la proposition. Une Palme d’or à Cannes, pour la (grande) majorité des critiques, hautement méritée. Certes, une plume aiguisée, au sens propre et au figuré, une tension clinique hors des sentiers battus, une froideur glaciale voulue, sans aucune émotion palpable, plutôt intérieure et on n’est guère certains de cela.

Un mort. Suicidé? Poussé dans le vide? Un procès et une femme qui plaide (la femme du défunt, la mère de leur fils) non coupable. Et puis, à la conclusion…

Oui, Sandra Hüller, excellente comédienne qui s’ajuste à une palette de registres dans l’art d’interprétation. Et puis, Daniel, campé par le jeune Milo Machado Graner à qui on confie un plaidoyer à huis clos qui laisse la cour totalement ébahie, stupéfaite devant une telle logique dans le discours. Comme si non seulement « la vérité sortait de la bouche des enfants », mais d’une certaine façon, taillait les contours d’une affaire juridique à la fois complexe et inhabituelle.

Si la mise en scène suit la voie classique, elle prend parfois, délibérément, des entourloupes magistrales, comme pour voiler le trop d’émotion qui pourrait émerger d’un tel procès.

Comme, une fois encore, l’intervention du jeune Daniel, épousant à merveille le discours somatique du scénario. Certains pourraient se demander si un jeune (dans le film) de 11 ans peut se livrer à une telle plaidoirie. Non pas perçue comme une défense, mais plutôt, si l’on observe et écoute bien, telle une remise en question éthique, morale et stratégique de l’affaire en cours. Mais bon!
C’est aussi, dans une première partie, la dissection d’un couple qui ne s’entend plus depuis quelque temps déjà. Disputes, altercations, jalousies, adultère, et le fils (malvoyant) qui enregistre dans son cerveau tout ce qui se passe autour de lui.

Un scénario en béton. Une mise en scène qui demeure classique tout en défiant les codes de cette approche.

La première réplique du film, « que voulez-vous savoir? » correspond indiscutablement à la thèse proposée par Triet. Un film aux antipodes de ses films précédents, comme le très charmant La bataille de Solferino. Une première Palme qui pourrait l’inciter à, dorénavant, se démarquer.

Mais surtout, une fin ambiguë, très chère chez certains cinéastes du cinéma contemporain. On peut ne pas être d’accord, mais on respecte ce choix.

Anatomie d’une chute, le vocable « chute » évoquant plusieurs possibilités, argumentaires. La vraie chute, mais aussi celle du couple et pourquoi pas, de l’encadrement judiciaire. Swann Arlaud, campant avec autant d’adresse que de fragilité, l’avocat de la défense, doit faire face à  Antoine Reinartz, plaidant contre l’accusée avec une sens inné de la froideur et de la répartie.

La réalisation participe avec une fureur implacable de ce jeu vicieux où il s’agit ici d’un procès qui viole les secrets de l’intime. Un charge indiscutable de la part des scénaristes, Triet et Arthur Harari, complices dans la vraie vie.

La première réplique du film, « que voulez-vous savoir? » correspond indiscutablement à la thèse proposée par Triet. Un film aux antipodes de ses films précédents, comme le très charmant La bataille de Solferino. Une première Palme qui pourrait l’inciter à, dorénavant, se démarquer.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Justine Triet

Scénario
Artur Harari, Justine Triet
Direction photo
Simon Beaufils
Montage
Laurent Sénéchal
Musique
Benoît Daniel

Genre(s)
Drame
Origine(s)
France
Année : 2023 – Durée : 2 h 32 min
Langue(s)
V.o. : anglais, français; s.-t.a., s.-t.f.
Anatomy of a Fall

Dist. [ Contact ] @
Entract Films
[ Elevation Pictures ]

Diffusion @
Cinéma Beaubien
Cineplex

Visa de classement
GÉNÉRAL
[ Déconseillé aux jeunes enfants ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]