SUCCINCTEMENT. Après avoir accidentellement découvert un portail secret, quatre amis, Art, Vik, Phil et Kira, ainsi que leur enseignante se retrouvent prisonniers d’un jeu vidéo.
SUCCINCTEMENT. Dans un futur proche, à Mexico-City, de violentes manifestations de rue détruisent toujours plus la ville. Des violences quasi imperceptibles pour les habitants d’un manoir mondain fortifié, dans un quartier huppé.
CRITIQUE.
★★★ ½
texte Élie Castiel
Michel Franco ou réaliser qu’une idée, aussi farfelue soit-elle, peut prendre forme au cinéma, même s’il s’agit, pour cela, de figer des clins d’œil à des cinéastes qu’on respecte, anciens ou nouveau. Car c’est aussi prendre conscience que dans un sens, le cinéma est un cycle qui se répète, un très long recueil de mêmes récits qui se réinventent à toutes les sauces.
Le déclin de la bourgeoise mexicaine. L’insurrection de la classe ouvrière. Mais aussi portrait d’un pays où les disparitions de vie humaine sont devenues pratique courante. Un pays de l’Amérique centrale où la corruption règne, se maintient grâce à une certaine idée de l’ordre. Et une classe, certes restreinte, mais enrichie, prônant les caprices et intérêts surtout d’un capitalisme sauvage venu du Nord.
Puis, un cinéaste, Michel Franco, peu connu ici, du moins en ce qui nous concerne, même si Chronic / Chronic: el último paciente (2015), avec Tim Roth, nous dit quelque chose. Une découverte donc, surtout par la luminosité incandescente et totalement assumée de la mise en scène, passant d’un univers à l’autre, nullement respectueuse de l’un ou de l’autre, montrant les absurdités, les incongruités, les impulsions néfastes de l’individu.
Michel Franco ose, dérange, provoque, ne recule devant rien pour nous obliger à regarder en face, ce que nous rejetons, ce que nous abhorrons, mais avec qui nous entretenons mystérieusement une association, un accord maladif, voyeur, masochiste; serait-ce ainsi l’âme humaine dans toute sa complexité?
Ça commence par une réception de mariage. Un évènement qui brille par la magnificence de la réalisation. Les évènements bougent, caressent l’esprit des spectateurs, les rend complices des agissements des convives. Comme si nous y étions.
Sourires en portant un verre, dragues passagères qui imaginent mille et une variations sur les suites possibles, une classe sociale qui se suffit à elle-même. On a même le temps de négocier des affaires, en secret, dans les chambres de cette grande villa restées fermées.
Et Franco change le ton dans la deuxième partie, là où les insurgés de L’ange exterminateur (El ángel exterminador) de Buñuel semblent se manifester – même si le cinéaste, dans nos recherches, insiste à dire que ce film ne l’a pas vraiment inspiré, mais qu’il en reconnaît sa puissance – d’accord, on lui prêtera le nom de Michael Haneke, beaucoup plus contemporain, pour son humour acide, pour sa brutalité inconcevable ou mieux dit incompatible. Une brutalité qui a à voir avec le cinéma et qui, nous devons l’avouer, existe dans le réel, et en pire, dans certaines zones du monde. Nous en avons des preuves quotidiennement.
Une classe sociale qui se suffit à elle-même.
Michel Franco ose, dérange, provoque, ne recule devant rien pour nous obliger à regarder en face, ce que nous rejetons, ce que nous abhorrons, mais avec qui nous entretenons mystérieusement une association, un accord maladif, voyeur, masochiste; serait-ce ainsi l’âme humaine dans toute sa complexité?
En observateur de la société, le cinéaste parle des inégalités, des injustices, des nouvelles hordes d’humains qui veulent du changement. Il décrit les premières années tardives du nouveau siècle, une époque de l’Humanité qui se cherche une voie en observant les erreurs du passé et profitant des dérapages qui traversent nos quotidiens.
L’Histoire se répète. Mais, ici, l’utopie n’a pas sa place. Elle est même évacuée au profit d’une morale immorale, d’une éthique de la dissolution des valeurs, d’un je-m’en-foutisme généralisé au sacré nom de l’individualisme. Et Michel Franco compte surtout sur des comédiens irréprochables, elles et eux s’en donnant à cœur joie dans ce laboratoire du comportement humain des plus vociférants.
Il n’est guère surprenant que le film ait obtenu le Lion d’argent à la Mostra de Venise 2020. Sans doute en raison de son actualité percutante.
FICHE TECHNIQUE PARTIELLE Réalisation Michel Franco
Scénario Michel Franco
Direction photo Yves Cape
Montage Óscar Figueroa Michel Franco
Musique Cormac Roth
Michel Franco.
Genre(s) Drame social
Origine(s) Mexique France
Année : 2020 – Durée : 1 h 26 min
Langue(s) V.o. : espagnol; s.-t.a. Nuevo orden Nouvel ordre
Dist. [ Contact ] @ Entract Films
Classement Interdit aux moins de 13 ans [ Violence ]
SUCCINCTEMENT. Jadis, les enfants fondateurs ont érigé la cité sanctuaire au milieu de laquelle trône l’arbre des vœux. Chaque année, les animaux, qui vivent en harmonie dans cet endroit féérique protégé de l’extinction, sont invités à cueillir une fleur et à formuler un souhait.