Cinemania 2020 [ÉC-01]
MANIFESTATION
[ En ligne ]
un texte de
Élie Castiel
Un préambule s’impose : un menu qui ne ressemble pas aux précédents, un film comme L’audition, dont on se demande ce qu’il fait dans la programmation puisque c’est une production allemande même si la France coproduit. Un film de 2018, Filles joie, d’une navrante vulgarité. Toujours est-il que nous cherchons quelques moments de bonheur cinématographiques à travers les cinq films que nous avons pu visionner, bien sûr, dans sur notre écran-maison.
Premières
impressions
Mais soyons justes, Yvan Attal ne déçoit pas vraiment même si Mon chien Stupide / My Dog Stupid tarde à démarrer et devient une bel essai – personnel – sur l’âge, la nostalgie d’une époque qui n’est plus, les rapports éphémères contemporains avec les enfants qui grandissent, de nos jours, à la vitesse du mur de son. Bien entendu, les crises liées à la création littéraire, en panne depuis un moment. Et un couple mythique Yvan Attal/Charlotte Gainsbourg, offrant des performances inoubliables, enfreignant les lois de l’intimité même s’ils forment un duo amoureux dans la vraie vie. Leurs champs-contrechamps sont autant de confessions sur leur vie intime que la fiction devient quasi accessoire. Des moments de pure bonheur dans les deuxièmes tiers du film. Et un très gros chien, Stupide, à qui on a attribué le rôle d’un canin gai. Allez savoir pourquoi.
Madre / Mère / Mother, au même titre que L’audition, affiche ses couleurs espagnoles. De Madrid, la principale protagoniste, Elena (plutôt effacée et absente Marta Nieto) prend le chemin vers l’Hexagone pour, en principe, retrouver son fils, disparu quasi en temps réel, senti à travers un échange de voix par cellulaires interposés. Idée du court métrage éponyme de 2017 que le scénario de Rodrigo Sorogoyen (réalisateur) et d’Isabel Pena, qui s’ajoute au long, n’arrive pas à la hauteur de son précédent. Idée confuse qui ne mène nulle part, personnages tirés par les cheveux, comme le bel adolescent viscontien, Jean (Jule Porier) profitant de toutes ses ressources pour parvenir à sexualiser, certes avec retenue, son personnage). Un jeu entre la quête de la perte et le complexe d’Œdipe pas du tout convaincant. Et un film trop long lorsqu’il finit par ne rien dire.
Encore un film étranger coproduit avec la France, Le miracle du Saint-Inconnu / The Unknown Saint / Sayidi limajhul, qui veut dire en français « Monsieur anonyme » beaucoup plus proche du récit. Le Maroc rocailleux, les croyances populaires villageoises, ces endroits perdus que personne ne sait qu’ils existent. Et des légendes populaires. La mise en scène de Alaa Eddine Aljem est d’une bienheureuse efficacité grâce surtout à son scénario qui repose, comme dans beaucoup de films maghrébins, sur l’oralité, sur ces histoires qu’on raconte dans les milieux populaires, des récits sources de nombreuses métaphores, interprétations et figures de styles. Intéressant de noter que depuis sa présence au Maroc, la communauté juive a, en partie, partageait ces croyances, à sa façon, portant le sceau selon lequel autant les enfants de la Bible et les Musulmans étaient des fils d’Abraham, issus des mêmes racines. Pourquoi cette information, simplement pour le défi de la désorientation culturelle disparaît lorsqu’on épouse, selon les classes sociales, quasi les mêmes valeurs. La direction photo de Amina Bouhafa profite allégrement du paysage marocain baignant sous un soleil de plomb ou subissant la sensualité de ces atmosphères nocturnes aussi sensuelles qu’inquiétantes pour revendiquer son droit de cité. Les interprètes sont tous étonnants et subissent avec rigueur les contretemps des multiples situations. Et une fin qui ramène l’individu aux sources premières de sa civilisation.
Revenons à L’audition / The Audition / Das Vorspiel, de l’Allemande Inna Weisse, à qui l’on doit quelques courts et un premier long, inédit, The Architect / Der Architekt (2008). On le répète, que fait ce très beau film ici? Riche en subtilités, en non-dits significatifs, aux images qui nous échappent intentionnellement pour mieux saisir leur portée, leur teneur psychologique. Le seul fait français – disons-le comme on le dit si bien chez nous : arrangé avec le gars des vues… pour des raisons de coproduction, demeure la présence de Simon Akbarian, Philippe, le mari, dans le rôle peu convaincant de « luthier », lui, habitué à des personnages beaucoup plus physiques. Mais bon, on aime bien ces sublimes moments de musique du répertoire classique et Nina Hoss (entre autres, Astrid dans la télésérie Homeland, 2014-2017), parfaitement convaincante, subit avec rigueur et compassion les quelques failles d’un scénario un tant soit peu hésitant.
Et finissons par le début, Filles de joie / Working Girls, de Frédéric Fonteyne, dont on se souviendra avec bonheur d’Une liaison pornographique (1999) et Anna Paulicevich (première cosignature). Vulgarités incompatibles, quelques scènes de baise pour remplir le temps, phrases assassines qu’on voit venir à toute vitesse, rien pour rehausser le moral, sauf peut-être une ou deux courtes séquences bien senties qu’on vous laisse le soin de découvrir. Et le film est de 2017.
Un premier rapport (enfin, article!) sur CINEMANIA 2020 qui montre, du moins pour l’instant, et selon ce que j’ai pu visionné, une programmation faite un peu à la hâte, peut-être, et je dis bien « peut-être », sujette aux caprices des producteurs et/ou distributeurs.
La suite… bientôt.
CINEMANIA 2020
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