Donald Sutherland
< 1935-2024 >

In
Memoriam

texte
Pascal Grenier

Au revoir,

oeil de faucon

 

Sans aucun doute l’acteur canadien avec la plus grande renommée internationale, le grand Donald Sutherland vient de nous quitter à l’âge de 88 ans. Reconnu pour sa carrière prolifique s’étendant sur plusieurs décennies et couvrant une grande variété de rôles au cinéma et à la télévision, il se fait remarquer d’abord dans le rôle d’un soldat dans le drame de guerre Les 12 salopards (The Dirty Dozen) de Robert Aldrich. Sa scène où il se fait passer pour un général britannique est particulièrement mémorable pour son humour décalé.

Mais c’est avec M*A*S*H* de Robert Altman en 1970 que le comédien devient célèbre. Dans cette comédie noire qui a remporté un immense succès critique et commercial, il incarne le rôle du capitaine Benjamin Franklin «Hawkeye» Pierce, un chirurgien de l’armée américaine pendant la guerre de Corée. Son mélange d’humour et de pathos établit rapidement sa réputation comme un des comédiens des plus versatiles et capable de jouer des rôles complexes et nuancés.

Casanova

On n’est pas près de l’oublier dans le rôle d’un père en deuil hanté par des visions de sa fille décédée dans l’excellent thriller psychologique Ne vous retournez pas (Don’t Look Now) de Nicholas Roeg où l’atmosphère sinistre et les éléments surnaturels mettent en valeur la performance troublante de l’acteur. Aussi, dans le remake de Invasion of the Body Snatchers de Philip Kaufman en 1978, sa transformation progressive et la paranoïa croissante contribuent à l’ambiance inquiétante du film. Et que dire de cette finale cauchemardesque qui en a traumatisé plus d’un.

Dans L’arme à l’oeil (Eye of the Needle), il joue un espion nazi impitoyable surnommé «The Needle» en raison de son arme de prédilection, un stiletto. Son personnage est froid, calculateur et prêt à tout pour accomplir sa mission, ce qui en fait un antagoniste particulièrement menaçant et sa performance remarquable rehausse de beaucoup la qualité du film.

Don’t Look Now

Qu’il campe des rôles d’excentriques mémorables ou des figures autoritaires menaçantes, rares sont les films où Donald Sutherland passe inaperçu à l’écran, car il avait cette facilité à apporter une profondeur et une nuance significative mêmes dans des rôles secondaires où sa présence a souvent volé la vedette, Bien qu’il se soit rapidement établi aux États-Unis, il n’a jamais renié son pays natal et a continué tout au long de son illustre carrière à participer régulièrement dans des productions canadiennes de petites ou moyennes envergures. Il développe une complicité en deuxième moitié de carrière en jouant dans quatre films avec le réalisateur Christian Duguay, notamment Contrat pour un terroriste (The Assignement), son meilleur film).

M*A*S*H*

Au cours de son illustre carrière, Sutherland aura tourné avec des grands réalisateurs comme Fellini (Casanova), Bertolucci (1900), Chabrol (Les liens de sang), Pakula (Klute), Schlesinger (The Day of the Locust), Robert Redford (Des gens ordinaires / Ordinary People), lauréat du Meilleur film en 1980) ou encore Oliver Stone (JFK) pour n’en nommer que quelques-uns des plus célèbres.

Ces collaborations avec des réalisateurs de renom ont non seulement démontré la capacité de Sutherland à s’adapter à divers styles cinématographiques, mais ont aussi consolidé et forgé sa réputation en tant qu’acteur polyvalent et talentueux. Dans les dernières années, il a encore su tirer son épingle en tant qu’antagoniste dans le rôle du President Snow dans la populaire série de films The Hunger Games.

Repose en paix, Monsieur Sutherland.