Festival International du Film sur l’Art 2022
Deuxième partie

ÉVÉNEMENT.
[ Présentiel & En ligne ]

texte
Luc Chaput

 

Pour la suite du monde

Yollotl

La caméra quitte les ruines grandioses d’un temple et suit des enfants dans la forêt luxuriante mexicaine. Un accompagnateur leur raconte le conte cosmogonique précolombien de la forte alliance entre deux arbres. Les écoliers sont intrigués et écoutent l’écorce de ce Ceiba. Ils communiquent ainsi avec leurs mythes fondateurs et le réalisateur Fernando Colin Roque, par l’animation, sa narration et sa caméra englobante, nous fait ainsi participer à cette courte ode pour la suite du monde. Yollotl (Cœur) a remporté avec raison le prix du court métrage

Far West, l’histoire oubliée

Plus au nord de cette Amérique, une population latino redécouvre et affirme sa place multiséculaire dans le Sud-ouest des États-Unis. Le coréalisateur Tomas van Houtryve emploie des techniques du XIXe siècle en photographie pour immortaliser ses interlocuteurs dans le moyen métrage Far West, l’histoire oubliée d’également Mathilde Damoisel.  L’arrivée des conquistadors dans des régions où vivaient des peuples amérindiens, les métissages successifs entre ces populations trouvent dans les nombreuses pérégrinations de l’équipe du Texas à la Californie. Des manifestations culturelles s’inscrivent naturellement dans ce rappel historique nécessaire dans ces temps de bisbilles entre le Nord et le Sud.

Folon

Dans Folon, un illustrateur belge se rend à New York et ses affiches et couvertures de magazines décrivant l’aspect monumental de la ville et sa surcharge de signaux divers sont alors encore plus disséminés dans le monde. Jean-Michel Folon considérait que ces aquarelles ainsi employées étaient une autre manière de rendre visible son art plutôt que dans les galeries ou les musées dans lesquels elles se retrouveront plus tard. Son compatriote Gaétan Saint-Remy glane dans de nombreuses archives et de pertinentes entrevues ce portrait intimiste de l’artiste dont l’homme-oiseau devint un emblème ludique d’une chaîne de télévision française. Il apporta ainsi du beau différent dans plusieurs sphères de notre univers. Cette œuvre aurait pu gagner le prix du meilleur portrait.

Je me soulève

Des acteurs et actrices marchent dans un parc le long du fleuve. Ils discutent d’un projet de spectacle à venir dont les sources seront les œuvres très contemporaines de trente-cinq poètes d’ici venus d’horizons divers. Les préoccupations qui sourdent, les espoirs qui éclosent sont ainsi portés dans une langue aux accents. Le spectacle Je me soulève des deux sœurs actrices et autrices Gabrielle Côté et Véronique Côté se construit petit à petit pendant un an prenant sa forme dans les ateliers, répétitions mais aussi dans les événements extérieurs qui y trouvent de nombreux échos. La musique bien entendu s’y ajoute et le documentaire éponyme d’Hugo Latulippe en montrant des extraits des représentations au Grand Théâtre de Québec. Il nous en donne le goût de le voir et sinon d’au moins de goûter par la lecture à cette prolifération de vers et de strophes. L’allant contenu dans cette prise de parole passant par le théâtre et la poésie a permis à ce film d ‘être déclaré avec raison meilleur film canadien dans ce festival.

Sergio Larraín, el instante eterno

Un jeune photographe chilien rend visible l’existence des enfants des rues à Santiago. Ses images sont appréciées par des maîtres de son art. Il part travailler pour Magnum. Il brosse un portrait étonnant d’une famille mafieuse, devient célèbre pour ses clichés dans lesquels la vie se situe au bord de l’hors-champ. Il quitte sa profession de reporter et entreprend une autre vie. Le travail méticuleux à la manière d’un moine créant une enluminure émaille à de nombreuses reprises ce portrait complexe d’un artiste considéré comme un des météores de sa profession tant sa vie prit des détours inattendus. C’est pour toutes ses qualités et pour la découverte d’un artiste majeur que Sergio Larraín, el instante eterno (Sergio Larraín, the Eternal Moment), de Sebastián Moreno, s’est naturellement mérité le Grand prix de ce festival qui continuera au cours de l’année d’offrir d’autres avenues cinématographiques vers les arts.