Hamlet
@ Place des Arts

 

CRITIQUE
[ Art lyrique ]
Élie Castiel

★★★★ ½

 

Mise en scène stupéfiante.

Diction parfaite.

Grandiose !

L’amour et ses contradictions.
Crédit : Vivian Gaumond

Première publique et médiatique samedi soir de l’ « inédit » Hamlet, du Français Ambroise Thomas, pour la première fois à Montréal depuis, apparemment, 1928. L’occasion pour les nombreuses nouvelles générations d’assister à une œuvre lyrique incomparable qui, à défaut de ne pas avoir été présentée depuis de très nombreuses décennies, ne retient pas des airs connus, sauf pour les connaisseurs en la matière.

Une œuvre symphonique puissante, fidèle aux grand auteurs italiens ou autres ; il y a du Verdi, du Puccini, Rossini, même du Wagner dès les premières notes. Maîtrise du bâton de Jacques Lacombe, très discipliné Orchestre Métropolitain, aucune interruption maladroite ou faiblesses. Un chœur totalement habité pour la circonstance. Le Hamlet/Opéra de Montréal se conjugue à la perfection.

Une distribution magnifique, notamment dans les solos éblouissants et bouleversants d’Ophélie, la sacrifiée dans ce récit digne des tragédies antiques – Sarah Dufresne donnant le meilleur d’elle-même, une diction parfaite, sentie, une association délirante avec l’espace scénique, une charisme organique des plus stupéfiants et surtout, la noblesse de la jeunesse, la fugue de l’élan amoureux… Et un énergique Hamlet (Elliot Madore, campant les diverses joutes dans l’art de l’interprétation avec une dextérité et un jeu hautement corporel à la fois intense et, selon les circonstances, subtilement distancé. D’une distribution majoritairement canadienne, la Française Karine Deshayes déploie avec forte conviction les paradoxes de son personnage (la reine Gertrude).

Une sorte de révélation.
Crédit : Vivien Gaumond

Pour le spectateur, il s’agit d’une expérience « première », unique puisque jamais vu auparavant et dans ce cadre particulier, la volonté de renouer avec la notion du regard, confortablement assis, mais obligé de suivre le récit, la musique et le chant avec une sorte de complicité à la fois séante et osons dire, arbitraire, mais tout à l’avantage des artistes sur scène et de la production dans son ensemble.

Les décors, tenant compte qu’il s’agit d’un opéra, sont simples, mais d’une fonctionnalité exemplaire dans les changements de lieux. Le brun domine, soudainement éclairé de bleu ou de blanc élégiaque selon la séquence dont il est question.

Gauthier, très fidèle à la modernité, se présente avec une ouverture d’esprit qui résonne ici, comme une sorte de « miracle de la représentation » où l’ancien et le nouveau s’unissent honorablement, nous laissant indéniablement un goût de plénitude. Par les temps qui courent, c’est tout à notre honneur.

Un tableau final qui donne froid dans le dos malgré la teneur du propos. On ne vous dira rien d’autre. Car le contraire serait indigne de notre part et ne causerait pas le choc émotionnel ultime, comme le veut la tradition, avant la tombée du rideau.

« Être ou ne pas être », qu’importe – évitons les clichés. Dans sa mise en scène, d’une droiture remarquable, Alain Gauthier renoue avec la théâtralité de cette œuvre lyrique, s’accommode parfaitement aux codes de la représentation et conduit l’opéra le plus près possible de l’art dramatique.

Dans ce sens, la célèbre Maria Callas, au cours de ses années de gloire, avait investi son jeu à la perfection.

Gauthier, très fidèle à la modernité, se présente avec une ouverture d’esprit qui résonne ici, comme une sorte de « miracle de la représentation » où l’ancien et le nouveau s’unissent honorablement, nous laissant indéniablement un goût de plénitude. Par les temps qui courent, c’est tout à notre honneur.

FICHE ARTISTIQUE PARTIELLE
Hamlet
Opéra en 5 actes

Compositeur
Ambroise Thomas

Livret
Ambroise Thomas ;

D’après Hamlet, de Shakespeare.
Tiré du Alexandre Dumas
Pupitre
Jacques Lacombe

[ Orchestre Métropolitain ]
Mise en scène
Alain Gauthier

Distribution
Talise Trevigne (Violetta)
Elliot Madore (Hamlet), Sarah Dufresne (Ophélie)
Karine Deshayes (La reine Gertrude), Nathan Berg (Claudius)
Antoine Bélanger (Laërte), Rocco Rupolo (Marcellus)
Alexandre Sylvestre (Horatio), Matthew Li (Polonius)
et Alain Coulombe (le spectre)

Décors
Frédrérick Ouellet
Costumes
Sarah Balleux
Éclairages
Renaud Pettigrew 

Durée
2 h 50 min

[ Incl. entracte ]
Diffusion @
Place des Arts
[ Salle Wilfrid-Pelletier ]

 

Représentations
Jusqu’au 24 mai 2024

19 h 30
Dimanche 24 mai : 14 h

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]