Hoor Malas
@ Agora de la danse

 

CRITIQUE
[ Festival Accès Asie ]
Élie Castiel

★★★ ½

Le corps

consenti

La durée, moins qu’une heure, est d’autant plus essentielle, voir capitale dans ce solo féminin, véritable exploration du corps. Il n’est pas de mise de se perdre dans des longueurs dans ce genre de proposition.

En quelque sorte, pour Hoor Malas, moyen-orientale en corps et en âme,  « expérimenter le corps » tient du défi, une lutte qu’il faut relever. Á plat ventre, à la droite de la surface-scène, elle gesticule le corps dans une sorte de rituel de renaissance, comme si la vie reprenait de nouveau. L’éclairage est intime, presque sournois, mettant l’assistance perplexe, ne sachant pas très bien où se dirige ce rite quasi ancestral fascinant. Musique de Shadi Ali aidant, faite de murmures, chuchotements, transitoire, allant d’un espace à l’autre, par moment sourde et des instants d’incantations qui cherchent à se prononcer.

Petit à petit, elle avance vers le côté gauche, parfois comme un reptile, reprend son allure humaine ; par moments, presque prête à se relever pour atteindre l’apothéose.

Ça prendra quelques minutes pour que le corps s’installe, debout sur scène.

Il n’est guère surprenant que dans cette création, notre Margie Gillis nationale agit comme mentore. Les gestes, les mouvements, les expressions faciales le confirment.

Malas, quant à elle, raconte ses origines, une fois debout ; sa Syrie natale se trouve dans un endroit du monde où le corps féminin est autant vénéré qu’interdit. On évitera un cours de sociologie sur la question.

Une fois debout, atteindre des sommets.
Crédit : David Wong

Hoor, la danseuse, devient ici un symbole, une figure de style adaptée à l’art chorégraphique. Tenter de comprendre serait futile. S’agit-il d’un phénomène provoqué par la notion de métonymie où les influences contraires finissent par se retrouver ? Ce qui est vrai, sans aucun doute, c’est bel et bien que l’artiste finit par nous convaincre du bien-fondé de sa proposition.

Elle provoque, prend des risques, ramène des questions, s’insurge pour ainsi dire, socialement, politiquement, ce qui est, dans son cas, de par ses origines, un geste subversif.

Tout compte fait, le corps de la femme est ici magnifiquement consenti, mais un consentement envers soi-même, sa physicalité, son esprit, une âme qui ne cesse de se questionner. Au tour des autres femmes de cet endroit du monde de s’affirmer.

Dans son libellé, elle nous dit qu’il s’agit de son histoire. Mais n’est-elle aussi celle des femmes de son pays, de tous les pays (ou presque… si vous voyez ce que je veux dire, mais préférant ne pas m’y aventurer, gardant le silence, par les temps qui courent) du Moyen-Orient.

Tout compte fait, le corps de la femme est ici magnifiquement consenti, mais un consentement envers soi-même, sa physicalité, son esprit, une âme qui ne cesse de se questionner. Au tour des autres femmes de cet endroit du monde de s’affirmer.

C’est déjà un énorme pas en avant.

FICHE ARTISTIQUE
Chorégraphie Hoor Malas
Musique Shadi Ali
Éclairages Marko Croteau
Costumes Sonya Bayer
Mentore Margie Gillis

Durée 45 min [ Sans entracte ]

Public (suggéré)
Non recommandé aux moins de 13 ans

Diffusion & Billets @
Agora de la danse

16 mai 2024

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]