Je verrai toujours vos visages

PRIMEUR
Sortie
Vendredi 10 novembre 2023

 

Le Film de
la semaine

CRITIQUE
Élie Castiel

★★★★ 

De

grâce

et de

fureur

La justice réparatrice (en France, restaurative). La parole règne dans le nouveau long métrage de Jeanne Henry, après, notamment Pupille (2018). Des mots qui peinent à sortir ou, a contrario, émergent d’un raisonnement qui a parfois du mal à exprimer les vrais sentiments, les sensations.

Au cinéma, un leg laissé par les expériences théâtrales et qui dans le cas de Je verrai toujours vos visages, prend des allures de mise en exposition (plutôt que de mise en scène). Un groupe comme les célèbres AA, avec ses rituels de présentation, de petites (ou grandes) crises au cours des séances, des interrogations qui viennent de ce que l’on a dit ou entendu.

Pour Jeanne Henry, suivant une ligne thématique bien tracée, particulièrement amorcée dans Pupille, dont le thème de l’adoption devenait le noyau du film, la question centrale est de faire en sorte que cette parole devienne le point d’ancrage d’une mise en situation de l’esthétique.

Choix des plans, de cadrages parfois serrés, de gros plan subtiles qui font partager avec autant de consternation que d’expression ce qui se cache derrière l’esprit des participantes et participants.

Hommes, femmes, toute une faune de personnes écorchés et de toutes classes sociales. Inceste, accro aux stupéfiants ou autres témoignages bouleversants.

Un titre aux multiples interprétations, mais surtout reposant sur l’écoute, sur la perception qu’on peut se faire des choses. Clameurs timides, échos bruyants, émotions à fleur de peau. Récits qui se chevauchent inlassablement et participent de ce jeu d’espace dramaturgique qui semble se construire de session en session.

Entre larmes intérieures et résignation, entre le risque et le manque, autant d’enjeux humains qui transforment le film de Henry en une puissante attestation aussi humaine que captivante. Une courageuse réflexion sur le désir insurmontable de s’en sortir. Et d’oublier à sa façon comme le reflète admirablement bien la fin du film. En quelque sorte, un authentique film d’amour, viscéral, coup de poing, insensible aux larmes, cherchant plutôt les variantes possibles pour déchaîner les arcanes du possible changement.

Les retours en arrière auraient pu, dans un sens, être non autorisé, mais ne servent-ils pas également à saisir les véritables intentions de cette proposition inusitée où la parole est omniprésente. Et s’articule autour d’un travail de son stupéfiant mis en exergue par Guadalupe Cassius, vraiment proche des personnages.

Mais le plus surprenant est du surprendre une panoplie de personnages pris entre les murs d’une sorte de huis clos au service d’un silence qui explose faute de savoir se libérer. Une mise en scène aussi originale que magnifiquement louable.

De ces instants d’émotions, la franco-grecque Adèle Exarchopoulos s’en tire avec tous les honneurs, donne à son personnage toute la retenue et dans le même temps la douleur et rage qui nourrissent son âme d’écorchée. On retiendra le jeu puissant de noms connus comme Miou-Miou, comme toujours, prenante,  ou encore Gilles Lellouche. Et une révélation, Dali Benssalah, d’une farouche énergie extériorisée et en même temps bouleversante de retenue et de maturité.

Mais le plus surprenant est du surprendre une panoplie de personnages pris entre les murs d’une sorte de huis clos au service d’un silence qui explose faute de savoir se libérer. Une mise en scène aussi originale que magnifiquement louable.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Jeanne Henry

Scénario
Jeanne Henry
Direction photo
Nicolas Loir
Montage
Francis Vesin
Musique
Pascal Sangla

Genre(s)
Drame social
Origine(s)
France
Année : 2022 – Durée : 1 h 58 min
Langue(s)
V.o. : français
Je verrai toujours vos visages

Dist. [ Contact ] @
A-Z Films
[ Trésor Productions ]

 

Diffusion @
Cinéma Beaubien
 Cineplex

Classement
Visa Général

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]