Joker: Folie à Deux

P R I M E U R
Sortie
Vendredi 4 octobre 2024

RÉSUMÉ SUCCINCT
À quelques jours de son procès pour les crimes commis sous les traits du Joker, Arthur Fleck rencontre le grand amour et se trouve entraîné dans une folie à deux.

 

CRITIQUE
Pascal Grenier

★★

Blague à part

Le génie trouble et sombre de Joker (2019), avec un Joaquin Phoenix au sommet de son art, ne pouvait que susciter une suite. Mais ce que nous avons ici cinq ans plus tard sonne davantage un épilogue fatigué sous forme d’une parenthèse enchantée qu’une véritable continuité spirituelle du succès critique et public initial. Joker: Folie à Deux nous vend l’idée d’une comédie musicale psychotique, mais léthargique avec Lady Gaga en Harley Quinn et Phoenix qui lui, reprend adéquatement, mais sans l’effet wow cette fois-ci, son rôle d’Arthur Fleck. Or, la seule folie palpable est celle qui s’empare des producteurs hollywoodiens, pressés de traire jusqu’à l’épuisement la vache sacrée du box-office.

Si l’emballage est soigné, on se contente d’enchaîner des numéros musicaux et chantés sans la moindre énergie. Ces séquences, répétitives et bien torchées sur le plan technique, manquent de ce supplément d’âme qui faisait la grandeur du premier film. Elles finissent par alourdir le récit, laissant transparaître une paresse créative flagrante, comme si l’équipe derrière ce projet avait rapidement épuisé ses idées et comblait le vide avec du remplissage scénique lors de ces intermèdes à une longue scène de procès sans grand intérêt. Sous-employée,  Lady Gaga est réduite à un rôle d’ornement chantant d’une Love Story qui ne fonctionne pas.

Une complicité pas tout à fait sincère.

Ce qui achève de rendre l’expérience frustrante, c’est cette sensation désagréable que le film se moque fortement de ses spectateurs. Joker: Folie à Deux se veut provocant, subversif, mais on ne peut s’empêcher de sentir l’arnaque. Une suite forcée qui se nourrit, non par un besoin narratif, mais par la pression du succès colossal du premier film. Ce nouveau Joker n’a plus rien de dangereux ; il est dépossédé et vidé de son essence, victime de son propre succès. Le premier Joker a laissé une marque indélébile chez les fans, mais cette suite ne fait que leur rappeler cruellement que, dans le grand cirque hollywoodien, ce sont eux les véritables perdants avec ce véritable volte-face en forme de farce et attrape.

Et comment ne pas se sentir trahi par cet épilogue creux sans réel enjeu narratif ? La grandeur du premier opus résidait dans sa capacité à sonder l’abîme d’un homme brisé, tout en évitant les pièges des stéréotypes du film de super-héros. Ici, l’abîme s’est rétréci, dénaturé en une mascarade sans substance, où chaque séquence musicale nous rappelle que le Joker n’est pas totalement absent de l’écran, qu’il apparaît par-ci par-là, n’est-ce pas ? Mais au lieu de subversion, on obtient un pastiche maladroit de ce qui a fonctionné la première fois. Le drame psychologique devient un prétexte pour remplir la durée de 138 minutes de scènes répétitives et de clins d’œil forcés à des œuvres du passé.

Todd Phillips et son acolyte/coscénariste Scott Silver ont décidé avec cette suite tant attendue de radicalement briser leur propre mythe, et ce sont les spectateurs qui en paient le prix. Car au final, en termes de suite qui se démarque de l’original, mais qui ne livre nullement la marchandise, on n’avait pas vu une telle déception depuis le désastreux et tristounet Exorcist II: The Heretic de John Boorman.

Le film ne répond à aucune des questions profondes laissées ouvertes par le premier. Il ne fait qu’errer dans une direction vague, alourdissant ses chansons et numéros sans jamais les transcender. Et à la fin, ce qui aurait dû être un hymne à la folie pure devient, en quelque sorte, une leçon sur le cynisme hollywoodien.

Todd Phillips et son acolyte/coscénariste Scott Silver ont décidé avec cette suite tant attendue de radicalement briser leur propre mythe, et ce sont les spectateurs qui en paient le prix. Car au final, en termes de suite qui se démarque de l’original, mais qui ne livre nullement la marchandise, on n’avait pas vu une telle déception depuis le désastreux et tristounet Exorcist II: The Heretic de John Boorman.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Todd Phillips

Scénario : Scott Silver, Todd Phillips;
d’après des personnages de Harley Quinn
Direction photo : Lawrence Sher
Montage : Jeff Grothe
Musique : Hildur Guðnadóttir

Genre(s)
Drame psychologique
Origine(s)
États-Unis
Année : 2024 – Durée : 2 h 18 min
Langue(s)
V.o. : anglais & Version française
Joker : Folie à deux

Dist. [ Contact ] @
/

Todd Phillips

Diffusion @
Cineplex

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

[ Violence ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]