La nef
@ Usine C
CRITIQUE.
[ Scène ]
★★★★
texte
Élie Castiel
Un
étrange
rapport
à
l’indicible
C’est cet étonnant lien à l’inépuisable indescriptible que Cédric Delorme-Bouchard voulait questionner, le concrétiser sur scène malgré la minceur des possibilités. Le dénouement est tout en démesure par sa beauté aussi plastique que lumineuse par sa simplicité.
Deux côtés accordés aux spectateurs, l’un à gauche, l’autre à droite. La scène circulaire au beau milieu, là où rien ne peut échapper à leur regard. Quatre pianos, deux de chaque côté, aux extrémités. Les exécutants de chacun des instruments débutent le spectacle.
Puis, après, les artistes de BOP, pour « Ballet Opéra Pantomime » débutent, pour ne pas utiliser un cliché, un rituel « qui sort de l’ordinaire » En tout, plus de soixante minutes d’une messe sacrée dédiée au mouvement et à la musique. Des partitions uniques, d’une prise en charge de l’ouïe qui bouleverse et étonne en même temps. Olivier Messiaen, un des pères de la musique classique de la modernité comme source d’inspiration à Alexis Raynault et Sophie Dupuis. Le duo a construit un opus musical d’une extraordinaire originalité et le metteur en scène, convaincu du bienfait de ces accords, en retire les plus beaux moments, courts, brefs, juste ce qu’il faut, là où ce qui semble répétitif n’est en quelque sorte que sacré, auréolé de pouvoir intangible et, du coup, profane.
Concrètement, chacune son tour, chacun son tour, les danseuses et danseurs participent de ce tour de force entre musique et mouvement. Le corps parfait n’a plus sa raison d’être. Très ingénieusement, les âges se confondent. Et pourtant, dans chacun des mouvements, une harmonie lorsque ensemble qui, justement, réside dans la quête individuelle, selon ses propres sensations, son rapport à la scène, un espace sphérique qui convoque également d’autres angles géométriques.
On réalise alors que tout le long du spectacle, chacune de ces chaînes artistiques n’ont fait que solliciter des trêves sans qu’on s’en aperçoive. C’est ainsi que Cédric Delorme-Bouchard gagne haut la main son exubérant pari.
Les allées et venues s’adaptent au rythme des touches de piano, sautillent à peine lorsqu’il le faut, s’adaptent au temps qui passe à une lenteur religieuse spirituelle.
La nef, avant tout, est aussi, pour le spectateur, une aventure du regard, du coup, totalement déconstruit. On ne voit pas ce spectacle de la même façon que les autres. Comment mettre ensemble tous les éléments d’une production – mise en scène, musique, mouvements, éclairages, mêmes costumes… et les joindre en un tout unificateur?
Côté-atmosphère, le rouge et le bleu dominent, le blanc s’installe ensuite sans crier gare.
Une bizarre sensation de bien-être viscéral submerge la salle, tous rapports de force confondus? L’euphorie est subtile, timide, d’une élégance non criarde.
Et au bout de ces plus que soixante minutes, une finale spontanée où l’extase des liens de pouvoir entre diverses disciplines de la représentation se donne droit de cité. On réalise alors que tout le long du spectacle, chacune de ces chaînes artistiques n’ont fait que solliciter des trêves sans qu’on s’en aperçoive. C’est ainsi que Cédric Delorme-Bouchard gagne haut la main son exubérant pari.
ÉQUIPE PARTIELLE DE CRÉATION
Mise en scène / lumière / décor
Cédric Delorme Bouchard
Musiques
Olivier Messiaen
Alexis Raynault, Sophie Dupuis
Arrangements & Au piano
Samuel Blanchette Gagnon, Isabelle David
Mehdi Ghazi, Gaspard Tanguay Labrosse
Interprétation
David Albert-Toth, Leslie Baker
Marc Boivin, Mélanie Chouinard
Jennifer Desbiens, Myriam Foisy
Lucie Grégoire, Emmanuel Proulx
Mouvement
Danielle Lecourtois
Rituel
Christelle Franca
Costumes
Camille Jupa
Durée
1 h 10 min
[Sans entracte ]
Diffusion & Billets @
Usine C
Jusqu’au 17 mai 2023
Auditoire (suggéré)
Tout public
ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen.★ Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]
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