Les Waitress sont tristes

CRITIQUE.
[ Scène ]

★ ★ ★ ★

texte
Élie Castiel

Lonesome

Cowboy

Donner la parole à ceux qui ne
l’ont que rarement, pour ne pas
dire « jamais ». Leur accorder
le degré social auquel ils ont
droit, également leur octroyer
la visibilité dansla sphère
culturelle qui, souvent, les
marginalise, même si les choses
changent, lentement mais
sûrement depuis un certain temps.

Michael Nimbley (on évitera d’en dire plus), qui a eu l’idée, s’est occupé de l’écriture et assuré de la co-mise en scène (avec Catherine Bourgeois, également active dans la création) nous convoque à une autre façon de voir, de compter le rythme de la vie, de savourer un récit dans toute sa simplicité; et c’est justement dans son abandon des règles établies, parfois rigides, par sa bonhomie, mais surtout par son humilité empreinte autant de tristesse que de mélancolie que Les Waitress sont tristes séduit, rend heureux, établit des ponts entre moi et les autres, entre nous et les oublié.es. Pour qu’on sorte de la salle de meilleures personnes, de savourer le temps qui passe et de comprendre finalement que tous ces bobos dangereux qui se passent dans la planète terre sont des anamolies qu’il nous faut corriger.

Seul;, entre la Lune et la Terre.
Crédit : Vivien Gaumand

Pour certains spectateurs, la répétition de certaines scènes peuvent paraître redondantes, mais elles ne font que suivre les paroles des chansons country (en anglais et en français) qui ne sont après tout, en grande partie, que  des complaintes amoureuses, des histoires d’amours perdues, de lieux et de familles laissés pour courir à l’aventure. Le rêve masculin d’une certaine Amérique.

Il n’est donc pas surprenant que le seul personnage homme de ce beau poème en mode western assume son état de drifter (vagabond), errant d’un espace à l’autre, laissant sa trace sans s’en rendre compte. Et avec lui, comme seul compagnon, un petit chat femelle, qui répond toujours en miaulant, comme un signe d’accord.

Crédit : Vivien Gaumand

La dernière séquence, d’une grâce étonnante, d’une tristesse accomplie, restera longtemps dans notre mémoire. Tout simplement, « brillant ». Comme ce vieux cowboy solitaire qui arrive, sans efforts, à nous réconcilier finalement avec la vie.

Un chœur féminin de chanteuses-danseuses-serveuses et parfois musiciennes pour l’accueillir d’un bar routier à l’autre, parfois même essayant de nouer une certaine amourette qu’on sait irréalisable, du moins à long terme.

Le Waitress sont tristes, c’est le passage du temps, c’est le rythme de la vie lorsqu’on s’accorde, justement, le temps de la vivre. Mais c’est aussi renoncer à un confort parfois déstabilisant puisque constamment à sa recherche.

Crédit : Vivien Gaumand

Autant Anna Atkinson, Maryline Chery, Guillemina Kerwin, que Natacha Thompson et Anne Tremblay, participent admirablement (corps, voix et âme) de cet étrange et magnifique jeu théâtral où les faux pas, les raccords imprécis, les notes un peu de travers, les déboires de ce qui nous blesse, tous ces éléments irréversibles de l’existence traduisent en quelque sorte une partie de la condition humaine.

La dernière séquence, d’une grâce étonnante, d’une tristesse accomplie, restera longtemps dans notre mémoire. Tout simplement, « brillant ». Comme ce vieux cowboy solitaire qui arrive, sans efforts, à nous réconcilier finalement avec la vie.

ÉQUIPE PARTIELLE DE CRÉATION
Texte (Idée)
Michael Nimbley

Co-création
Catherine Bourgeois

Collaboration au texte
Pénélope Bourque

Interprètes
Anna Atkinson, Maryline Chery
Guillermina Kerwin, Michael Nimbley
Natach Thompson, Anne Tremblay

Éclairages
Andrey-Anne Bouchared
Flavie Lemée

Costumes
Louise Pimprenelle Nicolas

Audiodescription
Claudette Lemay et Connec-T

Traduction
Natacha Thompson

Production
JOE JACK ET JOHN

Durée
1 h 15 min

[ Sans entracte ]

Diffusion @
Espace Libre
Jusqu’au 1er octobre 2002

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]