Présence autochtone 2022

ÉVÉNEMENT.
[ Festival ]

texte
Luc Chaput

Histoires

universelles

À La Paz (Bolivie), une vieille dame reconnaît Elder, un mineur, comme son filleul. Celui-ci est sûr qu’elle se trompe mais accepte finalement son aide. C’est cette exploration de la complexité des relations humaines que plusieurs long métrages abordaient dans cette édition du festival qui a étendu ses ailes dans de nombreux domaines artistiques.

El gran movimiento

La Paz, une conurbation d’environ deux millions de personnes, est la capitale nationale la plus haut perchée au monde. Le mouvement du titre El gran movimiento (The Great Movement) fait tout d’abord référence aux manifestations monstres des mineurs venus demander l’amélioration de leurs conditions. La caméra de Kiro Russ survole la ville dans une cacophonie de bruits avant de se concentrer sur ce trio d’amis dont Elder. Le montage alterne entre des vues de foules et de quartiers de cette métropole avec l’histoire de ce trio mais surtout d’Elder qui, atteint d’une maladie respiratoire, est l’objet de la sollicitude de la vieille dame précitée. Mama Pancha fait appel à un shaman, Max, dont l’allure est plutôt décriée dans son quartier. La mise en scène prend des détours étonnants, entre autres musicaux, suivant ses personnages dans leurs pérégrinations et leurs interactions dans cette vision polyphonique d’une grande ville multiethnique.

Apenas el sol

Un homme âgé enregistre sur cassettes les propos d’autres membres du peuple Ayoreo qui ont été déplacés dans des plaines semi désertiques du Paraguay par des organisations missionnaires au fil du temps. La réalisatrice Arami Ullón, compatriote vivant en Suisse, a eu vent de cette migration forcée et a pu entrer en contact avec Mateo Sobode Chiqueno. Avec une très petite équipe, la signataire de Apenas el sol (Nothing But the Sun) filme les conditions de vie précaires de ces populations et nous amène à appréhender par petites touches les peurs et les désirs de plusieurs individus dont José Iquebi Posoraja qui fut capturé enfant dans la forêt. Y vivent encore de petits groupes de ce peuple dont l’existence est depuis peu d’années officiellement protégée par une loi.

Returning Home

Parce que le pensionnat autochtone ne lui a jamais remis le chandail orange, cadeau de sa grand-mère, qu’on lui avait pris lors de son arrivée à six ans dans ce lieu d’assimilation forcée, Phyllis Jack-Webstad a suscité en 2013 un mouvement populaire qui a amené à la création de la Journée du Chandail orange le 30 septembre. Le cinéaste de la nation Secwépemc Sean Stiller rappelle l’histoire de la relation primordiale entre les Premières nations de la Colombie Britannique et le saumon tout en accompagnant sa concitoyenne Phyllis dans ses déplacements pour des rencontres avec des jeunes dans les écoles ou en un retour au fameux pensionnat St Joseph. Pour son rappel des effets de la surpêche et des changements climatiques sur la vie de ces populations et pour son portrait amical de la résiliente protagoniste, Returning Home, premier long métrage produit par Canadian Geographic, mérite tous les prix qu’il a jusqu’ici remportés.

D’autres films comme Powerlands de la jeune Ivey Camille Manybeads Tso, survol attachant de la lutte de certaines populations contre l’exploitation effrénée des ressources, font aussi partie de cette rencontre montréalise au long cours où musique, poésie et colloques montrent la vitalité et la résurgence culturelle de ces Premiers peuples.