Red Rocket
P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 17 décembre 2021
SUCCINCTEMENT.
Mikey Saber revient dans sa ville natale du Texas après des années de carrière de pornstar à Los Angeles. Les habitants du patelin ne sont pas vraiment contents de le revoir.
CRITIQUE.
★★★★
texte
Élie Castiel
C’est surtout avec le merveilleux Tangerine (2015) que Sean Baker se révèle à la critique et au public friand de films indie, ce genre à part dont une génération de jeunes cinéastes américains se sont fait les apôtres d’une spécialité dû en grande partie à l’effet-Sundance : tournage, en général, hors des grandes villes ; personnages de classes ouvrières ou parfois, bien souligner cet adverbe, des intellectuels ayant fui les centres névralgiques pour des cieux plus cléments.
Ou encore, ce qu’on appelle communément les centres peuplés aussi de white-trash, ces nombreux Paris, Texas de l’Amérique. Sur ce point, on soulignera également son étonnant The Florida Project (2017) où les deux enfants-vedettes s’animent avec une étonnante décontraction.
Ici, Texas City, patelin au cœur du Texas qui, entre les mains de Baker devient le terrain de toutes les possibilités narratives. Endroit où personne ne dicte la façon dont vous allez mener votre vie. Comme avoir été acteur porno, aujourd’hui plus âgé, et fauché. De retour chez lui, Mikey sent le besoin de pratiquer l’art de la débrouille, comme c’est le cas de tous les habitants – sauf une infime minorité qui habite dans de rares coins aux habitations plus cossues. C’est aussi, pour Baker, l’occasion de confirmer une fois de plus que le cinéma indie est quelque chose de sérieux, de vachement sérieux, et qu’il ne faut pas le prendre à la légère.
Le mythe indissociable
d’une Amérique figée
Notamment lorsqu’on peut compter sur des comédiens exceptionnels qui, chacun son tour, n’essaie pas de voler la vedette. Chacun, chacune étale son savoir-faire avec une extraordinaire énergie. Comme Mikey (excellent Simon Rex) d’abord, ancien du X, son ex-femme (versatile Bree Elrod) qui, soit dit en passant, est toujours sa femme, la mère de celle-ci, brillante, époustouflante, une Brenda Deiss méconnaissable.
Et nous sommes à la veille des Élections où un peu plus tard, Donald Trump gagne à son grand étonnement grâce, notamment, à des États comme celui du Texas, terre de liberté, d’une partie de ce White Trash et de cet esprit d’affranchissement propre aux Américains qui consiste à vivre sans contraintes. C’est de cela que se nourrit également ce mythe américain. Réussir à tout prix, même s’il faut vendre son corps au diable, comme l’espère Mikey, renvoyant pour ainsi dire au personnage de Strawberry, la vendeuse de Donuts qui affiche mille et une raisons pour réaliser ce projet de se rendre à Hollywood pour poursuivre une carrière X prolifique.
Par le biais de la fiction cinématographique, le cinéaste dessine le canevas d’une Amérique qui n’existe que dans l’imaginaire. Mais celle dont Baker nous fait le portrait est-elle vraiment si imaginaire que cela? Comme quoi la devise « Make America Great Again » renvoit à quelque chose comme continuer à croire farouchement aux vertus illusoires du mythe fondateur.
Un gros plan et un moyen, magnifiques, signalent la fin du film, peut-être un peu trop long, mais qui montre jusqu’à quel point cette image du mythe de l’Amérique dont tous rêvent est en quelque sorte la métaphore de l’extrême aboutissement d’une vie au pays où le fric fait figure de divinité collective.
Par le biais de la fiction cinématographique, le cinéaste dessine le canevas d’une Amérique qui n’existe que dans l’imaginaire. Mais celle dont Baker nous fait le portrait est-elle vraiment si imaginaire que cela ? Comme quoi la devise « Make America Great Again » renvoit à quelque chose comme continuer à croire farouchement aux vertus illusoires du mythe fondateur. Mais peut-être qu’il est finalement temps de repousser ce phantasme unique aux calendes grecques.
FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Sean Baker
Scénario
Sean Baker
Chris Boyd
Direction photo
Drew Daniels
Montage
Sean Baker
Chanson
Bye Bye Bye
Genre(s)
Comédie dramatique
Origine(s)
États-Unis
Année : 2021 – Durée : 2 h 08 min
Langue(s)
V.o. : anglais; s.-t.f.
Fusée rouge
Dist. [ Contact ] @
Métropole Films
Classement
Interdit aux moins de 13 ans
[ Érotisme / Langage vulgaire ]
Diffusion @
Cinéma du Parc
Cineplex
[ Salles VIP : Interdit aux moins de 18 ans ]
ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]