Bruno Reidal :
Confession d’un meurtrier

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 09 septembre 2022

SUCCINCTEMENT.
1er septembre 1905. Un séminariste de 17 ans est arrêté pour le meurtre d’un enfant de 12 ans. Pour comprendre son geste, des médecins lui demandent de relater sa vie depuis son enfance jusqu’au jour du crime.

COUP de ❤️
de la semaine.

CRITIQUE.

★★★★  ½

texte
Élie Castiel

Le plan, cette unité magique, incontournable dans toute
sa force d’évocation, sa place dans le film, c’est-à-dire
ce qui est essentiel, procure une jouissance purement
cinématographique au premier long métrage solo de
Vincent Le Port. Accueil mitigé de la part des critiques
un peu partout. Raison? Ceux enthousiasmé par une
œuvre forte, limpide, lumineuse en dépit de son sujet
quasi inexplorable, la conscience exigüe de son
personnage principal à ne voir que ce qui le poursuit
sans cesse, hantant ses jours et ses nuits.

Pulsions

viscéralement

impures

Une enfance au cours de laquelle une révélation se confirme par le goût du crime, perpétré envers les garçons de son âge. Seulement les garçons et non pas les filles. D’où sans doute une homosexualité férocement refoulée – séquence dans le champs avec le berger ambulant (très vaillant Rémy Lebouq), révélatrice et traumatisante en même temps, appuyant les paradoxes d’une première fois chez l’enfant, à ce moment, début de l’adolescence. Peut-être aussi la mise à mort d’un cochon dans la pauvre demeure familiale d’un village du Cantal.

Car en fait, plus que tout, Bruno Reidal est une gestation, celle d’un meurtrier, non pas né, mais le devenant au hasard d’une conscientisation de soi, d’un processus inexplicable de trouble psychologique. On évitera le « cliché » freudien, optant pour le traitement du cinéaste à partir du livre de François Bourgoin, Serial Killers.

Et les préparatifs du procès puisqu’il s’agit de cela. Non pas une accusation, mais d’un extraordinaire échange psychologique d’une rare maturité et d’une intelligence de rapports remarquables entre les docteurs attitrés et le coupable.

« Je me livre à la justice en toute conscience… »

Le verbe, ici, n’est jamais gratuit. Tout se passe selon un travail scénaristique maîtrisé avec une rare obsession. Comme si faire preuve de paroles superficielles ou de propos sans fondement bousillerait toute la puissance du film.

À 17 ans, le jeune séminariste, de la famille la moins nantie de l’institution, se rend à la police avouant avoir commis un meurtre, celui d’un jeune de 13 ans. On ne vous révélera pas les détails.

Entre le goût de déposséder les jeunes de la vie et les besoins de masturbation excessive, un discours trop controversé que se permet Le Port, conscient des conséquences sur les spectateurs et une partie non négligeable d’une certaine critique.

Le cinéaste assume son propre mécanisme, se jette à corps perdu dans une aventure audacieuse qui ne possède que l’atout de l’approche formelle pour se défendre. En effet, une fois de plus, le « plan », unité qui dit tout, mais en même temps nous situe dans un rapport fondamentalement subliminal, voire transcendant avec le film, sans préjugés, pour ce qu’il est. C’est à cela que semble aspirer Le Port.

Il transgresse, tout en maintenant une certaine rigueur. Il endosse les risques encourus en sachant très bien ce à quoi il peut s’attendre ou entend exprimer. Bruno Reidal n’est pas seulement la « confession d’un meurtrier », mais également la mise en examen d’une société aseptisée, le « crime de Bruno », même si tiré d’une histoire vraie, dépasse, dans le film, la vérité crue, posant une regard analytique sur le monde de l’enfance, de ce qu’il peut être dans quelques cas rarissimes.

Au son, Charlotte Butrak manifeste une rare altérité, sournoise même, confondant les bruits de la nature et des humains avec le parcours dissident du personnage. Travail exigeant. Et Dimitri Doré : le visage, nous pourrions même dire « les » visages, les diverses démarches, les silences et les paroles mesurées, tout participe de cette approche originale de l’interprétation. Un excellent acteur fait surface.

Impossible d’ignorer les extraits de la musique d’Olivier Messiaen, assurant au film une énergie farouche. Elle prolifère par intermittences, ponctuant telle ou telle situation. Mais encore une fois, c’est encore le « plan » qui domine, parfois proche des tableaux romantiques, comme la rencontre, dans un rocher, de Bruno avec un de ses camarades du séminaire, où l’attirance de l’un envers l’autre est suggérée, mais pour différentes raisons.

Au son, Charlotte Butrak manifeste une rare altérité, sournoise même, confondant les bruits de la nature et des humains avec le parcours dissident du personnage. Travail exigeant. Et Dimitri Doré : le visage, nous pourrions même dire « les » visages, les diverses démarches, les silences et les paroles mesurées, tout participe de cette approche originale de l’interprétation. Un excellent acteur fait surface. Il participe également à la voix-off qui se manifeste de temps en temps; d’une part, le réalisateur tout à fait conscient d’une certaine tradition à la française, mais d’autre part, se faisant le témoin d’un fait divers à raconter. Le prix « Jean Carmet » (meilleure interprétation) décerné à Doré au Festival Premiers Plans d’Angers est hautement mérité.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Vincent Le Port

Scénario
Vincent Le Port

Direction photo
Michaël Capron

Montage
Jean-Baptiste Alazard

Musique
Extraits de morceaux
d’Olivier Messiaen

Vincent Le Port, réalisateur.
Sans jugement, ni affectation.

Genre(s)
Drame biographique

Origine(s)
France

Année : 2021 – Durée : 1 h 41 min

Langue(s)
V.o. : français; s.-t.a.

Bruno Reidal: Confession of a Murderer
Autre titre

Bruno Reidal

Dist. [ Contact ] @
Maison 4tiers

Classement
Interdit aux moins de 13 ans
[ Violence ]

Diffusion @
Cinéma Beaubien
Cinéma du Musée
Cineplex

[ Salles VIP : Interdit aux moins de 18 ans ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

Histoires boliviennes

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 09 septembre 2022

SUCCINCTEMENT.
Portraits d’habitants de La Paz et de la culture aymara.

CRITIQUE.
★★★

texte
Luc Chaput

Effervescence

d’une métropole

Sur un trottoir d’une rue secondaire de La Paz, Anita prépare des petits déjeuners chaque matin de 6 h à midi. Elle subvient aux besoins de sa famille de cette manière.

Le réalisateur québécois Guy Simoneau (Plusieurs tombent en amour, Desplazados) a participé dans les dernières années aux activités de la télévision bolivienne PlurinacionalTV dans sa capitale, la plus haute au monde. Muni d’une petite caméra, il a ainsi pu visiter cette ville tentaculaire s’intéressant plus au quartier bien nommé de l’Alto, maintenant desservi par un téléphérique ultramoderne. Une animatrice et enseignante, Sonia Siyani Callisaya, lui sert de personne-ressource, expliquant les changements dans la population autochtone spécialement depuis l’élection d’Evo Morales en décembre 2005. Des séquences servent de vignettes illustratrices aux propos éclairants de la communicatrice sur les petits métiers, les organisations et la place des femmes dans la société.

Près de là, un téléphérique ultramoderne.

Un court épisode se passe à la Porte du Soleil de Tiwanaku, lieu inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, l’équipe du film ne sort à peine de La Paz qu’à cette occasion. N’évoquant Sucre, la capitale constitutionnelle et judiciaire du payas que par un libellé sur un autocar, ce périple très concentré ne nous permet pas d’appréhender les autres régions de cette contrée enclavée d’Amérique du Sud. Des commentaires écrits en bas d’écran ou dits auraient pu relier ces courts portraits de personnes ou de groupes à l’Histoire complexe du pays.

Le long métrage prend une autre allure à compter des préparatifs à l’élection présidentielle d’octobre 2019, pendant son déroulement et ses suites chaotiques. La caméra se met plus au centre de l’action, les positions des uns et des autres sont mieux détaillées et alors l’Histoire est en train de se dérouler sous nos yeux et la vie d’une population que l’on a découverte par bribes avant s’en trouve ainsi bouleversée. Le temps a accompli son œuvre devant le regard d’un documentariste attentif.

Des séquences servent de vignettes illustratrices aux propos éclairants de la communicatrice sur les petits métiers, les organisations et la place des femmes dans la société.

 

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Guy Simoneau

Recherche
Guy Simoneau

Direction photo
Guy Simoneau

Montage
Guy Simoneau

Musique
Alain Auger

Guy Simoneau, cinéaste.
S’intéresser aussi à l’ailleurs.

Genre(s)
Documentaire

Origine(s)
Canada [Qc]

Année : 2022 – Durée : 1 h 49 min

Langue(s)
V.o. : espagnol, s.-t.f.

Historias bolivianas

Dist. [ Contact ] @
K-Films Amérique

Classement
Visa GÉNÉRAL

Diffusion @
Cinéma Beaubien

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

Je vous salue, salope :
La misogynie au temps du numérique

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 09 septembre 2022

SUCCINCTEMENT.
Plongée dans un récit composé de plusieurs femmes victimes d’agression.  Elles ont décidé de ne plus se taire.

CRITIQUE.

★★★

texte
Élie Castiel

 

Femmes au bord

de la crise

d’intimidation

Les deux réalisatrices ont choisi quatre femmes pour appuyer leur thèse, pas nouvelle dans la sphère publique, mais d’autant plus essentielle qu’encore aujourd’hui, les questionnements qu’elle soutient sont encore d’actualité; situation qui empiré au cours des quatre années de Trump au pouvoir.

Il y a Laura Boldrini, première femme nommée à la chambre des députés en Italie. Puis Kiah Morris, de Chicago, installée avec mari et enfants dans une petite ville du Vermont, représentante au Congrès.

Plus près de nous, Laurence Gratton, suivant des cours de pédagogie dans un établissement universitaire pour ensuite enseigner au primaire. Et puis, la Française Marion Séclin, qui propose un niveau discours sur le féminisme, travail comme vidéaste aidant.

Comme dénominateur commun aux quatuor : les violences verbales de toutes sorties, les messages de possible agression, le racisme ordinaire. Surtout et avant tout parce qu’elles sont des femmes qui détiennent (ou détiendrons) une certaine forme de pouvoir.

Une idée sexiste sur la réverbération des mots.

Pour certains hommes d’aujourd’hui qui ne se reconnaissent plus face aux divers mouvements d’émancipation de la femme, les réseaux sociaux sont une arme à double tranchant; d’une part, leur permettant de réduire la femme au rang des pires salopes (d’où le vocable dans le titre français du film); de l’autre, le accusant de les avoir détrôner.

Le système patriarcal n’est pas prêt à s’écrouler. On aurait cependant voulu que Léa Clermont-Dion et Guylaine Maroist réagissent aussi face à ces femmes qui défendent ce sexisme, comme celles qui ont voté massivement pour Trump. Dans un sens, le film de Clermont-Dion et Maroist oscille entre diverses couches narratives, ne sachant pas toujours quel point de vue prendre.

Télévisuelle comme approche cependant, fortement appuyé par les réseaux impliqués dans la production qu’on constate dans le générique de fin. Conclusion : essentiel et stimulant.

Le discours de Kiah Morris nous a semblé le plus poignant parce que la protagoniste entretenant ses propos avec une force d’évocation pénétrante. Le mari, lui, avoue sa tristesse face aux harcèlement dont elle est victime. Elle se bat, il la suit dans cette bataille.

Visuellement, rien de vraiment neuf dans le genre documentaire, même si quelques sophistications bienvenues s’infiltrent par-ci, par-là. Télévisuelle comme approche cependant, fortement appuyé par les réseaux impliqués dans la production qu’on constate dans le générique de fin. Conclusion : essentiel et stimulant.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Léa Clermont-Dion
Guylaine Maroist

Scénario
Léa Clermont-Dion
Guylaine Maroist

Direction photo
Louis-Vincent Blaquière

Fabien Côté
Steeve Desrosiers

Montage
Jean-François Lord
Éric Ruel

Musique
Antoine Rochette

Genre(s)
Documentaire social

Origine(s)
Canada [Qc]

Année : 2022 – Durée : 1 h 21 min

Langue(s)
V.o. : anglas, français; s.-t.a. ou français

Backlash : Misogyny in the Digital Age

Diffusion @
Les Productions de la Ruelle

Classement
Visa GÉNÉRAL

Diffusion @
Cinéma Beaubien
Cinéma du Parc
Cinémathèque québécoise

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

1 215 216 217 218 219 350