Norbourg

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 22 avril 2022

SUCCINCTEMENT.
Éric Asselin, inspecteur et vérificateur, est mandaté pour surveiller les activités de la firme Norbourg. Fiction sur un scandale financier québécois survenu en 2005.

Le FILM
de la semaine.

CRITIQUE.

★★★★

texte
Élie Castiel

Scandale$ à

haute tension

Finalement, le verdict lui donne un gros 18 ans de prison. Il n’en purge que trois. Comme quoi, comme disent nos amis anglo-saxons, « you can get away with murder ». Les cinéastes américains, ces voisins du sud, sont plus coriaces, comme le démontrent des films tels que The Wolf of Wall Street / Le loup de Wall Street (2013) de Martin Scorsese, sans oublier le très mitigé mais non moins pertinent Wall Street (1987) d’Oliver Stone, autrefois maître-gourou de la contestation.

Au Québec, sujet presque tabou puisque on est dans un endroit du monde où tout semble être pardonné, du faux pas inconséquent aux dérapages les plus retentissants. Comme si la maxime christique « que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre. » prévalait dans tous les enjeux sociaux. Néanmoins, reconnaissons à Robert Morin d’avoir réussi sa parodie financière Papa à la chasse aux lagopèdes (2008).

Pour Maxime Giroux, dont Jo pour Jonathan (2010) demeure jusqu’à présent sa meilleure réalisation, bien que nous ayons été agréablement surpris par Félix et Meira (2014), le temps de la maturité est arrivé avec Norbourg, une affaire déjà classée, un scandale qui n’a fait la manchette que dans les milieux financiers et le faible pourcentage du public qui suit quand même l’actualité.

Pour le cinéma québécois, comme souvent mentionnée, une autre approche de la fiction, plutôt branchée depuis de nombreuses années sur les bibittes personnelles des protagonistes, des films nombrilistes qui finissent par lasser. Tout le contraire du format documentaire où les Québécois excellent, témoins complices de leur temps, d’ici et d’ailleurs.

Malgré les liens étroits de la complicité, certaine choses doivent demeurer discrètes.

Une mise en scène principalement axée sur les deux personnages principaux, Vincent Lacroix – François Arnaud vole vraiment la vedette, multipliant les registres, pris entre l’ambition démesurée qui se lie dans son visage, le charisme de la jeunesse, l’attrait physique qui arrange quand même les choses. Du moins, en apparence. En fin de parcours, un changement de ton, une quasi-transformation du portrait physique et faciale que Arnaud défend avec un sens inné du timing et de la circonstance.

D’autre part, Éric Asselin (Vincent Guillaume-Otis, trop bon pour être vrai, indécis, cachant merveilleusement bien son appât du gain (in)facile. Suspendu entre la réalité et celle qu’on se fait. Il a quand même une famille.

Mais si Norbourg est réussi, c’est grâce aussi à la mise en scène hollywoodienne assumée de Giroux (et pourquoi pas, grand bien lui fasse), et bien entendu en raison de l’excellente direction photo de Sara Mishara.

Montréal est transformée à travers sa lentille. Elle ressemble à une grande (très grande ville) de nos voisins du Sud. Tentaculaire, hybride, se mutant au gré des situations. Le moindre espace du centre-ville, les moindres petits passages discrets deviennent des couloirs secrets où se manipulent les affaires.

Malgré leurs faiblesses, les personnages clé sont souvent filmés en contre-plongée, assumant leur pouvoir économique et leur virilité assumée. Car dans cette essai sur la manipulation de l’argent (fraude, achats de voitures de luxe, réceptions incontrôlées), la relation entre l’Homme et l’Argent ressemble à une relation sexuelle où le dominé se laisse conduire par le dominé.

Mais si Norbourg est réussi, c’est grâce aussi à la mise en scène hollywoodienne assumée de Giroux (et pourquoi pas, grand bien lui fasse), et bien entendu en raison de l’excellente direction photo de Sara Mishara.

Laissons le soin aux experts de la finance pour déceler les dérapages économiques de cette affaires ayant fait des victimes quant à leurs investissements.

Deux complices, deux fraudeurs; le premier par choix, le second par les forces du hasard dans une société totalement obsédée par l’argent. Pour Giroux, une occasion en or pour être séduit par la « direction d’acteurs ». Pari réussi dans ce défi de taille. Une anecdote : j’ai vécu il y a longtemps dans l’appartement (espérons que c’est le même étage) où logent temporairement Asselin, sa femme et leur nouveau-né. Sincèrement : ça procure un étrange sentiment.

Et lorsque des petites ou grandes victoires ont lieu Chez Parée, le fameux cabaret, la caméra de Mishara s’écarte le plus loin des danseuses même si l’action a lieu au cours des cinq premières années du nouveau siècle; d’un part, respectant sa vision des femmes, de l’autre, répondant sans doute à Maxime Giroux, conscient de ce qu’une illustration plus lascive aurait pu occasionner chez certains spectateurs (mais surtout spectatrices) d’aujourd’hui.

En attendant, on ne peut que souhaiter que la fiction québécoise se détache des propositions narcissistes pour se concentrer sur le collectif. Gageure accomplie pour Maxime Giroux.

Et pour la petite histoire : Vincent Lacroix s’est construit une nouvelle, apparemment bien tranquille, vie. Québec, endroit idéal pour toutes sortes de réhabilitations!

 

Crédit : Maison 4 :3 / Entract Films

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Maxime Giroux

Scénario
Simon Lavoie

Direction photo
Sara Mishara

Montage
Mathieu Bouchard-Malo

Musique
Philippe Brault

Maxime Giroux – Une façon de posséder son sujet.
Crédit : Maison 4 :3 / Entract Films

Genre(s)
Drame social

Origine(s)
Canada [Québec]

Année : 2022 – Durée : 1 h 59 min

Langue(s)
V.o. : français; s.-t.a.

The Blind Steal

Dist. [ Contact ] @
Maison 4 :3
Entract Films

Classement
Visa GÉNÉRAL

Diffusion @
Cinéma Beaubien
Cineplex

[ Salles VIP : Interdit aux moins de 18 ans ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

The Northman

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 22 avril 2022

SUCCINCTEMENT.
Un prince exilé entreprend de venger son père.

CRITIQUE.

★★★ ½

texte
Luc Chaput

 

De la violence

  des échanges culturels

Des hommes, habillés de peaux de bêtes, s’approchent d’un fortin en bois. Ils émettent des cris gutturaux et des rugissements avant l’assaut. Un d’entre eux retient l’attention et la caméra de Jarin Blaschke le suit dans un long plan-séquence dans son entreprise de destruction des gens de la place. Nous sommes dans une région slave de l’Europe et les drakkars vikings ont auparavant sillonné une rivière.

Le jeune homme très musclé, combattant valeureux dans ce groupe qui pratique le pillage et la capture d’esclaves est Amleth, prince viking autour de l’an 1000. Son père Aurvandill a été assassiné par son oncle Fjölnir dans un épisode qu’adolescent, il a vu horrifié. En fuite, Il a juré de le venger et de sauver sa mère. Le nom du personnage et ses indications font directement référence au Hamlet de Shakespeare. Le dramaturge britannique se serait inspiré directement ou par auteurs interposés des écrits de l’écrivain danois Saxo Grammaticus. Robert Eggers qui nous avait étonné dans The Witch (La sorcière) et fortement intrigué avec The Lighthouse (Le phare) malaxe encore ici des thèmes immémoriaux. L’alphabet runique du temps ouvre le film et sert de signalisation à chaque chapitre.

La recréation par les décorateurs et costumiers sous la direction de Craig Lathrop et Linda Muir est impressionnante et montre bien la richesse inhérente dans les scènes d’intérieur de ses grandes maisons recouvertes de tourbes. Les femmes, par le tissage de textiles colorés et décorés, participent grandement à la vie économique car ces œuvres d’art sont utilisées comme monnaies d’échange. Les relations dans ces communautés sont très hiérarchisées.

D’autant de bruit que de fureur.

Amleth ayant montré sa valeur aurait pu retourner en Scandinavie avec ses compagnons. Il décide de se rendre en Islande où son oncle et sa mère ont été obligés de s’exiler après la perte de leur petit royaume au nord de l’Écosse, semble-t-il. Amleth, dans ce périple risqué puisqu’il feint d’être esclave, rencontre Olga captive venue de cette région dévastée dans la séquence décrite au début. Ses regards s’étaient alors croisés peu avant la destruction par le feu d’une grande maison contenant de nombreuses personnes.

La mise en scène d’Eggers semble rendre hommage directement à un épisode similaire dans Va et Regarde (Idi i smotri) d’Elem Klimov qui se passe plus de 900 ans plus tard dans les mêmes contrées.1

Le combat final nimbé du rouge des volcans et plein de bruit et de fureur nous laisse quelque peu désenchanté car il achève trop directement les circonvolutions épiques de ce drame familial et historique réécrit par Eggers et l’écrivain islandais Sjón.

Les rapports entre Olga et Amleth s’approfondissent de diverses manières.  Le prince exilé a des rapports très complexes avec sa mère Gudrún interprétée avec une glaçante fougue par Nicole Kidman. Les alliés de la vengeance prennent divers aspects dans cette épopée fantastique au cours de laquelle Björk en shamane et Willem Dafoe en fou du roi déchu font des apparitions remarquées. Alexander Skarsgård porte sur ses fortes épaules cette saga alors qu’Anya Taylor-Joy élargit la palette de son jeu de très belle façon en Olga. Le combat final nimbé du rouge des volcans et plein de bruit et de fureur nous laisse quelque peu désenchanté car il achève trop directement les circonvolutions épiques de ce drame familial et historique réécrit par Eggers et l’écrivain islandais Sjón.

1 Un soldat slave porte un casque à pique dont s’inspirera plus tard l’armée soviétique de Trotski durant la guerre civile.

 

 

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Robert Eggers

Scénario
Sjón
Robert Eggers

Direction photo
Jarin Blaschke

Montage
Louise Ford

Musique
Robin Carolan
Sebastian Gainsborough

Genre(s)
Drame mythologique

Origine(s)
États-Unis

Année : 2022 – Durée : 2 h 17 min

Langue(s)
V.o. : anglais / Version française

L’homme du Nord

Dist. [ Contact ] @
Universal Pictures

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

[ Violence ]

Diffusion @
Cineplex

[ Salles VIP : Interdit aux moins de 18 ans ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

The Unbearable Weight of Massive Talent

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 22 avril 2022

SUCCINCTEMENT.
Un acteur invité spécial à un anniversaire se trouve mêlé à une enquête policière.

CRITIQUE.

★★ ½

texte
Luc Chaput

Un étrange coup du sort

Arrivé dans un avion privé sur une île européenne, une star américaine demande à son interlocuteur ce qu’on attend de lui durant ce séjour pendant lequel aura lieu un anniversaire. Il récupère la première bourde qu’il émet en jouant de son image.

Nicolas Cage est un acteur qui joue beaucoup, trop selon certains. Des films de séries C à W parsèment sa filmographie. Il a un certain sens de l’autodérision et des opinions sur beaucoup de sujets exprimées dans de nombreux interviews. La proposition du réalisateur Tom Gormican de jouer des variations de son propre rôle dans une comédie policière l’a assez séduit pour qu’il en devienne un des producteurs.

Le contrecoup d’une complicité préméditée.

La confrontation de son image publique avec la perception qu’en a Javi, un millionnaire super collectionneur d’objets représentatifs donne lieu à des échanges amusants. Leur amitié naissante les amène vers des expériences de dépassement de soi qui auraient pu mal tourner. L’intrigue policière est plutôt générique dans son déroulement et manque de tension car elle s’inscrit dans un répertoire de clins d’œil et d’histoire familiale. L’image de son oncle Francis Ford Coppola aurait d’ailleurs pu être utilisée en rapport avec le cartel en question.

Les choix musicaux qui enrobent le tout produisent un effet de distanciation bienvenue à certains moments. Ainsi, l’air La virgine degli Angeli de l’opéra La forza del destino de Verdi enrobe une mise en scène de duel. La dernière partie se transforme en une course-poursuite avec cascades qui réduisent encore plus l’impact de cette mise en abyme au départ prometteuse. La plupart des autres acteurs servent de faire-valoir à Nicolas. Seul Pedro Pascal (Narcos) en Javi s’en sort avec les honneurs de la guerre.

Les choix musicaux qui enrobent le tout produisent un effet de distanciation bienvenue à certains moments. Ainsi, l’air La virgine degli Angeli de l’opéra La forza del destino de Verdi enrobe une mise en scène de duel.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Tom Gormican

Scénario
Tom Gormican
Kevin Ettan

Direction photo
Nigel Bluck

Montage
Melissa Bretterton

Musique
Mark Isham

Genre(s)
Comédie satirique

Origine(s)
États-Unis

Année : 2022 – Durée : 1 h 47 min

Langue(s)
V.o. : anglais; s.-t.f. / Version française

Un talent en or massif

Dist. [ Contact ] @
Métropole Films

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

[ Violence ]

Diffusion @
Cinéma du Parc
Cineplex

[ Salles VIP : Interdit aux moins de 18 ans ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

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