Si seulement je pouvais hiberner

P R I M E U R
Sortie
Vendredi 20 septembre 2024

RÉSUMÉ SUCCINCT
Ulzii, un adolescent d’un quartier défavorisé d’Oulan-Bator, est déterminé à gagner un concours de sciences pour obtenir une bourse d’étude. Sa mère, illettrée, trouve un emploi à la campagne les abandonnant lui, son frère et sa sœur, en dépit de la dureté de l’hiver. Ulzii doit faire des choix.

 

CRITIQUE
Élie Castiel

★ ★ ★ ½

Innocence

sans protection

Même si on habite à Oulan-Bator, capitale de la Mongolie, les choses ne sont pas simples pour la majorité des habitants. C’est le cas de la famille d’Ulzii, l’aîné, point central de ce premier long métrage réalisé avec une sincérité confondante.

Le but du jeune homme : gagner un concours  national doté d’une importante bourse avec laquelle il pourra s’occuper de sa famille, trois autres frères-sœur et mère monoparentale.

Le récit importe peu, mais des films de ce genre, le cinéma international nous a déjà montré depuis des décennies. On pense aux drames mexicains, aux italiens, espagnols aussi.

Ici, le système de la débrouille est ce qui ressort de la première mise en scène de long métrage de Zoljargal Purevdash ; elle est conquise par son sujet, seule scénariste, optant pour un approche frôlant parfois le documentaire ethnographique, situant la Mongolie dans ces pays friands de modernité, occidentale il va sans dire, même si la captation des images, la splendeur des paysages, la rudesse des hivers, on sent une approche soviétique digne des grands maîtres du cinéma de cette région. Pour des raisons qui nous échappent sur le champ, on pense au magnifique Urga, de Nikita Mikhalkov, où la Mongolie sert de toile de fond.

Vau mieux sourire, malgré tout.

Ce passage entre l’Est et l’Ouest, Purevdash semble le maintenir dans une sorte d’accord à l’amiable qui passe par l’émotion, mais aussi par le catalyseur humain que constitue, où que l’on soit, le droit d’espérer.

Paradoxalement, la cinéaste filme la morosité, la nostalgie et la mélancolie qui en résulte et mine de rien, soumet les personnages à une sorte de confrontation inhabituelle qui résulte en des moments magiques de cinéma. Le dialogue, d’un simplicité voyante, demeure d’une force palpable, évitant les poussées philosophiques excessives, les scènes inutiles.

Dans ce film, le dégel saisonnier prend son temps, mais peu importe puisque les thèmes abordés, les dialogues aussi puissants dans leur limpidité, les anecdotes souvent drôles, cet humour particulier qui en dément, le respect envers les vieilles générations, tout cela contribue à faire de Si seulement je pouvais hiberner, titre on ne peut plus poétique, une des plus belles surprises de la saison internationale 2024. Brillant, intègre.

Si Ulzii est d’une famille défavorisée, il côtoie des élèves de parents nantis. Tout le monde a droit à une éducation – portrait d’une région du monde, néanmoins pas trop développé dans le film. Tous les interprètes, d’un naturel enthousiaste, se prêtent à ce jeu entre être, paraître et parvenir à devenir meilleur.

Dans ce film, le dégel saisonnier prend son temps, mais peu importe puisque les thèmes abordés, les dialogues aussi puissants dans leur limpidité, les anecdotes souvent drôles, cet humour particulier qui en dément, le respect envers les vieilles générations, tout cela contribue à faire de Si seulement je pouvais hiberner, titre on ne peut plus poétique, une des plus belles surprises de la saison internationale 2024. Brillant, intègre.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Zoljargal Purevdash

Scénario : Zoljargal Purevdash
Direction photo : Davaanyam Delgerjargal
Montage : Alexandra Strauss
Musique : Johanni Curtet

Genre(s)
Drame social
Origine(s)
France / Mongolie
Qatar / Suisse
Année : 2022 – Durée : 1 h 38 min
Langue(s)
V.o. : mongolien; s.-t.f.
Baavgai Bolohson

Zoljargal Purevdash

Dist. [ Contact ] @
K-Films Amérique
[ Amygdala Films ]

Diffusion @
Cinéma Beaubien
Cineplex

Classement
Visa GÉNÉRAL

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

The Substance

P R I M E U R
Sortie
Vendredi 20 septembre 2024

RÉSUMÉ SUCCINCT
Une célébrité sur le déclin décide d’utiliser une drogue du marché noir, une substance qui réplique les cellules et crée temporairement une version plus jeune et meilleure d’elle-même.

 

COUP de ❤️
de la semaine

CRITIQUE
Pascal Grenier

★ ★ ★ ★ ★

Body double

Récompensé du Prix du scénario à Cannes en mai dernier, The Substance est LE film sensation de la dernière édition dont tout le monde se tarait d’éloge. Ce drame d’horreur corporelle (communément appelé le body horror) est le second long métrage de la réalisatrice française Coralie Fargeat dont le premier film, Revenge, est une oeuvre marquante dans le genre thriller d’exploitation avec notamment son style visuel unique, son sous-texte féministe et sa manière de réinventer les conventions du genre avec une intensité brute et sanguinolente.

Dans The Substance, Demi Moore, de retour dans un rôle principal, incarne Elisabeth, une vedette d’une émission d’aérobique qui est virée le jour de ses 50 ans par son patron. Démoralisée et blessée, elle se laisse tenter par un mystérieux laboratoire à prendre une « substance » miraculeuse qui, si elle se l’injecte, elle redeviendra la meilleure version d’elle-même ; plus jeune, plus belle et plus parfaite grâce à une modification cellulaire de son ADN.

En faisant écho à de nombreux classiques du body horror tout en évoquant l’angoisse contemporaine de notre obsession pour la jeunesse éternelle tout en offrant une proposition aussi subversive que visionnaire, The Substance surgit comme une monstruosité de celluloïd,  s’érigeant au panthéon des classiques de l’horreur au même titre que The Fly de David Cronenberg.  Sous l’apparente simplicité de son intrigue – une femme et son double amélioré et cette quête désespérée pour défier l’âge et la gravité – se cache un maelström d’excès, de déchéance et de transformation qui met littéralement à nu la chair et l’âme.

Comme une sorte de dialogue existentiellement corporel avec soi-même.

Profondément marquée par une mise en scène jusqu’au-boutiste, la mise en scène déborde d’audace visuelle et narrative. De la première scène à la dernière, on est happé par une esthétique visuellement étourdissante, où chaque image semble être méticuleusement composée pour susciter à la fois le dégoût et l’admiration.

Un opéra visuel étourdissant où vous n’aurez jamais vu où imaginer Demi Moore capable d’une aussi rare intensité dramatique et physique qui la pousse à des extrémités inimaginables. Sa destruction psychologique dans cette double quête de l’immortalité et de la perfection qui s’avère, au final, le catalyseur de sa déchéance. Aux côtés de Moore, Margaret Qualley, dans le rôle de son double Sue, offre une performance magnétique. Le contraste entre ces deux femmes – l’une au crépuscule de sa carrière, l’autre au seuil d’une ascension rapide – incarne avec brio le thème central du film : la lutte inévitable entre le passé et le futur, entre la jeunesse et l’obsolescence.

Le film explore d’abord avec une lenteur hypnotique l’obsession croissante d’Elisabeth pour un traitement expérimental, avant de plonger de façon brutale dans l’horreur corporelle qui s’ensuit. On retrouve ici l’influence du Cronenberg de The Fly : des corps qui se décomposent, se reforment, des chairs qui se fondent et se séparent dans une explosion de viscères. La transformation de Lydia n’est pas simplement une dégradation physique ; elle est aussi une métaphore cinglante de l’angoisse existentielle que nous ressentons tous face au vieillissement.

Si Carrie nous a fait craindre la colère d’une adolescente en quête de justice, si The Fly nous a révélé l’horreur de l’évolution incontrôlée, et si From Beyond nous a ouvert les portes d’un autre monde terrifiant, alors The Substance nous montre que l’horreur la plus terrifiante est celle qui réside en nous : le refus d’accepter le temps qui passe et la folie de vouloir défier l’inéluctable. Qu’on se le dise, un nouveau classique de l’horreur est né et vous n’êtes pas prêt d’oublier de sitôt cette expérience ultra jouissive.

La mise en scène de Fargeat est un chef-d’œuvre d’excès. Là où certains films d’horreur s’arrêtent à la suggestion, The Substance pousse chaque idée jusqu’à ses limites les plus grotesques. La séquence finale où Elisabeth/Sue subit un ultime traitement est un tour de force visuel qui risque de marquer à jamais l’imaginaire du spectateur. Les effets spéciaux, avec ces maquillages pratiques ultra efficaces et saisissants, créent une symphonie d’horreur corporelle inégalée depuis des décennies. La caméra, elle, ne s’éloigne jamais ; elle s’attarde, scrute, explore les moindres détails, nous forçant à confronter la destruction du corps humain avec une fascination morbide.

En fin de compte, The Substance est une œuvre maîtresse qui réussit là où tant d’autres films échouent : elle mélange intelligemment le body horror avec une réflexion profonde sur la condition humaine, tout en offrant un spectacle visuel grandiose et inégalé. Si Carrie nous a fait craindre la colère d’une adolescente en quête de justice, si The Fly nous a révélé l’horreur de l’évolution incontrôlée, et si From Beyond nous a ouvert les portes d’un autre monde terrifiant, alors The Substance nous montre que l’horreur la plus terrifiante est celle qui réside en nous : le refus d’accepter le temps qui passe et la folie de vouloir défier l’inéluctable. Qu’on se le dise, un nouveau classique de l’horreur est né et vous n’êtes pas prêt d’oublier de sitôt cette expérience ultra jouissive.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Coralie Fargeat

Scénario : Coralie Fargeat
Direction photo : Benjamin Kracun
Montage : Jerome Eltabet, Coralie Fargeat, Valentin Féron
Musique : Raffertie

Genre(s)
Drame de genre
Origine(s)
Grande-Bretagne
France / États-Unis
Année : 2024 – Durée : 2 h 20 min
Langue(s)
V.o. : anglais; s.-t.f. & Version française
La substance

Coralie Fargeat

Dist. [ Contact ] @
Film Service Supérieur
[ MUBI ]

Diffusion @
Cinéma du Parc
Cineplex

Classement
Interdit aux moins de 13 ans
[ Violence / Érotisme ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

Singing Back the Buffalo

P R I M E U R
Sortie
Vendredi 13 septembre 2024

RÉSUMÉ SUCCINCT
En attente.

CRITIQUE
Luc Chaput

★★★

 

Retrouver un ami

 

Une masse noire avec de multiples reflets argentés emplit l’écran. Elle ondule au gré du vent ou d’une autre force. Un zoom avant en précise la nature, c’est le pelage d’un bison dans toute sa grandeur et son unicité. Une musique accompagne le titre.

Le bison d’Amérique a compté jusqu’à quinze millions d’individus entre les Territoires du Nord-Ouest au Canada et le Mexique.

L’arrivée du chemin de fer dans la seconde moitié du 19e siècle a amené une campagne d’abatage qui a causé la quasi-extinction de cet animal. Il en restait moins de 300. La cinéaste et universitaire canadienne crie Tasha Hubbard, auparavant autrice du dramatique Nîpawistamâsowin: We Will Stand Up, accompagne ainsi pendant plusieurs années au fil des saisons des initiateurs et des participants au traité entre nations autochtones sur les bisons qui a amené le retour qui a connu plusieurs vicissitudes de ces animaux dans des territoires sous administration des peuples autochtones ou dans des parcs nationaux. Ces travaux de longue haleine ont permis à plusieurs communautés d’Amérindiens des Plaines de retrouver le lien millénaire avec cet animal qui était pour eux source de vie et de mythes.

Toujours aller de l’avant malgré tout.

La cinématographie de George Hupka, par des plans larges, nous introduit à la beauté de ces diverses configurations géographiques, qu’elles soient prairies, vallons, rivières, collines et montagnes plus ou moins escarpées. Dans ces régions, des petits ou plus grands groupes de bisons jeunes ou plus âgés ont retrouvé un endroit pour s’épanouir. Le transfert par camions de certains de ces individus pour repeupler d’autres steppes donne lieu à des séquences où des bruits métalliques soulignent les dédales plus exigus et l’efficacité de ces opérations.

La cinématographie de George Hupka, par des plans larges, nous introduit à la beauté de ces diverses configurations géographiques, qu’elles soient prairies, vallons, rivières, collines et montagnes plus ou moins escarpées.

Les actions et les discours du sage Blackfoot Leroy Little Bear constituent un fil narratif majeur dans ce recommencement dans lequel chants et danses ont aussi leur grande part. Par ces plongées, sources de rencontres prévues ou inopinées, la cinéaste donne ainsi la voix au chapitre à des personnes trop longtemps mis en contrebas de la société.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Tasha Hubbard

Scénario : Tasha Hubbard
Direction photo : George Hupka
Montage : Hans Olson
Musique : Melody McKivor, John McMillan

Genre(s)
Documentaire
Origine(s)
Canada
Année : 2024 – Durée : 1 h 38 min
Langue(s)
V.o. : anglais; s.-t.f.
Le retour du bison

Tasha Hubbard

Dist. [ Contact ] @
Cinema Politica
[ Buffalo Song Productions ]

Diffusion @
Cinémathèque québécoise

Classement
Visa GÉNÉRAL

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

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