Tove

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 02 juillet 2021

SUCCINCTEMENT.
Helsinki, 1945. La fin de la guerre apporte un nouveau sentiment de liberté artistique et sociale au peintre Tove Jansson. Son désir d’indépendance est toutefois mis à dure épreuve lorsqu’elle rencontre la directrice de théâtre Vivica Bandler.

CRITIQUE.

★★★ ½

texte
Élie Castiel

Une façon d’illustrer la vie

            Quelle forme prennent les dessins qu’exécute Tove Jansson, artiste finlandaise, parlant surtout le suédois, critiquée par son propre père, également artiste, mais soutenue, peut-être pas assez, par sa mère, elle aussi faisant partie de la fratrie des créateurs. Une famille pas comme les autres où, normalement, tout devrait bien se passer.

Et il y a aussi la vie, les rencontres, les amours, les relations hétérosexuelles et la découverte des homosexuelles dans un milieu artistique libre où ces choses font partie, en général, d’une certaine bohème et qu’on retrouve aussi dans les lieux secrets de la bourgeoise.

Et pourtant, dans ce décor intérieur, privé, hédoniste jusqu’à un certain point, ce sont des Moumines que dessinent Tove, spécialiste du genre, qui leur a donné leur lettres de noblesse. Qui sont ces créatures ? Une famille composée de trolls proches des hippopotames menant un quotidien qui ressemble à celui des humains. Des parallèles lumineux que plusieurs dans l’entourage de Tove ne semblent pas saisir la signification.

Mais pour une raison bien simple ; il s’agit d’une innovation dans le monde du dessin (bande dessinée) et l’artiste en question, une nouvelle venue, est, par-dessus le marché, une femme donc, inconsciemment, par instinct, selon les mœurs sociales de l’époque, pas très bien accueillie.

1950. Une décennie qui trouve le terrain de toutes les expérimentations.

N’en demeure pas moins que Janssen persiste, assume son genre féminin avec une liberté qui déconcerte plusieurs, tombe amoureuse d’une femme qui lui promet une relation stable mais finit par montrer qu’à l’instar des Hommes de son époque (d’ailleurs, de toutes les époques) peut se permettre plusieurs aventures.

Soulignons qu’avec les Moumines, Tove publiera plusieurs livres pour enfants. Paradoxe avec sa vie privée, plutôt mouvementée. Le succès est planétaire. La réussite s’étend du milieu des années 1940 à celui des années 1950. Une décennie qui trouve le terrain de toutes les expérimentations puisque l’Occident (le monde) sort d’une Deuxième Guerre mondiale et qu’en matière d’art, on tente de retrouver les chefs-d’œuvre perdus ou volés et que l’imagination déborde de fantaisie pour les nouveaux artistes.

Le cinquième long métrage de la Finlandaise Zaida Bergroth, après Last Cowboy Standing / Skavabölen pojat (2009), The Good Son / Hyvä poika (2011), Miami (2017) et Maria’s Paradise / Marian Paratiisi (2019) a ceci de commun avec les précédents qu’il partage le thème de la fantaisie et de l’imagination à l’intérieur de vécus dramatiques. Et surtout que les femmes peuvent s’aimer.

Cinéma féministe ? Pas nécessairement puisque cet héroïne avant-gardiste hésite entre la vie d’artiste et la relation stable avec un homme politique, Atos Wirtanen (méticuleusement campé par Shanti Roney), marié et qui finit par divorcer sans savoir si Tove acceptera une relation.

Encore une fois, Tove aura aussi une relation torride avec Vivica Bandler (Krista Kosonen, étonnante), femme de théâtre, mariage de convenance comme parfois dans les familles bourgeoises, elle plutôt attirée par les femmes, mais infidèle en amour.

Janssen est née en 1914, à l’aube de la Première Guerre mondiale. Quelle incidence dans sa vie ? Appartenir à une société, principalement un Occident ravagé, ne pensant qu’à se reconstruire, souffrant de crises économiques, et pourtant, pour certains, se débrouillant tant bien que mal pour continuer à créer.

Vieilles photos, chansons populaires classiques, situations entre le drame et le mélodrame, déconstruisant le quotidien par le biais de la création, mais dans le même temps quelque chose d’intemporel que Bergroth injecte au film, une sorte de tension à la fois agressive et sereine.

Comme déjà mentionné, son œuvre concrète se prolonge jusqu’à la moitié des années 1940 : fin du deuxième conflit mondial où l’imaginaire de l’artiste doit assumer une nouvelle orientation. Comment rester insensible face à la tragédie humaine ? Mais on voit poindre de loin les années 1960. Une autre vision d’un art qui ne cesse de se reconstruire.

Très bon choix de la partition musicale dans ce film éclairé au sépia, alors que Carlos Gardel, Édith Piaf et autres contemporains projettent leur musique avec un enthousiasme délirant.

Vieilles photos, chansons populaires classiques, situations entre le drame et le mélodrame, déconstruisant le quotidien par le biais de la création, mais dans le même temps quelque chose d’intemporel que Bergroth injecte au film, une sorte de tension à la fois agressive et sereine.

La relation entre Tove (magnifique Alma Pöysti) et Vivica durera toute une vie. Une liaison sincèrement amicale et durable de la part de Vivica, pas plus ; pour l’autre, l’amour que partage un couple pour l’éternité.

 

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Zaida Bergroth

Scénario
Eeva Putro

Sur une idée de Eeva Putro
et Jarno Elonen

Direction photo
Linda Wassberg

Montage
Samu Heikkilä

Musique
Matti Bye

Zaida Bergroth.

Genre(s)
Drame biographique

Origine(s)
Finlande
Suède

Année : 2020 – Durée : 1 h 43 min

Langue(s)
V.o. : finlandais; s.-t.a. ou s.-t.f.

Tove

Dist. [ Contact ] @
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Classement
Tous publics

En salle(s) @
Cinéma du Musée

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]