Winona

P R I M E U R
[ En ligne ]
Sortie
Lundi 13 septembre 2021

SUCCINCTEMENT.
Quatre jeunes femmes se retrouvent sur la plage d’une île grecque. Aucune n’est Winona. Un secret les lie.

| CRITIQUE.

★★★ ½

texte
Élie Castiel

Sirènes

            Quelque courts sujets et ce cinquième long métrage de fiction. De fiction, mais non linéaire, déconstruisant l’horizontalité du récit en lui attribuant une très proche correspondance entre les personnages et la caméra, celle, ici de Simos Sarketzis, prisonnier du terrain sablonneux d’un bord de mer serein, sans vagues, propice aux propos de ces quatre ondines qui, telles des sirènes devenues femmes, racontent ludiquement leurs expériences de vie, parlent de tout et de rien, transformant le dialogue en quelque chose de superficiel et qui, au fond, exprime des vérités, des mystères, élucide des parties de vie cachées, des choses qu’on ne dit pas, sur soi, sur les autres.

Winona, prénom féminin, prend tout son sens. D’origine nord-amérindienne, il signifie « fille première née », une façon comme une autre, pour le cinéaste, à peine quarantenaire, de parler des origines, de la naissance dans son sens large. Ou encore mieux, de proposer un rapport à la durée, notion qui se perd dans la nuit des temps.

Amours imaginaires, tristesses qu’on peut occulter ou oublier, rapports amicaux parfois conflictuels, mais toujours ouverts au dialogue. Et comme par instinct, par envie de revivre un autre âge, des jeux ludiques qui parfois frôlent le contact physique, une homosexualité féminine latente qui se traduit par des paroles à demi-teinte, des légers attouchements, des sourires ou expression des yeux ou du visage que seul le sexe féminin peut se permettre – non, les hommes, eux, hétérosexuels bien entendu, passent plutôt par des actes d’agression, pulsion sexuelle incontournable qui ne dément pas.

De son père, Pandelis Voulgaris (et non pas Pantelis – le n suivi du d, en grec, se prononce d), auteur de films classiques d’une grande beauté plastique. Winona se rapproche le plus de Happy Day (1976), deuxième long métrage de Voulgaris-père, après son magnifique Les fiançailles d’Anna / To proxenio tis Annas (1972) – une journée bien particulière, un grand film sur l’enfermement, le pouvoir tyrannique, et où l’homosexualité masculine, non pas sujet central du film, est pourtant présentée par une simple image où deux prisonniers en évasion se cachent dans l’eau d’une rivière de forêt et réalisent, malgré le danger qui les guette, le rapprochement des corps.

Une sensualité réciproque.

Sarketzis, selon les conseils du jeune cinéaste s’est probablement souvenu du directeur photo Yorgos Panousopoulos (Happy Day) pour faire parler l’image, lui attribuer un rôle actif. Car c’est parfois dans les silences, rares, mais présents, que réside l’importance narrative de Winona. Les quatre actrices, toutes excellentes, ne se privent de rien pour suivre cet anti-récit aussi sensuel que significatif.

De quelle Winona s’agit-il? Se cache-t-elle dans cette maison en haut de cette colline face à la mer? Et qui se trouve dans cette voiture, une jeep pas loin d’où se trouvent les quatre amies? En observant de près, on peut constater que quelqu’un (ou quelqu’une) regarde de loin, de l’intérieur du véhicule, avec des jumelles.

Mais peut-être qu’il s’agit d’Alexandros Voulgaris qui, en toute innocence, ou au contraire, assidûment, consciemment, s’assure que la direction d’actrices est respectée. Et puis, comme tout récit grec qui se respecte, un indice final qui propose une piste de solution, mais seulement une voie, un chemin possible, ouvert à toutes les interprétations.

Soudain, comme par enchantement, Winona, prénom féminin, prend tout son sens. D’origine nord-amérindienne, il signifie « fille première née », une façon comme une autre, pour le cinéaste, à peine quarantenaire, de parler des origines, de la naissance dans son sens large. Ou encore mieux, de proposer un rapport à la durée, notion qui se perd dans la nuit des temps.

Le cinéaste se fait appeler « The Boy ». On évitera de s’en mêler. Une voie cinématographique à suivre.

Alexandros Voulgaris.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Alexandros Voulgaris

Scénario
Alexandros Voulgaris

Direction photo
Simos Sarketzis

Montage
Nikos Pastras

Musique
Miss Trachromi

Alexandros Voulgaris

Genre(s)
Drame

Origine(s)
Grèce

Année :  2019 – Durée : 1 h 27 min

Langue(s)
V.o. : grec; s.-t.a.
Winona

Dist. (Contact) @
[ Under the Milky Way ]

Classement (suggéré)
Interdit aux moins de 13 ans

Diffusion @
VsD
Sur différentes plateformes numériques

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]