15 Years
P R I M E U R
Numérique
[ Regard LGBT ]
SUCCINCTEMENT
Yoav, la quarantaine, est hanté par les démons du passé lorsque sa meilleure amie lui annonce être enceinte, en tant que mère porteuse. Dan, l’amant de Yoav, est, quant à lui, séduit par l’idée d’avoir des enfants.
CRITIQUE.
[ Sphères LGBT ]
texte
Élie Castiel
★★★ ½
Avec son court sujet Soil (2005), tourné aux États-Unis avec des comédiens locaux, l’israélien Yuval Hadadi laissait présager une carrière en terre d’Amérique, aspiration de tous ces nombreux réalisateurs étrangers rêvant de cinéma là où il s’en fait le plus en Occident. Silence public pendant quelques années et un retour inattendu au bercail pour signer un premier long métrage marqué du sceau LGBT. Non pas une première dans la cinématographie israélienne, mais à en voir le résultat, un projet intime, une proposition qui, plus que tout, souligne le constat selon lequel en Israël, l’homosexualité ne peut être vécue ouvertement qu’en répondant à quelques conditions : vivre à Tel Aviv dans un quartier chic, avoir un appartement huppé, un (très) bon boulot, être entouré d’amis sincères qui nous apprécient, de préférence dans les milieux artistique et intellectuel et surtout, avoir une vision moderne et pourquoi pas, avant-gardiste, du reste du monde.
Les désaccords du désir
Les objectifs sont atteints par Yoav (charismatique Oded Leopold) et Dan (émouvant Udi Persi), ou du moins si l’on se fie aux apparences. Leur meilleure amie (tout gai qui se respecte dans ce milieu nanti se doit d’avoir des amies) leur annonce qu’elle est enceinte, en tant que mère porteuse. Tout semble croire que Yoav est le donneur de sperme. D’où une situation dramatique que nous préférons ne pas vous dévoiler d’office.
En revanche, Hadadi signe à gros traits, et c’est bien ainsi, cette nouvelle tendance (quand même pas si nouvelle que ça) d’une partie des personnes du milieu gai de devenir père ou mère – situation sujette à de nombreux débats de société et à des réactions de la droite (et souvent de la gauche) mondiale (et religieuse) totalement acerbes et homophobes.
Un constat significatif dans 15 Years (faisant référence au nombre d’années que le couple Yoav/Dan partage le quotidien), l’absence de religion. Nous sommes donc dans un Israël urbain, totalement occidentalisé, vibrant au rythme des start-ups et de tous les avancements technologiques en matière d’innovation.
Face pourtant à ces progrès sociaux qui ne visent qu’une partie de la société, des problèmes de couple – Yoav, à cause d’une enfance dont on ne retiendra que peu, ne désire pas d’enfants – Dan, pour sa part, en désire, comme de nombreux amis gais de leur entourage.
Dan, si on lit bien les sous-titres, est issu de l’immigration (du moins ses parents) nord-africaine, et plus particulièrement du Maroc. On constatera, à moins que je ne trompe, que le cinéma gai israélien n’a jamais montrés des personnages homosexuels issus des pays orientaux. Courageux détail de la part de Hadadi (sans doute, de par son nom, lui aussi de descendance sépharade). Qu’importe puisque 15 Years est aussi un film sur la mise en scène du drame intime, sur les limites de ce qu’elle doit montrer, sur la faculté des spectateurs à réfléchir sur la question. C’est un film urbain, moderne, pour une classe ouverte d’esprit, offerte à un XXIe siècle qui ne cesse de composer avec les changements qui s’opèrent quotidiennement.
On soulignera la belle direction photo de Yaniv Linton, signant, lui aussi, un premier long métrage où les tonalités de bruns focalisent avec les jours et les nuits d’une Tel Aviv hors du monde, vive, avec une population jeune et une atmosphère hors des conflits qui tyrannisent l’État d’Israël.
Vivre gai, assumer son homosexualité dans une contemporanéité parfois peu commode, sur le qui-vive, dans un pays toujours en conflit avec ses voisins. Et justement, aucun mot sur ce conflit dans le film; comme si cette question politique, faisant partie de l’ADN israélien, se laisser emporter par les tiraillements intérieurs de l’âme. Yuval Hadadi, en un tour de main presque miraculeux, ou encore par un heureux hasard, nous montre sans montrer que somme toute, Israël sera toujours hanté par les démons qui l’habitent. Et ces démons font partie aussi de la vie privée.
On soulignera la belle direction photo de Yaniv Linton (plusieurs courts et moyens sujets, et des documentaires), signant, lui aussi, un premier long métrage où les tonalités de bruns focalisent avec les jours et les nuits d’une Tel Aviv hors du monde, vive, avec une population jeune et une atmosphère hors des conflits qui tyrannisent l’État d’Israël.
FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Yuval Hadadi
Genre(s)
Drame
Origine(s)
Israël
Année : 2019 – Durée : 1 h 29 min
Langue(s)
V.o. : hébreu; s.-t.a.
15 Shana
Hamesh Esreh Shana
Dist. @
[ Breaking Glass Pictures ]
En VOD/DVD @
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Vudu
FandangoNOW
ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]