Swan Song
P R I M E U R
[ Numérique ]
Sortie
Vendredi 13 août 2021
SUCCINCTEMENT.
Pat Pitsenbarger, un flamboyant coiffeur retraité de l’Ohio, apprend que la dernière volonté d’une ancienne cliente était qu’il la coiffe pour ses funérailles. Il entreprend alors un voyage afin de rassembler le matériel nécessaire à cette tâche et va devoir affronter les fantômes de son passé.
CRITIQUE.
[ Sphères LGBT ]
★★★ ½
texte
Élie Castiel
Que choisir entre l’éternité oubliée ou un seul jour mémorable? Chaque membre d’un groupe ou surtout groupuscule social tient à laisser des traces lorsque qu’adviendra le départ définitif. Pour qu’on s’en souvienne d’elle ou de lui, de la bonne ou de la mauvaise façon, mais « merde », qu’on s’en souvienne. Tout simplement.
Todd Stephens a réalisé deux longs métrages LGBT, dont Swan Song est le dernier de la trilogie, celui-ci ressemblant à une petite œuvre-mémoire. Le cinéaste, sans doute la quarantaine, l’âge de toutes les promesses, illusions et propositions en accord avec les temps actuels, Stephens possède un sens aiguisé du regard anthropologique qui le situe dans le domaine de la réappropriation des nouvelles identités. Non seulement s’affirmer, mais faire partie intégrante des vivants.
L’éternité peut-être…
mais probablement un seul jour
Trêve de plaisanteries. Le sujet de Swan Song constitue les derniers moments d’un ancien coiffeur, gai, flamboyant, excentrique, d’une autre époque, d’une ère révolue. Un personnage ayant existé, Pat Pitsenbarger. Et transposer ce personnage à l’écran, c’est, pour Phillipps, prendre des risques, faire un pari autant avec les producteurs qu’avec les spectateurs. Qui serait, aujourd’hui, intéressé par une telle figure excentrique, particulièrement lorsque la société, malgré les revendications et progrès atteints, n’a pas fini avec la culture LGBT.
Swan Song, c’est la poignante juxtaposition Pitsenbarger/Kier, ou comme s’assurer de vivre selon ses propres principes, pour l’éternité ou seulement un jour. Et se rappeler que Jennifer Coolidge et bien entendu, Udo Kier, sont particulièrement extraordinaires.
Mais la stratégie de Phillips est gagnante : le film devient une lumineuse mise en abyme, car il ne s’agit plus de mettre en exergue le personnage-thème, mais de situer Udo Kier, acteur mythique, légende d’un certain cinéma non seulement allemand (Fassbinder et autres), mais tout aussi international. Un visage, un regard, un rendez-vous avec une sexualité non déclarée mais tout autant diffuse, éclatée, ne sentant pas le désir de revendiquer, mais seulement d’être.
C’est dans cette école de pensée que se manifeste Swan Song, un chant du cygne incandescent qui ne jure que par l’instant. La mise en scène de Stephens suit cette démarche avec un sens inné de la cohésion. On n’a jamais vu un personnage marcher autant. La route n’est pas seulement ici un territoire géographique ; cet espace de tous les voyages, de tous les déplacements sans fin devient la métaphore du temps qui passe.
En route, on peut s’arrêter pour siroper un café, s’entretenir avec des vieilles connaissances, bitcher comme il se doit, pour prouver que les années n’ont pas eu raison de qui on est. Une illusion, certes, pour Pat. Mais peu importe… briller avant de partir.
Une transaction financière pour coiffer une personnalité (du parti Républicain) qui vient de mourir et qui voudrait que Pat la coiffe pour son dernier voyage. Cette femme est campée par Linda Evans, de Dynasty, l’incontournable télésérie d’une autre époque.
Pour Stephens, c’est aussi déclarer que la communauté homosexuelle a suivi ces célèbres séries, comme tout le monde, mais en même temps s’appropriant des thèmes enfouis pour créer sa propre culture. Car Swan Song, ce n’est pas seulement une comédie dramatique, c’est surtout prendre conscience d’une culture LGBT présente qui ne peut plus reculer. Certes, comme le film le démontre, nous sommes à Sandusky, dans l’Ohio, lieu de naissance du réalisateur, là où il tourne ses films ; au même titre que John Waters tournait dans son lieu de naissance, Baltimore, au Maryland.
S’approprier son territoire-même, le transformer au gré des nouveaux codes sociaux, quel que soit le prix à payer. Et derrière cela, réaliser que le cinéma est aussi un spectacle qui dépasse le réel, un terrain de folles ou de moins folles expérimentations.
Swan Song, c’est la poignante juxtaposition Pitsenbarger/Kier, ou comme s’assurer de vivre selon ses propres principes, pour l’éternité ou seulement un jour. Et se rappeler que Jennifer Coolidge et bien entendu, Udo Kier, sont particulièrement extraordinaires.
FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Todd Stephens
Scénario
Todd Stephens
Direction photo
Jackson Warner Lewis
Montage
Spencer Schilly
Santiago Figueira W.
Musique
Chris Stephens
Genre(s)
Drame
Origine(s)
États-Unis
Année : 2021– Durée : 1 h 45 min
Langue(s)
V.o. : anglais
Dist. [ Contact ] @
Métropole Films
Classement (suggéré)
Interdit aux moins de 13 ans
Diffusion @
AppleTV – iTunes
& autres plateformes VsD
ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]