Sous un même soleil

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 27 août 2021

SUCCINCTEMENT.
L’effondrement de l’URSS intensifie le vieux conflit entre les populations d’Azerbaïdjan et d’Arménie, chacune des parties revendiquant ses droits.

| CRITIQUE.

★★★★

texte
Élie Castiel

En 2017, dans Sur la lune de Nickel, on ouvrait grand les portes à un documentariste préoccupé par le quotidien des gens qui souffrent ailleurs dans le monde, donnant tout son sens à la notion de « mondialisation culturelle ». Film brillant par sa tenue, sa patience à montrer les maux de la quotidienneté de Norilsk, une petite, pas si petite que ça, localité en Russie.

En 2020, il se dirige vers l’Europe de l’Est et en Asie. Les Arméniens et le peuple azéri l’interpellent. Vieilles querelles de clocher, de territoires conquis, de luttes intestinales, de milliers de morts d’un côté comme de l’autre.

Jacob filme le rituel religieux, notamment celui pratiqué par les Arméniens, qui ressemblent à celui des Grecs orthodoxes, comptant sur la loi Divine pour régler les problèmes, mais exigeant aussi du peuple de participer également à des combats traditionnels pour revendiquer ses terres.

Différences (irré)conciliables

Qui a tort ? Qui a raison ? Toujours est-il que c’est à une proposition sur les effets néfastes des idéologies extrêmes que nous avons droit, une thèse sur les incongruités des différences, un véritable discours sur les moyens que prennent les gens pour obtenir gain de cause et réaliser leurs revendications.

On remarquera que dans la plupart des cas, autant les intervenants interviewés que ceux, peu nombreux, de l’intelligentsia, d’ailleurs mal compris à cause de leurs discours conciliateurs, montrent jusqu’à quel point la lutte, le combat, les attentes, sont de l’ordre émotif plutôt que rationnel.

Sous un même soleil, Peut-être bien qu'il s'agit d'un dialogue de sourds.

Peut-être bien qu’il s’agit d’un dialogue de sourds.

Au cours des 10 à 12 dernières minutes du film, une séquence cruciale oppose trois personnages, deux azéris, dont l’homme est un journaliste indépendant, jeune et très proche de son sujet, et une femme arménienne, personnage important dans cette quête identitaire et territoriale.

Au nom de qui doit-on renoncer à un mode de vie, à une langue ? Peut-on vivre dans les différences, comme dans le passé ? Les hommes de la politique sont-ils vraiment coupables d’empoisonner certains évènements ?

Les considérations économiques ne sont pas vraiment développées, mais force est de souligner l’emphase que François Jacob exerce sur l’Humain. Le documentaire n’est plus une captation d’une certaine réalité, mais surtout, dans le cas qui nous préoccupe, la possibilité, par les images du réel, de reproduire, le temps que dure le tournage, la réalité celle qu’on se l’imagine ou qu’on la voudrait.

Par des mots qui unissent, par d’autres qui séparent. Par des discours parfois confus, par des paradoxes d’un idée à l’autre. D’un côté ou de l’autre.

On revient alors à cette fameuse séquence de la fin. Le journaliste, comme il se doit, provoque, non pas par pur caprice, mais pour développer en termes raisonnés la discussion.

[ … dans cette dernière séquence ] deux générations s’affrontent. Celle qui a vécu et l’autre en devenir d’une possible conciliation, ou du moins espérée. Accommodement, entente, accord ? Probabilité d’un avenir commun ? Ou plutôt lutte constante ? Menaces ?

Anna Astvatsaturian Turcotte est la femme arménienne, de l’autre côté de l’écran, le droit pour être précis femme de lettres, résidente aux États-Unis, née à Baku, en Azerbaïdjan. Durant ce champ/contrechamp impitoyable où les passions s’enchaînent différemment, elle détourne parfois son visage de la caméra, sans regarder en face, comme si l’appareil d’enregistrement constituait une pièce judiciaire compromettante.

Mais dans le même temps, deux générations s’affrontent. Celle qui a vécu et l’autre en devenir d’une possible conciliation, ou du moins espérée. Accommodement, entente, accord ? Probabilité d’un avenir commun ? Ou plutôt lutte constante ? Menaces ?

Il y a, dans ce monde, d’autres territoires aux idéaux communs : Espagne-Catalogne (deux langues que tout sépare), Israël-Palestine (deux langues, deux religions et deux territoires qui s’opposent)… et d’autres lieux du monde qui vivent les mêmes tourmentes.

Les seuls libres des deux côtés, ces admirables chevaux magnifiquement filmés galopant à travers une contrée qui semble sereine et accueillante.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
François Jacob

Scénario
François Jacob

Antoine Dion-Ortega

Direction photo
François Jacob

Montage
Juliette Guérin

Musique
Moses Baxter

Under the Same Sun PosterGenre(s)
Documentaire

Origine(s)
Canada

Année : 2020 – Durée : 1 h 37 min

Langue(s)
V.o. : anglais, arménien, azéri;

s.-t.f. ou s.-t.a.
Under the Same Sun
Nuyn arevi tak
Eyni günəş altında

Dist. [ Contact ] @
Les Films du 3 mars

Classement
Tous publics

En salle(s) @
Cinéma du Musée
Cinéma Moderne

Avis : Horaire irrégulier ]
Cinémathèque québécoise

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]