Guerres
P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 12 novembre 2021
SUCCINCTEMENT.
Pour suivre les traces de son père et remplir le gouffre existentiel qui l’habite, Emma, 20 ans, s’enrole dans l’armée.
Le Film
de la semaine.
CRITIQUE.
★★★★
texte
Élie Castiel
Par ces temps de violences sexuelles commises envers les femmes, le premier long métrage de Nicolas Roy, brillamment réussi, se dresse comme un discours transgressif, voire anti-freudien, repoussant les mécanismes psychologiques, les voyant comme des armes nocives contre ce qui caractérise justement la proposition du film, ou mieux dit, l’approche narrative d’un récit minimaliste qui ne jure que par l’instinct, l’attrait charnel qui ne s’explique pas, qui envahit le cerveau et se sert de notre impuissance face à l’inévitable.
Mais qui, du coup, chez l’Homme – magnifique performance de David La Haye dans le rôle du sergent Richard, personnage présent dans ses silences, sa distanciation, son agressivité vu le titre qu’il habite avec une autorité d’une autre époque – une attirance ambigüe envers une jeune femme qui s’est joint à un camp d’entraînement militaire ; effectivement, un attrait équivoque puisque la jeune recrue, la vingtaine, affiche une corporalité et un comportement plutôt androgyne. Cette dualité de genre le pousse sans doute à explorer quelque chose d’interdit, de s’avouer vaincu devant la possibilité de transgresser.
Mais Nicolas Roy est amplement servi par le scénario de Cynthia Tremblay, d’une richesse d’écriture extraordinaire, scrutant les divers parcours psychologiques des deux principaux protagonistes. Emma, excellente Éléonore Loiselle, droite, vigilante, angoissée, prise entre les tourments de la chair et la déception d’une possible agression. Entre ces pôles d’attraction et de rejet, le doute, l’incertain, la puissance de l’interdit et la rectitude de la dénonciation.
Discordances symétriques
Tremblay et Roy explore ces zones d’ombre avec un soin particulier que seuls les non-dits peuvent rendre crédibles. Visages, corps qui s’emportent, regards acides, d’autres faussement accusateurs qui veulent tout dire.
L’atmosphère dans Guerres est d’une sensualité déchirante, et en même temps corporelle, aqueuse, car elle contient ces fluides sexuels indicibles qu’on n’imagine pas mais qui se font sentir. Les séquences dans la douche sentent le moisi, le sulfureux, cette buée de l’eau chaude qui traverse l’espace.
Le film de Nicolas Roy est une œuvre pure, un premier essai de long métrage qui se situe en dehors de la production québécoise d’ensemble. Un film d’auteur, pour ne pas utiliser ce cliché. Et par la même occasion, un discours sur la sexualité et ses mécanismes de séduction qui, parfois, pour ne pas dire souvent, oscille entre le goût de l’agression, la violence du geste et soudain, comme si le hasard le voulait, une prise en charge émotive, un rapprochement des corps qui soulève le passionnel, l’amoureux pourrait-on ajouter.
Coupable, lui ? Elle peut-être ? Tous les deux ? La caméra rapprochée de Philippe Roy et le montage intentionnellement serré, intrusif, de Nicolas Roy répondent admirablement à cette question. Ils comptent sur l’intelligence des spectateurs pour arriver à ses propres conclusions.
Sexiste ? Ce n’est point mon avis. Plutôt une guerre des sexes, conflit qui se perd dans la nuit des temps. Il ne peut être résolu que par le lien consenti il va sans dire. Ici, ce lien est corrompu ou le paraît du moins. Il revient à Nicolas Roy de jouer avec ces ambivalences, sortes de clairs-obscurs de l’âme
Il y a une fin plongée dans l’incertitude, mais réponse en quelque sorte à ces interrogations. Que s’est-il passé ? Libre aux spectateurs de conclure selon ses propres valeurs, ses idées sur les actes de contrition. Mais le plus important, de réfléchir sur les véritables enjeux de la communion des corps.
Coupable, lui ? Elle peut-être ? Tous les deux ? La caméra rapprochée de Philippe Roy et le montage intentionnellement serré, intrusif, de Nicolas Roy répondent admirablement à cette question. Ils comptent sur l’intelligence des spectateurs pour arriver à ses propres conclusions.
FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Nicolas Roy
Scénario
Cynthia Tremblay
Direction photo
Philippe Roy
Montage
Nicolas Roy
Son
Samuel Carrier
Genre(s)
Drame psychologique
Origine(s)
Canada [Québec]
Année : 2021 – Durée : 1 h 24 min
Langue(s)
V.o. : français
Guerres
Dist. [ Contact ]
Axia Films
Classement
Interdit aux moins de 13 ans
Diffusion @
Cineplex
[ Salles VIP : Interdit aux moins de 18 ans ]
ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]