Hit the Road

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 10 juin 2022

SUCCINCTEMENT.
Iran, de nos jours. Une famille est en route vers une destination secrète. Le père, la mère, l’aîné, déjà adulte, et le jeune. Tous s’inquiètent du chien malade. Seul le grand frère reste silencieux

COUP de ❤️
de la semaine.

CRITIQUE.

★★★★ 

texte
Élie Castiel

Une famille sur la route, quelques rares rencontres qui établissent le lien entre chaque membre du groupe et ces inconnus (en quelque sorte, pour marquer la diversité du peuple iranien), des sautes d’humeur, des réconciliations et, de nouveau, des chicanes de parcours, normal dans tout voyage qu’on effectue en voiture. Et le lieu, Iran indéfini, anodin, loin de la foule, comme si la liberté tant chérie pouvait intervenir le temps de ce parcours vers un inconnu rêvé ou fantasmé.

Fils de Jafar, Panah Panahi revendique un nouveau cinéma national qui, loin de nier ses racines, revendique haut et fort, à l’instar de toutes les nouvelles générations du monde, un cinéma à sa propre image, selon un regard réinventé. C’est toujours la même histoire. Notamment depuis la Nouvelle Vague.

Et chez Panahi-fils, un film qui va de l’avant, quelque chose comme pour se « dire adieu », pour traverser la frontière, quitter un pays dont les dirigeants ne veulent pas que les choses changent. Film à thèse que le jeune cinéaste, dans ce premier long métrage saisissant, manipule avec un sens extraordinaire de la litote, ces gestes, ces paroles qui paraissent simples, sans compromis et qui veulent tout dire. Comme si insister sur les intentions paraissait un acte gratuit.

Des silences entre les adultes et parfois des paroles qui puisent sur des relations tendues entre les personnages, des signes d’amour, d’affection qui alimentent un vécu.

Vers l’ailleurs

Rien de neuf à l’horizon.

La mère (magnifique Pantea Panahita) contrôle ou du moins tente, les situations, se permet des vindictes maternelles; le père (Hassan Majuni, puissant patriarche et pourtant, compte tenu de la situation dans le pays, plutôt ouvert d’esprit – extraordinairement dans son dialogue avec le grand de la famille (Amin Simiar) dignement convaincant dans sa faiblesse émotionnelle, son désarroi, ses regrets peut-être de vouloir aller ailleurs pour se marier, explorant divers registres d’interprétation même si ça ne paraît pas.

Car Hit the Road est tourné comme s’il s’agissait d’un film sur « le rien », sans sujet; simplement le profond désir de faire du cinéma. Pour Panah Panahi, une extraordinaire carte de visite comme offrande à son paternel. Car les références à celui-ci se manifestent tout au long de cet étrange voyage : silences, grands espaces, enfermement, méditation dans une nature invitante qui cache les lourdeurs d’un pays en proie aux mille et une inégalités, pressions sociales et fondamentalisme religieux.

Se mesurer au père, un exercice que Panah évite avec une émouvante sincérité, un simple geste qui nous interpelle : tourner selon ses propres convictions. Se diriger vers l’ailleurs, même si dans cet anti-récit, il ne s’agit que d’un seul personnage. Pouvoir simplement réapprendre à vivre.

Le jeune de la famille, auquel Rayan Sarlak procure une présence sentie, un flair inné, un rapport à la caméra qui ne laisse pas indifférent. Comme les autres, sans nom – le père, la mère, la grand frère et le plus jeune.

Famille anonyme, métaphore on ne pleut plus politique que Panahi-fils assume en toute conscience, reflétant du même coup que le « nouveau » cinéma iranien, même si entamé depuis des décennies, n’a pas cessé de reconstruire son image.

Et puis une belle chanson magnifique. En fait, une magnifique mélopée d’amour que la mère entame en suivant la radio, allumée de temps en temps. Elle parle de nostalgie, de mélancolie, mais dans le regard du cinéaste, de ces choses qui feront partie, peut-être un jour, du royaume des possibles.

Se mesurer au père, un exercice que Panah évite avec une émouvante sincérité, un simple geste qui nous interpelle : tourner selon ses propres convictions. Se diriger vers l’ailleurs, même si dans cet anti-récit, il ne s’agit que d’un seul personnage. Pouvoir simplement réapprendre à vivre.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Panah Panahi

Scénario
Panah Panahi

Direction photo
Amin Jafari

Montage
Amir Etminam
Ashkan Mehri

Musique
Peyman Yazdanian

Panah Panahi.
Suivre un chemin tracé.

Genre(s)
Drame

Origine(s)
Iran

Année : 2021 – Durée : 1 h 34 min

Langue(s)
V.o. : persan; s.-t.a. / s.-t.f.

En route
Jaddeh khaki

Dist. [ Contact ] @
Eye.Steel.Film

Classement
Visa GÉNÉRAL

Diffusion @
Cinéma du Musée
Cinéma du Parc
Cinémathèque québécoise

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]