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Le cas « The French Dispatch »
TRIBUNE LIBRE.
texte
Sylvio Le Blanc
Je suis allé voir le film The French Dispatch – titre curieusement traduit au Québec en French Dispatch du Liberty, Kansas Evening Sun, dont personne ne se souviendra – dans sa version doublée en France. Les merveilleuses voix françaises donnent une plus-value artistique au film original de Wes Anderson.
Certes, les personnages anglo-saxons se mettent tous à parler français, mais ceux qui auraient dû normalement parler cette langue dans la version originale (Timothée Chalamet et Léa Seydoux, notamment) et non l’anglais – l’action se situant quand même en France –, se retrouvent en revanche dans la version doublée à parler leur langue maternelle. Incongruités pour incongruités, je préfère celles générées par la version doublée, car, libérés que nous sommes de l’obligation de lire les sous-titres (qui doivent être interminables, vue l’ampleur du texte parlé), elle nous permet d’apprécier pleinement le jeu multiple des comédiens, la beauté des images – tantôt en couleurs, tantôt en noir et blanc –, des décors et des costumes, sans oublier la virtuosité du montage. Ce qui aurait été désastreux, par contre, c’est que le doublage se fasse au Québec.
Parlant de doublage, j’ai appris récemment la mort de l’un des meilleurs doubleurs du Québec, Vincent Davy, né en France. Il a doublé sur quatre décennies quelque 300 acteurs, dont Anthony Hopkins, Ben Kingsley, Jack Nicholson, Christopher Plummer, Donald Sutherland et Robin Williams. Mais celui qu’il a le mieux doublé, avec sa voix suave, est à mon avis l’élégant Michael Caine.
Non seulement a-t-il été un grand doubleur, mais aussi, semble-t-il, un directeur fort apprécié. L’actrice Violette Chauveau en a témoigné : « J’ai eu pour directeur de doublage Vincent Davy, l’un des meilleurs qui soit. Il a apporté au doublage l’excellence d’un orfèvre. » Un écrivain québécois, Bertrand Bergeron, se sera souvenu de sa divine voix dans une de ses nouvelles rassemblées dans le recueil Ce côté-ci des choses (2014).
Il est triste que pas un seul média n’ait souligné sa disparition.