Cliff Walkers
PRIMEUR
Sortie
Vendredi 30 avril 2021
SUCCINCTEMENT
Lors de l’invasion du nord-est de la Chine par le Japon, en 1931, quatre partisans communistes de retour d’un entraînement en URSS ont pour mission de libérer un prisonnier de l’occupant.
CRITIQUE.
texte
Élie Castiel
★★★ ½
Un Zhang Yimou qui passera sans doute inaperçu, distribué à Montréal par Imtiaz Mastan, le principal pourvoyeur de films Bollywood, présentés en grande partie, sauf très rarement, au Complexe Forum de Cineplex.
Un genre de cinéma indien que la presse locale ignore complètement ; d’une part en raison d’un manque total de projections de presse ; de l’autre, dû à l’indifférence du public québécois pour ce type de productions. Mais ici, il s’agit d’un film chinois de Zhang Yimou. Donc, pas n’importe qui.
Toujours est-il que Cliff Walkers (en français, Marcheurs des falaises, d’abord intitulé Impasse, se présente, en comparaison avec ses films précédents, moins abouti, mais non dépourvu des sophistications habituelles.
Les sept chapitres qui constituent ce récit sont, par leurs titres respectifs, les repères essentiels qui aideront à mieux se retrouver dans un film aussi complexe que furieux et raffiné.
Les espions qui venaient du froid
Dans le générique de fin, avant l’interminable liste des noms impliqués dans la production, un carton dit clairement que le film est « dédié aux nombreux héros de la révolution ». Constatation d’autant plus opportune qu’elle dénote clairement l’idée derrière la tête de Zhang Yimou : faire plaisir au gouvernement, coupable d’avoir censuré, en 2019, pour des raisons qui dépassent la pensée occidentale, One Second (Yi miao zhong), la suite du lumineux Shadow (Ying) que nous avons pu voir ici, proprement distribué.
Toujours est-il qu’avec ce tout dernier opus, le réalisateur de l’excellent Le sorgho rouge (Hong gao lian), qui nous avait révélé un grand cinéaste, aborde le suspense d’espionnage avec un sens extraordinaire de la litote, un minimalisme où les séquences se suivent à un rythme, certes, lent, mais surprenant, par la complexité des situations, ses faux repères, leurs intentions. On est perdu, et on se retrouve. Qui sont les bons ? Qui sont les méchants ?
Les enjeux ne sont pas ceux que l’on devine ou se laissent supposer, mais pervertis par les lois du destin. Et bien plus que cela, par la mise en scène quasi théâtrale de Zhang Yimou, féroce, intentionnellement inerte, même si la violence, souvent montrée, ne laisse rien au hasard. Le réalisme est ici remplacé par une vérité autre, par un jeu qui a à voir avec le cinéma et sa fiction. Avec ce que l’on invente, on imagine, on crée.
Ces héros de la révolution, revenus du froid, plus précisément de l’URSS, communistes avoués, se mêlent contre l’occupant, et plus particulièrement les Chinois collaborant avec l’ennemi nippon ; dans un jeu du (des) chat(s) et de la souris impitoyable. Zhang Yimou n’a pas peur de l’hémoglobine. Ses héros ou (anti)héros saignent, sont agressés avec les sévices les plus violents. C’est peut-être volontaire de sa part, mais peu importe, car le film navigue entre la production grand public sophistiquée et le cinéma d’auteur, propre à la sensibilité du réalisateur qu’il ne cesse d’interroger tout le long du récit.
C’est cet aspect du film qui inspire le plus, notamment ceux et celles qui ont suivi la carrière de cet auteur essentiel. Chez lui, néanmoins, on sent une rage intérieure, ou du moins un souci non avoué à ce qui ressemble au regard qu’il porte sur les jeunes réalisateurs chinois, peut-être dans son esprit, plus « capables » que lui. Arrivé à ses 70 ans, son questionnement est tout à fait légitime. Sur ce point, nous sommes heureux de constater que deux nouvelles productions sortiront dans les prochains mois ou l’an prochain.
Nous ne donnerons pas les détails de l’intrigue car Cliff Walkers se savoure mieux lorsqu’on découvre un récit qui se plaît à paraître tarabiscoté, sans vraiment l’être. On sent parfois le tournage en studio ; et dans une séquence, la salle de cinéma où l’on présente The Gold Rush (La ruée vers l’or), un des chefs-d’œuvre de Charlie Chaplin, on constate que les fauteuils sont les mêmes que dans les salles de cinéma d’aujourd’hui, alors que le récit se passe au début des années 1930. À la rigueur, on peut entretenir des réserves quant à l’utilisation de la musique, certes agréable, mais omniprésente, rendant certains passages chargés.
Nous sommes prêts à oublier ces légères failles tant la stratégie de Zhang Yimou paraît sincère et sans arrière pensée. Finalement, les sept chapitres qui constituent ce récit sont, par leurs titres respectifs, les repères essentiels qui aideront à mieux se retrouver dans un film aussi complexe que furieux et raffiné.
FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Zhang Yimou
Scénario
Quan Yongxian
Direction photo
Zhao Xiaoling
Montage
Li Yongyi
Musique
Cho Young Wuk
Genre(s)
Suspense d’espionnage
Origine(s)
Chine
Année : 2021 – Durée : 2 h
Langue(s)
V.o. : mandarin / s.-t.a. & chinois
Xuan ya zhi shang
Impasse
Dist. [ Contact ] @
Imtiaz Mastan
Classement
Interdit aux moins de 13 ans
[ Violence ]
En salle(s) @
Cineplex
ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]