Gaia

P R I M E U R
Sortie
Vendredi 18 juin 2021

SUCCINCTEMENT.
Une garde forestière blessée lors d’une mission de routine est sauvée par deux survivalistes menant un mode de vie postapocalyptique.

LE FILM
   |de la semaine

CRITIQUE.

★★★★

texte
Élie Castiel

En ce qui nous concerne, une première incursion dans le cinéma du sud-africain Jaco Bouwer, à qui l’on doit plusieurs épisodes de téléséries et un premier long métrage en 2014, Balbesit: ‘n Studie in Stemme, adaptation d’une pièce de la dramaturge Saatjie Botha. Expérience sensorielle percutante qui surprend, ravive notre énergie et plus que tout, change viscéralement notre regard.

Un début qui filme la forêt en vol d’oiseau se mouvant lentement, s’approchant de la terre comme si celle-ci voulait s’y intégrer. Superbe correspondance avec le titre du film, Gaia, mot grec, Gaïa, qui représente dans la Grèce antique, la divinité de la Terre. Car c’est elle le sujet principal du film. En fait, soyons plus précis, ce n’est pas de la Terre, dans son ensemble, mais de la forêt, un endroit perdu, loin de la vie civile, qui semble abriter des forces inconnues qui n’ont aucun rapport avec la réalité.

La turbulence

    des fluides

Mais un rapport avec le scénario de Tertius Kapp; une écriture démentielle probablement inspirée par une importante remise en question de l’existence et de notre civilisation. Pour la mise en scène, un cinéaste dont l’enthousiasme dans l’acte de tourner est une seconde, pour ne pas dire, une première nature. Qu’importe le récit, pris sans doute par la quantité de films d’horreur et d’épouvante qu’il a pu voir dans sa vie. Créer un univers, le soumettre à une vision du monde qui dépasse notre sensibilité et surtout compter sur un directeur photo brillant, Jorrie van der Walt. Ici, entretenant une relation avec l’espace naturel une sorte de relation incestueuse, comme si la caméra caressait tous les recoins cachés de cette multitude terrestre au service, justement, de la déesse grecque, à laquelle fera référence un des personnages du film. On ne dévoilera pas qui est qui dans ce film car c’est dévoiler les secrets auxquels le spectateur s’attend.

Il y a une garde forestière, c’est déjà trop dire, et deux personnages perdus dans la forêt, un homme et son fils, qui vouent une adoration à cette divinité qui ne se présente jamais, mais agit sur les gens, les transformant en quelque chose d’indéfinissable, le corps humain, mais la peau remplacée par ce que la Terre crée dans son état sauvage. Et ceux frappés par cette nouvelle humanité sont aveugles. Belle stratégie pour que les possibles victimes de ce récit apocalyptique puissent y échapper.

La finale, magnifiquement filmée, ouvre sans doute grand les portes vers une possible libération, personnelle, collective et pourquoi pas, intérieurement mystique. Mais nous en avons assez dit.

Un émerveillement glauque, agressif, sordide, lugubre même.

Mais Gaia, c’est aussi un film sur le son, les bruits, les éclats, les agitations, les tremblements, tout ce qui vit selon les propres termes de l’état naturel. La Nature, effectivement, dans toute sa splendeur, son côté spectaculaire, mais un émerveillement glauque, agressif, sordide, lugubre même. Les responsables du son (voir Générique) ont accompli un travail remarquable, les sonorités devenant concrètement insupportables, s’alliant de façon obsessionnelle à la musique de Jorrie van der Walt.

Quelques incidents de parcours, l’aide apportée par les deux habitants de la forêt et un récit volontairement alambiqué qui dépasse les frontières de l’entendement. Mieux encore, le film est un avant tout une épreuve pour nos yeux, mais aussi pour l’ouïe, car tout participe à ce que nos organes se trouvent métaphoriquement affectés.

Sans doute que les spécialistes du genre trouveront d’autre aspects philosophiques, politiques sans aucun doute, et des sous-entendus entre la technologie qui assaille notre monde et la perte soudaine et inattendue de toute pensée philosophique, voire spirituelle.

Même l’eau, dans cette nature agitée, est un fluide menaçant en dépit de sa luminosité et sa (fausse) énergie purificatrice. Cet élément prend ici des proportions narratives insoupçonnables.

La finale, magnifiquement filmée, ouvre sans doute grand les portes vers une possible libération, personnelle, collective et pourquoi pas, intérieurement mystique. Mais nous en avons assez dit.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Jaco Bouwer

Scénario
Tertius Kapp

Direction photo
Jorrie van der Walt

Montage
Leon Visser

Musique
Pierre-Henri Wicomb

Jaco Brouwer.
@ ScreenAfrica.com

Genre(s)
Drame d’épouvante

Origine(s)
Afrique du Sud

Année : 2021 – Durée : 1 h 36 min

Langue(s)
V.o. : anglais, afrikaans; s.-t.a.

Gaia

Dist. [ Contact ] @
Entract Films

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

[ Horreur ]

En salle(s) @
Cinéma du Parc

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]