Godard, seul le cinéma

 PRIMEUR
Sortie
Vendredi 15 décembre 2023

RÉSUMÉ SUCCINCT.
Archives, extraits de films et interviews avec plusieurs personnalités qui prennent la parole pour rendre hommage à Jean-Luc Godard, emblème de la Nouvelle Vague.

 

CRITIQUE
Élie Castiel

★★★★

Le

mythe…

connaît pas!

 

Qu’apprend-on de plus que ce que l’on sait déjà du chef de file de la Nouvelle Vague si ce n’est que le documentaire de Cyril Leuthy (plusieurs documentaires sur des personnages iconiques, dont Maurice Chevalier, Jean-Pierre Melville et Barbara), par le choix des témoignages, des extraits succincts de films-clé et des documents d’archives, dont plusieurs marquant la présence du cinéaste, s’exprimant en une sorte de confession ouverte, conscient ou pas de sa vulnérabilité en tant qu’Homme dont il ne défend pas ce côté mythique qu’on lui a attribué, est un nouvel apport au cinéma godardien.

Très souvent, d’ailleurs, il renoncera à cette adulation, préférant que les spectateurs saisissent les véritables intentions derrière chaque proposition. Mais plus que tout, comprendre cet acharnement aussi exaltant que furieux de se lancer dans cette aventure que constituent les images en mouvement.

Et puis, à l’intérieur de cette balise, comprendre que les idées sur la vie, sur le monde, la politique, l’économie et les rapports hommes-femmes sont traduits sans équivoque, directement ou pas, dans chaque film.

Une distanciation quasi hermétique.

Il n’est pas surprenant que le film débute par l’incontournable Le mépris, là où le roman d’Alberto Moravia subit une nouvelle lecture et la présence de Brigitte Bardot demeure à elle-seule une relecture de l’érotisme au cinéma – force est de se questionner sur comment réagiraient les femmes d’aujourd’hui face aux révélations de l’actrice dans le film, il y a soixante ans. Mais bon, c’est là un autre domaine de discussion.

Parmi les personnalités choisies, Antoine de Baecque, Thierry Jousse, Marina Vlady, Macha Méril, Hanna Schygulla, Dominique Païni, Romain Goupil, Daniel Cohn-Bendit… qui révèlent autant qu’ils analysent leur discours.

JLG ou le cinéma-pérenne, justement parce qu’aux dernières étapes de la vie professionnelle du cinéaste, seul le cinéma ose parler, sans se soucier d’une quelconque intrigue, de cette accumulation d’apparats stratégiques (Bardot pour Le mépris, Anna Karina pour Vivre sa vie et pourquoi pas, Vlady pour 2 ou 3 choses que je sais d’elle ou encore la Méril dans Une femme mariée. Pour celles et ceux qui ont connu cette époque, des films tous classifiés « interdit aux moins de 18 ans »; important de le mentionner puisque par cette catégorie d’âge, on assistait d’office à une vision mûre du cinéma où tout devait être analysé selon un cerveau adulte déjà, pour l’époque, plus développé. Venant de Godard, une complicité étanche avec les spectateurs.

En fin de compte, n’avons-nous pas trahi Jean-Luc Godard? Lui, qui ne voulait pas de ce mythe engendré autant par son cinéma que par sa personnalité, se retrouve en fin de compte prisonnier de cet honneur. Pour notre plus grand bonheur.

Les quelques dernières minutes de ce bel exemple de portrait documentaire constituent la proposition-même, stimulante et notamment engagée de Cyril Leuthy. Montrant, dans une série de plans qui se suivent à une vitesse hallucinante, que le cinéma de JLG est avant tout un art du montage, une série de morceaux de pellicule se succédant comme des clichés photographiques en mouvement, des jump cuts  (en français, un terme moins subtil, coupes sautées) qui établissent la durée dans une temporalité fugitive.

En fin de compte, n’avons-nous pas trahi Jean-Luc Godard? Lui, qui ne voulait pas de ce mythe engendré autant par son cinéma que par sa personnalité, se retrouve en fin de compte prisonnier de cet honneur. Pour notre plus grand bonheur

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation

Cyril Leuthy

Scénario
Cyril Leuthy
Direction photo
Gertrude Baillot

Thomas Dappelo
Montage
Philippe Baillon
Cyril Leuthy
Musique
Thomas Dappelo

Cyril Leuthy

Genre
Documentaire

Origine
France

Année : 2022 – Durée : 1 h 40 min

Langue
V.o. : français; s.-t.a.

Godard Cinema

Dist. [ Contact ] @
Kino Lorber
[ 10.7 Productions ]

Diffusion @
Cinéma du Musée

Classement (suggéré)
Visa GÉNÉRAL

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]