Hedwig et le pouce en furie

CRITIQUE.
[ Scène ]

★★★★

Comme une ville

     coupée en deux

texte
Élie Castiel

C’est dans le dernier acte que le personnage créé à l’origine par John Cameron Mitchell (pour le texte) et Stephen Trask (pour les paroles et la musique) dévoile sa véritable identité. La légende, le mythe, disparaît pour redonner à la vie son droit de cité. C’est peut-être là une façon de voir les choses.

À l’origine, elle est Drag Queen, Juive – caractéristique qui n’est pas si évidente dans le spectacle version-québécoise – son mari, Yitzhak (excellente et diablement versatile Elisabeth Gauthier Pelletier) accepte tous les déboires d’une relation amoureuse entre la dépendance et le déni. Au tout début, Yitzhak, Drag King, annonce le spectacle en tutoyant « le » spectateur, comme si le présentateur s’adressait à un ami pour lui annoncer ce qui va suivre. Bonne stratégie de mise en scène de la part de René Richard Cyr, pour la circonstance, maître en ce domaine.

Derrière eux, quatre musiciens qui manipulent ludiquement guitare, batterie (trop bruyante par contre, ne permettant pas de saisir certaines paroles), clavier et basse. Parmi elle et eux, Andre Papanicolaou à la direction musicale et guitariste s’en donnent à cœur joie.

Une façon comme une autre d’exister.
Crédit : Sébastien Jetté

Hedwig se présente et raconte ses origines, de la petite enfance à aujourd’hui. Saga existentielle, aventures de jeunesse, premiers émois amoureux où le sexe en cachette se libère au même temps que les changements sociaux. Il y a l’Est et l’Ouest. Soudain, en 1989, le Mur de Berlin tombe. Tout cela est évacué, intentionnellement, en un tour de main. Exactement, 90 minutes pour raconter les récits éclatés d’une vie . À l’écart parfois, dans le quotidien, sous les feux de la rampe qu’on s’invente la nuit.

Plusieurs chansons, adaptées en français et Dolly Parton est évoquée dans un numéro country époustouflant qui conquiert la salle (et certains critiques comme le signataire de ces lignes ), le hard rock fait également partie du répertoire. Et des chansons tendres alors que dans une d’elles, Hedwig (encore une fois, fascinant Benoît McGinnis) nous dit que la vie est « comme une ville coupée en deux ».

Le spectacle, volontairement quétaine, kitch version-Almodóvar des premiers temps, est d’une liberté de ton et d’exécution lapidaire. Mais, en fin de compte, manier avec un amour incommensurable de l’art dramatique musical. Autant pour celui dans les coulisses que pour ceux sur scène.

Effectivement, un espace social, un espace privé, un terrain de tous les possibles imaginés. Entre le masculin et le féminin, entre la virilité et la sensibilité, entre le Elle et le Lui. René Richard Cyr, tout à fait conscient de « ses » époques, et plus particulièrement la présente, déconstruit la dynamique sociale en lui administrant de nouvelles réalités. Il s’engage de tous côtés. La scène du Studio TD est conquise et le metteur en scène lui administre des doses de charges à haute tension. C’est électrique, spontané, ludique, queer jusqu’au bout des ongles.

Le spectacle, volontairement quétaine, kitch version-Almodóvar des premiers temps, est d’une liberté de ton et d’exécution lapidaire. Mais, en fin de compte, manier avec un amour incommensurable de l’art dramatique musical. Autant pour celui dans les coulisses que pour ceux sur scène.

ÉQUIPE PARTIELLE DE CRÉATION
Texte
John Cameron Mitchell

Paroles et musique
Stephen Trask

Traduction
René Richard Cyr
Avec la collaboration de Benoît McGinnis
D’après Hedwig and the Angry Inch

Mise en scène
René Richard Cyr

Assisté de Benoit Rioux

Interprètes
Benoît McGinnis (Hedwig)

Elizabeth Gauthier Pelletier (Yitzhak)

Décor
Max-Otto Fauteux

Costumes
Sylvain Genois

Éclairages
Renaud Pettigrew
Perruques
Rachel Tremblay

 

Vidéo
Marcella Grimaux

Direction musicale
Andre Papanicolaou

Musiciens
Andre Papanicolaou
Amélie Mandeville
Marc Chartrain
Guillaume Lecompte

Production
La maison fauve

Durée
1 h 30 min

[ Sans entracte ]

Diffusion & Billets
@ Studio TD

Jusqu’au 4 février 2023

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]