Jane Birkin
< 1946-2023 >

Jane B. – Hier

 

Jane B. – Plus récemment

In Memoriam

texte
Élie Castiel

 

Je t’aime

nous aussi

 

Avec Jane par Charlotte, Charlotte G. offrait-elle un dernier cadeau à sa mère par le biais des images en mouvement? Une sorte de correspondance, de reflet-miroir, de face-à-face et dans le même temps de regard filial d’un départ annoncé, quel que soit le temps qu’il reste. Pour une raison qui m’échappe, à l’annonce de son décès, comme ça, par hasard, je pense à un film mineur d’André Cayatte, Les chemins de Katmandou, où il réunissait, non pas par hasard, des vedettes de cette fin des années 60, plus précisément, 1969, Birkin, bien entendu, Serge Gainsbourg, Pascal Audret et Elsa Martinelli, sorte de Audrey Hepburn italienne de cet âge d’or du cinéma transalpin.

Les chemins de Katmandou

Dans le même souffle, le début d’une histoire d’amour fragmentée entre deux futures icônes de l’intelligentsia pop. L’éclosion du futur Gainsbarre et l’histoire d’amour entre Jane Birkin et l’Hexagone.

Bien entendu, comment ne pas citer Je t’aime… moi non plus, la chanson-tube mondiale et le film éponyme que Gainsbourg tournera en 1975 avec sa muse, comme il se doit, et un Joe Dallesandro, plus gai qu’hétéro. Un film mineur, certes, mais belle peinture d’un certain milieu de l’époque. Jane est plus androgyne que jamais. Gainsbourg n’ose pas aller aussi loin, déjouant les genres avec une prudence presque enfantine.

Pourquoi ce détour pour parler de la mort de Birkin? Pour la simple raison qu’un hommage n’est une liste de films ou de chansons que l’artiste a enregistrés, mais au contraire, la situer à l’intérieur d’une époque.

« Je t’aime… moi non plus »
Pochette 45′

Côté-actrice, Jane Birkin n’a jamais imposé sa présence par le jeu, mais par son physique particulier, son visage bi-genré, sa démarche ambivalente, son je-m’en-foutisme légendaire sans doute hérité de son gourou, qu’un critique de cinéma français, dans une critique d’un de ses film, que je ne citerai pas, a considéré comme le « chantre invétéré de l’ère poubellienne ». Mais dans le sens positif, du moins celui perpétuant une idée du monde branché de l’époque.

Jane Birkin, c’est chanter « sans chanter », parler à la cadence d’un air de musique, poétisant des phrases et des idées gainsbourgiennes sur un ton bien précis, gesticuler les moments, s’adresser au public selon un jeu de scène totalement maîtrisé. Et mine de rien, on y adhère, parce que, soudain, on réalise que la « perfection n’est pas français ».

Je t’aime… moi non plus.
Le film.

C’est bien cela, Jane Birkin, et avec son départ qui nous a surpris, sauf celles et ceux qui savaient déjà qu’elle souffrait depuis quelque temps, c’est une époque qui disparaît et avec elle, comme c’est le cas lors du départ de la majorité des artistes, un peu de nous-mêmes qui s’en va.

Si à son décès, en 1991, Gainsbourg annonce un nouveau siècle imprécis, pluraliste, exigeant, totalement différent du sien, Birkin, elle, souligne avec véhémence son implication à un 21e qui l’a tout de même accueillie à cœur ouvert.