Moi, dans les ruines rouges du siècle
@ Duceppe

CRITIQUE
| S C È N E |
Élie Castiel

★★★ ½

Confessions d’un

enfant de son temps

                 Le texte d’Olivier Kemeid, ancien grand manitou du Quat’Sous, haut lieu des productions conceptuelles triées sur le volet, signe ici un drame humain qui se transmet à travers des décennies dans des formes à la fois tragiques et, comme dans la vie, comiques ou du moins, sereines.

Pour Sasha, interprété par Sasha Samar, qui joue son propre rôle, une sorte de mise en abyme théâtrale qui, malgré certaines apparences, projette l’odyssée d’un jeune homme du siècle, de son enfance dans une Ukraine soviétique… jusqu’à sa montréalité assumée, choisie pour une raison bien simple, le hockeyeur Guy Lafleur qui l’a poussé, allez savoir pourquoi, à faire du théâtre.

Cette anecdote on ne peut plus populaire gratte les points sensibles du grand public et aucun doute que l’esprit éditoriale de Kemeid, avec l’aide de Samar, bien sûr, y est pour quelque chose dans l’élaboration des situations et des évènements dans cette pièce dont la scénographie de Romain Fabre, subtile, sans trop de trucs inutiles, demeure aussi froide (comme ces temps du communisme) que douillette et sincère dans l’intimité du foyer.

Kemeid, dans sa mise en situations, procède par anecdotes, riches en variations, en propos directs ou évanescents. La peur, le courage, l’amour filial, l’amour du couple, la séparation, le travail à la chaîne dans une Union soviétique faussement libre des perversités culturelles et économiques des pays occidentaux et notamment d’une Amérique dominante. Et pourtant, dans ce même vaste pays…

Une idée bien précise de l’imaginaire de l’enfance.

Il y a, dans l’interprétation de tous les comédiens et comédiennes, beaucoup plus d’authenticité que de perfectionnement dans le jeu, hormis celui du Belge Geoffrey Gaquère interprétant un Lénine théâtral hallucinant – il vole la vedette carrément, et revêt un Youri Gagarine, qui ne dure que quelques minutes, plutôt circassien.

Idem pour Sophie Cadieux,  situant, à un moment, la charmante Nadia Comăneci, jeune fille olympique de bonne mémoire, dans une Roumanie, bien que non mentionné ici, dominée en ce qui a trait au cinéma populaire, par une Elisabeta Bostan plus que dévouée, et avait signé un film sur la jeune championne.

Il est certain que les évènements récents en Ukraine sauront avantager l’intérêt des spectateurs, bien que Moi, dans les ruines rouges du siècle a déjà été présentée en 2012, au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, avec le passage du temps, comme annonciatrice des temps à venir.

Déjà, le titre de la pièce est la bouleversante affirmation d’une vie trépidante teintée de changements politiques majeurs, de quêtes identitaires à travers les différents âges de la vie, jusqu’à finalement, atteindre une maturité enviée et incontournablement pérenne.

Sur ce point, la version-DUCEPPE s’inscrit dans une perspective de réhabilitation, plus encore, d’immutabilité de la mémoire dans un monde actuel qui a tendance, malgré les nombreuses factions effrayantes, à oublier, comme si rien ne se passait dans un monde qui ne sait pas où il va.

Déjà, le titre de la pièce est la bouleversante affirmation d’une vie trépidante teintée de changements politiques majeurs, de quêtes identitaires à travers les différents âges de la vie, jusqu’à finalement, atteindre une maturité enviée et incontournablement pérenne.

C’est dans une optique intellectuellement rigoureuse qu’il faut lire le texte et la mise en scène de Kemeid, même si, concrètement, sur l’horizontalité de l’espace scénique, elle n’endosse pas entièrement sa proposition.

Moi, dans les ruines
rouges du siècle
Comédie dramatique

FICHE ARTISTIQUE PARTIELLE
Texte
Olivier Kemeid

Mise en scène
Olivier Kemeid

Assistance à la mise en scène
Stéphanie Capistran-Lalonde

Interprètes
Sasha Samar (Sasha)

Sophie Cadieux (Ludmila, Nadia Comăneci), Geoffrey Gaquère (Anton)
Marie-France Lambert (Galina), Jean Maheux (Vassili)
Peter Meltev (Youri Gagarine, Vladimir, un étudiant)
Aliona Munteanu (Anna, la fausse femme, une étudiante)

Scénographie & Costumes
Romain Fabre

Éclairages
Martin Labrecque

Musique
Philippe Brault

Durée
1 h 59 min
[ Sans entracte ]
Public
Tout public

Diffusion & Billets @
Duceppe
Jusqu’au 30 mars 2024

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]