Niagara

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 16 septembre 2022

SUCCINCTEMENT.
À la suite du décès prématuré de leur père, dû à un malheureux Ice Bucket Challenge (défi de seau à glace), trois frères cinquantenaires doivent reprendre contact.

CRITIQUE.

★★★★

texte
Élie Castiel

Le

trio

 sidéral

Déjà, dans Les scènes fortuites (2018), son premier long métrage, Guillaume Lambert établissait une proposition selon laquelle le quotidien et sa banalité était à proscrire, inventant un univers quasi parallèle, proche de son imaginaire éclaté. C’est ce qui caractérise sans doute le jeune cinéaste, à peine 38 ans, et son ADN cinématographique.

Entre le réel réinventé et une certaine idée du surréalisme débridé, un univers qu’on invente pour se faire plaisir, pour faire plaisir aux autres et plus que tout, apporter à la narration une nouvelle dimension. Tout bien considéré, Lambert mérite une plus grande attention dans le milieu compétitif du long métrage québécois qui, tout comme le milieu de la critique, est un terrain où les clans s’assemblent et se ressemblent et si on a la mauvaise chance de ne pas faire partie de l’un d’eux, la réussite est une question de pur hasard.

Mais en réunissant trois gros canons de la culture québécoise, toutes tendances confondues (cinéma, scène, télévision), il s’assure du bien fondé de son entreprise. Un récit hors du commun, sur une idée de base plutôt banale, la mort accidentelle du patriarche (toujours aussi solide Marcel Sabourin) due à un Ice Bucket Challenge, mémorable, il va sans dire.

Les funérailles, dont on vous prive des détails, autre séquence mémorable, valide justement la thèse de Lambert, tenant de l’insoutenable légèreté de l’existence. En fait, peut-être bien que nous sommes tous dans la lune, perdus dans nos pensées, individualistes.

Faut-il se prendre au sérieux?

François Pérusse a une sacré présence à l’écran. Son expérience d’humoriste, de manipulateur vocal, de pince-sans-rire méticuleux le rend incroyablement charismatique. Il manipule le geste, invente ses propres paroles, surmonte les difficultés avec une agilité déconcertante. Et lorsque les scènes créées par Guillaume Lambert deviennent dramatiques, il en devient conscient et change radicalement de registre. Instinctivement.

Ses acolytes, autant Éric Bernier (Léo-Louis) que Guy Jodoin (Victor-Hugo) le rejoignent dans ce voyage insolite, où la douleur d’avoir perdu le paternel s’immisce comme par magie dans le triomphe d’un quotidien inusité.

Car Niagara, au titre emblématique, correspondance entre les fameuses chutes et les raisons du décès du paternel, sans doute un peu trop poussé par Lambert, correspond sans doute aux effets du hasard, des coïncidences et des rapports entre la vie et la finitude. Entre les deux extrêmes, semble dire le réalisateur, l’étrange rapprochement entre le comique et le drame, d’où un road-movie qui se crée au cours duquel apparaissent des hommes et des femmes remarquables dans leur originalité quelle que soient leurs classes sociales, leurs histoires, leurs conneries ou leur humanité.

Tout compte fait, Niagara est surtout un film d’acteurs. Et ceux-ci sont privilégiés d’être sous la houlette d’un extraordinaire metteur en scène. Guillaume Lambert persiste et signe avec une retentissante et vibrante ténacité

Les personnages du jeune cinéaste-comédien semblent neutres, refusant la psychologie ajustée, préférant non pas la marginalité, mais une sorte de relâchement face à la droiture, une envie viscérale de s’abandonner. Guillaume Lambert se donne un rôle, celui de Tommy. Il s’exprime peu, sauf à un moment où l’émotion le rend perméable, l’une des plus belles séquences du film où la parole prend le dessus sur l’action. Et quel plaisir de revoir Elizabeth Chouvalidzé, toujours aussi brillante.

Tout compte fait, Niagara est surtout un film d’acteurs. Et ceux-ci sont privilégiés d’être sous la houlette d’un extraordinaire metteur en scène. Guillaume Lambert persiste et signe avec une retentissante et vibrante ténacité

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Guillaume Lambert

Scénario
Guillaume Lambert

Direction photo
Marie Davignon

Montage
Yvann Thibodeau

Musique
Diverses pièces du répertoire populaire
Musique additionnelle : Raphael Reed

Guillaume Lambert, acteur-réalisateur
Une tentative de dédramatiser l’irréversible.

Genre(s)
Comédie dramatique

Origine(s)
Canada [Québec]

Année : 2021 – Durée : 1 h 41 min

Langue(s)
V.o. : français; s.-t.a.

Niagara

Dist. [ Contact ] @
Entract Films

Classement
Visa GÉNÉRAL

Diffusion @
Cinéma Beaubien
Cineplex

[ Salles VIP : Interdit aux moins de 18 ans ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]