Portrait de la jeune fille en feu

PRIMEUR
Sortie
Vendredi 14 février 2020

SUCCINCTEMENT
Au XVIIIe siècle, en France, Marianne est engagée par une comtesse pour réaliser un portrait de sa fille à l’occasion de ses fiançailles. Cependant, la jeune Héloïse ne désire pas se marier, et refuse donc de poser pour une œuvre promise à son futur époux.

INCONTOURNABLE
de la semaine

Luc Chaput

★ ★ ★ ★

Dans la noirceur de la nuit des femmes de tous âges se rencontrent dans une clairière et parlent à voix basse. Autour d’un feu, les corps défilent et deux puis trois entonnent un chant a cappella à la langue et aux sonorités incertaines. Son message est joyeusement décidé. Des regards se croisent et une jeune femme voit le bas de sa longue robe attaqué par les flammes. Elle est rapidement sauvée.

Une peintre, par relations familiales, est embauchée par une famille noble dans un manoir excentré breton pour faire le portrait de la jeune femme qu’attend au loin le fiancé de ce mariage arrangé. Cette figure de l’histoire de l’art a été entre autres visitée par Hans Holbein le jeune pour Anne de Clèves, future épouse d’Henri VIII d’Angleterre. Céline Sciamma nous fait découvrir les lieux près d’une falaise en bord de mer à travers le regard de l’artiste interprétée avec détermination par Noémie Merlant. Considéré comme une employée, elle est reçue aux cuisines par la servante Sophie à laquelle Luàna Bajrami, découverte récemment dans Fête de famille, donne une profondeur insoupçonnée. Marianne la traitera bientôt d’une manière de plus en plus égalitaire. Les hommes semblent absents de ces lieux auxquels la directrice photo Claire Mathon donne aux intérieurs un aspect inspiré de la peinture flamande.

Du regard amoureux

dans l’histoire de l’art

Le scénario de Sciamma multiplie les contraintes qu’elle s’amuse en tant que réalisatrice à contourner. Du dessin à main levée du début, aux nombreuses esquisses qui ponctuent le récit, les multiples gros plans illustrent comment Marianne et Héloïse, la jeune femme à la robe en feu, scrutent de moins en furtivement l’apparence de l’autre dans des promenades dans la propriété et sur la mince plage en bas de la falaise. La peintre récolte des indices pour réaliser son portrait et l’autre devient un sujet de moins en rébarbatif passant d’amie à complice dans la réalisation d’une œuvre que les deux aimeront. Les plans-séquences se succèdent ainsi dans un ballet de plus en plus amoureux dans lequel Adèle Haenel avance à petits pas résolus.

En établissant son intrigue dans cette fin d’Ancien Régime où Élisabeth Vigée Le Brun était la peintre élue de la famille royale, la cinéaste Céline Sciamma redonne voix au chapitre au labeur et au talent de ces nombreuses autres femmes peintres cachées dans les recoins des livres d’histoire de l’art.

Une situation très risquée pour la bonne est l’occasion pour Marianne de réaliser avec l’aide des deux autres un croquis en plus gros traits de cet épisode. De même, l’alliance des deux amies franchit le gué du regard au toucher de plus en plus insistant aux conséquences volcaniques filmées avec une certaine retenue par l’équipe. La nudité y est vue comme normale dans cette exploration de la passion qui peut surgir tout aussi bien dans ces environnements si policés.

En établissant son intrigue dans cette fin d’Ancien Régime où Élisabeth Vigée Le Brun était la peintre élue de la famille royale, la cinéaste Céline Sciamma redonne voix au chapitre au labeur et au talent de ces nombreuses autres femmes peintres cachées dans les recoins des livres d’histoire de l’art. Le Prix du meilleur scénario au dernier festival de Cannes confirme une fois de plus l’importance de cette artiste.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE

Réalisation
Céline Sciamma

Genre(s)
Drame

Origine(s)
France

Année : 2019 – Durée : 2 h 01 min

Langue(s)
V.o. : français
Portrait de la jeune fille en feu

Dist. @
MK2 / Mile End

Classement
Tous publics

En salle(s) @
Cinéma Beaubien
Cineplex

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]