Living

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 27 janvier 2023

SUCCINCTEMENT.
Un événement majeur vient bouleverser la vie d’un fonctionnaire britannique.

CRITIQUE.

★★★ ½

texte
Luc Chaput

Prendre acte

Un chef de section de l’administration municipale londonienne se rend avec un de ses assistants dans le bureau d’un collègue. Ce dernier lui dit qu’il est trop pris pour s’occuper de ce cas précis. Monsieur Williams s’assoit et dit qu’il attendra.

Dans la Grande-Bretagne d’après-guerre, les attitudes et vêtements de l’époque de la grandeur de l’Empire avaient encore une grande importance. Williams porte un chapeau melon et, vêtu d’un costume seyant, prend le train cinq jours semaine d’une banlieue éloignée de Londres pour se rendre dans l’immense building du comté de Londres. Il y dirige une section de quelques employés et l’accumulation de dossiers sur les bureaux et les étagères est le symbole le plus patent de leur travail. Certains cas semblent pris dans des limbes décisionnels.

Le romancier nippo-britannique Kazuo Ishiguro (The Remains of the Day) adapte d’élégante manière le scénario d’un des chefs d’œuvre d’Akira Kurosawa Ikiru (1952) dû au réalisateur, à Shinobu Hashimoto et Hideo Oguni et inspiré par la nouvelle La mort d’Ivan Ilitch de Tolstoï. L’importance de la réserve et du quant-à-soi qui régit les attitudes de l’époque court tout au long du long métrage. Seule la relation amicale entre Williams et Margaret, une jeune ex employée, ainsi qu’une soirée plus arrosée dans une station balnéaire montrent ce qui aurait pu changer plus tôt dans cette vie trop ordonnée.

Face au miroir, réaliser que, finalement, on existe.

Un annonce bouleverse la vie de Williams dont on n’apprend jamais le prénom et l’oblige à réviser ses priorités. Le dossier de ces ménagères d’un quartier pauvre de l’est de Londres qui demandent un terrain de jeux pour leurs enfants apparaît tout à coup primordial. Le va-et-vient de ces dames puis de Williams entre les différentes sous-sections est mené avec dextérité par le réalisateur Olivier Hermanus. On en retrouve une version plus comique et follement énergique dans la Maison qui rend fou, le huitième épisode du dessin animé Les Douze travaux d’Astérix (1976).

L’interprétation si subtile de l’habituellement plus exubérant Bill Nighy constitue l’épine dorsale de ce film.

Le cinéaste sud-africain Hermanus intègre des séquences d’archives dans cette recréation de cette vie réglée comme du papier à musique et la cinématographie de Jamie D. Ramsay tamise ses effets.

L’interprétation si subtile de l’habituellement plus exubérant Bill Nighy constitue l’épine dorsale de ce film. Aimee Lou Wood et Alex Sharp dans le rôle de Peter, un nouvel employé, lui apportent une soutien sans faille dans cette délicate relecture de ce film exceptionnel de Kurosawa qui garde toute sa pertinence sur les responsabilités fluctuantes dans les grandes organisations.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Oliver Hermanus

Scénario
Kazuo Ishiguro
D’après le film Ikiru, d’Akira Kurosawa

Direction photo
Jamie Ramsay
Montage
Chris Wyatt
Musique
Emilie Levienaise Farrouch

Genre(s)
Drame existentiel
Origine(s)
Grande-Bretagne

Année : 2022 – Durée : 1 h 42 min
Langue(s)
V.o. : anglais; s.-t.f.

Vivre

Dist. [ Contact ] @
Métropole Films
[ Mongrel Media ]

 

Diffusion @
Cineplex
Cinémathèque québécoise

Classement
Visa GÉNÉRAL

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

Pathaan

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 27 janvier 2023
[ Sortie devancée au mercredi 25 janvier 2023 ]

SUCCINCTEMENT.
Pathaan est un agent du RAW, le service secret indien. Capturé et torturé par un groupe terroriste, ce sera la dernière fois qu’on aura entendu parler de lui. Mais…

CRITIQUE.

★★★★

Les

héros

ne

sont

pas

fatigués

texte
Élie Castiel

Un des rois de Bollywood, Shah Rukh Khan possède la quintessence du savoir-faire dans l’art de l’interprétation, quel que soit son répertoire, multiple et varié – action, aventures, débonnaire, comique, romantique et le reste. Ici, dans la peau d’un héros sans peur et sans reproches, un homme plus fort que son ombre dans un film d’action, sans interruptions, donnant l’occasion au jeune Siddharth Anand l’occasion de prendre ses rêves pour des réalités. Tourner « son » film d’action.

Sans doute qu’abreuvé de séries à la James Bond ou autres du même genre, sans compter qu’il fait partie de la génération nourrie aux jeux vidéo, Anand n’a de comptes à rendre à personne. Dès les premières images, Il perçoit son Pathaan comme non seulement un hommage bien sentie aux films de la même catégorie, mais bien plus, remue de fond en comble son imaginaire pour créer des situations à double-sens, à plusieurs sens même.

Une histoire d’espionnage, de virus disparu depuis des lustres et qu’un magnat veut ramener sur terre, un nouvel ennemi à abattre en la personne d’un ancien collègue (fébrile John Abraham) du RAW qui a décidé, en accord avec le scénario intelligemment ficelé, de changer de camp. Et une femme agent, double, mais pas sûr (Deepika Padukone, brillante, super-sexy dans un item number, comme toujours, de rigueur; ça se passe en Espagne et a créé l’ire d’une partie de la population urbaine en Inde. Sur ce point, des sous-entendus, pas si « sous » que cela, sur la situation entre la religion hindoue et la musulmane en Inde sont soulignés à petits gros traits pour qui veut l’entendre.

Comme un héros mythique qui traverse le temps à travers des zones d’ombre.

Et parlant de Padukone, elle nous offre une séquence où la femme reprend ses droits. Lors d’un combat, qu’elle gère avec un sens de la gestuelle quasi chorégraphique, elle est armée d’un fusil de combat en forme métaphorique de phallus guerrier, symbole de puissance. Tout en restant « femme », attirante à plus d’un degré, elle « virilise » soudain son corps le temps de liquider l’ennemi. Cette parenthèse indique jusqu’à quel point les jeunes cinéastes indiens sont conscients des changements intimes qui s’opèrent dans leur société.

C’est ainsi que le « Jai Hind » qui veut dire « Vive l’Inde » ou « Longue vie à l’Inde » est souvent prononcé dans les films hindis. Ici, cette déclaration nationaliste prend une signification politique particulière (comme c’est le cas, intentionnel, de plusieurs productions Bollywood) qui, pour les intéressé.es prend des proportions pour le moins peu louables.

La morale est bien sauve. Du coup, les héros ne semblent plus fatigués, mais prêts à tout pour perpétuer un genre de cinéma selon une éternelle tradition.

Qu’importe pour nous, Occidentaux. Pathaan se déploie à une vitesse vertigineuse et le montage d’Aarif Sheikh est un des plus subversifs, rapide, sans concessions, surmené, presque sans morale, profitant des multiples scènes d’action pour déployer sa magie des images. On peut en dire autant du directeur photo Satchith Paulose qui film comme s’il s’agissait d’un jeu où la rapidité n’a d’égale que cet amoncellement intempestif de cascades époustouflantes.
La présence amicale et bien participative de Salman Khan n’est que bienvenue. Elle se distingue par sa longueur, plus animée que dans la plupart des films. Il disparaît soudain pour revenir au générique de fin.

Vers la fin des crédits, les deux Khan, héros d’une autre époque pas si lointaine se posent la vraie question : qui, maintenant, vont les remplacer? Ils citent tels ou tels sont donner de noms, eux-mêmes pas si convaincus. Leurs échanges est un des plus truculents et autodérisoire, mais en même temps, donne accès à une nouvelle ère qui s’annnonce pour Bollywood; dans un sens, la venue d’une génération d’acteurs (et d’actrices) qui ne songent qu’à perpétuer une certaine tradition.

La morale est bien sauve. Du coup, les héros ne semblent plus fatigués, mais prêts à tout pour perpétuer un genre de cinéma selon une éternelle tradition.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Siddharth Anand

Scénario
Siddharth Anand, Shridhar Raghavan
Images
Stchith Paulose
Montage
Aarif Sheikh
Musique
Ankit Balhara, Sanchit Balhara
Vishal Dadlani, Shekhar Rajvani

Siddharth Anand.
Préserver la pérennité du genre.

Genre(s)
Action
Origine(s)
Inde

Année : 2022 – Durée : 2 h 30 min
Langue(s)
V.o. : hindi; s.-t.a.

Pathan

Dist. [ Contact ] @
Imtiaz Mastan

Diffusion @
Cineplex

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

[ Violence ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

Respire

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 27 janvier 2023

SUCCINCTEMENT.
Fouad, jeune immigrant marocain de 15 ans, et Max, un Québécois de 27, vivent tous les deux des existences pleines de frustrations. Un destin les mènera l’un face à l’autre.

CRITIQUE.

★★★ ½

Exils

en

la

demeure

texte
Élie Castiel

Ce qui nous paraît le plus évident, c’est bien la mise en contexte de personnages issus de l’immigration, quasi absents de la fiction québécoise ou, tout au plus, dans la plupart des cas, cantonnés dans des rôles de figuration.

Dans la brochure distribuée aux gens des médias, le mot du réalisateur est d’autant plus direct qu’il renvoit à une réalité socio-anthropologique encore existante – « Lorsque ma famille a immigré au Québec, la transition a été brutale. J’ai connu l’exclusion sociale à cause de mes origines à un très jeune âge. Malgré ce que j’ai pu subir, je n’ai pas vécu une enfance malheureuse, bien au contraire, c’était rempli de richesse. Rien n’est complètement blanc ou noir. C’est pour cela qu’il m’était important de faire un film nuancé. Avec Respire, je ne pointe personne du doigt… »

La mise en scène souligne cette pensée selon laquelle les différences sont assujetties, plus souvent, à un dialogue de sourds, comme si se confondre à l’autre, le comprendre, l’écouter devenait un exercice périlleux et, politiquement surtout, intrusif et porteur de débordements.

Fouad, 15 ans (très versatile et charismatique Amédamine Ouerghi), et Max (excellent Frédéric Lemay, dont les quelques gros plans révèlent une gueule farouchement cinématogénique), ne se rencontreront concrètement, bien que dans un certain flou intentionnel dans la photo, qu’à une seule occasion, celle qui, au cours des prochaines minutes, conclut le film de façon fracassante, rompant avec une certaine quasi-neutralité ambiante, quoique piégée par la rage.

De l’indicible, le désir infranchissable de monter l’échelon social.

Effectivement, impartialité non dépourvue de critique sociale et géographique (quartiers de banlieue propice aux débordements, garage de réparation et commerce de fast-food d’une autre époque, bar de danseuses runné par un parvenu qui ne parle pas français. Des détails non dépourvus de signification qui, dans un sens, contextualise le propos.

Le père de Fouad perd son emploi, sa mère aussi. Dans leurs quêtes, ils font face au refus. Le père finira par trouver son « poste d’ingénieur » même si junior. Jusqu’à ce que… La réussite dans la terre d’accueil n’est pas dépourvue d’incongruités.

Quelques légères faiblesses, quelques erreurs de parcours non voulues, quelques intentions louables à la tragédie grecque, mais dans l’ensemble, Respire demeure une œuvre accomplie qui méritait haut la main le Prix du meilleur film québécois lors d’un récent festival de films montréalais.

Le titre du film n’est pas un simple Nom, au contraire, un ordre, une recommandation, un signe identitaire, un cri de la part du cinéaste, dont nous avions beaucoup aimé Là où Attila passe (2015), qui ne cesse de hurler de séquence en séquence dans ce récit aux couleurs atmosphériques sombres filmée par un Simon Lamarre-Ledoux possédé par son objectif louablement inquisiteur.

Racisme, intolérance, efforts pour se comprendre, vivre dans un contexte social inéquitablement partagé. Et pourtant, dans la réalisation, quelques moments d’une sensibilité – comme le repas en famille de Fouad avec ses parents – à fleur de peau. Un intrusion chez l’autre québécois qui fait défaut dans un cinéma fictionnel presque exclusivement protectionniste. Dans un sens, un film sur les exils urbains.

Quelques légères faiblesses, quelques erreurs de parcours non voulues, quelques intentions louables à la tragédie grecque, mais dans l’ensemble, Respire demeure une œuvre accomplie qui méritait haut la main le Prix du meilleur film québécois lors d’un récent festival de films montréalais.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Onur Karaman

Scénario
Onur Karamam
Direction photo
Simon Lamarre-Ledoux
Montage
Onur Karaman
Supervision musicale
Frédéric « Paco » Monnier

Onur Karaman,
Un travail de réconciliation.

Genre(s)
Drame social
Origine(s)
Canada [Québec]

Année : 2022 – Durée : 1 h 30 min
Langue(s)
V.o. : français, arabe; s.-t.f.

Respire

Dist. [ Contact ] @
K-Films Amérique

Diffusion @
Cinéma Beaubien
 Cineplex

Classement
Visa GÉNÉRAL

 

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

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