L’homme de la cave

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 16 décembre 2022

SUCCINCTEMENT.
À Paris, Simon et Hélène décident de vendre une cave dans l’immeuble où ils habitent. Un homme, au passé trouble, l’achète et s’y installe sans prévenir.

Le FILM
de la semaine.

L’enraciné

CRITIQUE.

★★★★

texte
Élie Castiel

 

S’il est un dénominateur commun aux films de Philippe Le Guay, du moins dans la plupart de ses longs métrages, c’est bel et bien la notion d’incrustation, d’implantation dans un territoire donné. Comme ces sympathiques et inoffensives bonnes espagnoles partageant le 6e étage d’un immeuble bourgeois dans Les femmes du 6e étage (2010).

Tout le contraire de ce M. Fonzic (magnifique François Cluzet, antihéros aux allures bien cachées de bête féroce, de facho aux idées controversées bien arrêtées. Celui par qui le désordre arrive dans la vie d’un couple, une fille adolescente, famille bien installée.

Chez les Sandberg, elle, Hélène, est catholique (très présente Bérénice Bejo), sa fille Justine (très efficace Victoria Eber) également catholique – elle le dira à Jacques Fonzic au hasard (inquiétant) d’une conversation; lui, Simon, Juif (très habité Jérémie Renier), pas trop à l’aise avec ses origines, comme on l’apprendra.

Mais aussi un sujet rarement, pour ne pas dire, jamais abordé au cinéma. Trop risqué? Crainte que le public soit fatigué qu’on parle trop souvent du sujet de l’antisémitisme? Peu importe de quoi il retourne, le scénario de Le Guay, coécrit avec Marc Weitzmann et la collaboration de Gilles Taurand relève d’une nouvelle forme d’antisémitisme, indicible, soit la négation de la Shoah comme tremplin à ces décennies post-Deuxième guerre mondiale souvent baignées dans la lutte contre cette forme de racisme très particulière car se perdant dans la nuit des temps.

Et puis, bien sûr, la mise en scène de Philippe Le Guay. Qui a cependant contribué à l’accueil mitigé de la critique et d’un certain public. On ne fera pas le procès des détracteurs – liberté d’expression (et de pensée) oblige.

Discuter les accords d’un contrat bien particulier.

Malgré sa durée de presque deux heures, il y a chez le réalisateur du charmant Molière à bicyclette (2013), une idée bien précise de cette ide de ne considérer que l’essentiel, de ne pas se perdre dans des velléités capricieuses. Chaque scène compte – même lors du dîner chez la mère de Sandberg, Nelly (Denise Chalem, bien présente) où David (excellent Jonathan Zaccaï) fait un commentaire sur le mariage gai et le Vatican et se questionne sur ce qu’en pensent les représentants du judaïsme. Ça paraît anodin, mais ça ne l’est pas à bien y penser.

Dès le départ, Fonzic s’incruste, se terre, s’implante dans la cave achetée aux Sandberg. Dès ce moment, commencent les contours d’une histoire qui se répète depuis quelques décennies déjà, comme si le régime pétainiste (ou autres, selon le pays) avait engendré des nostalgiques.

Condamnation? Allégorie d’un monde actuel? Les deux à la fois? Fort probablement, et l’immeuble en question représente autant de personnages aux idées disparates, une discordance propre à nos sociétés, notamment occidentales, où les aléas du racisme endémique se filtrent sournoisement dans note horizon incertain. Danger!

Le plus surprenant, voire habile dans le scénario, demeure la finale qui, contre toute attente, laisse un grand point d’interrogation à un problème non résolu. Et il y a, dans le personnage de Fonzic, cette manipulation qui consiste à affranchir les enjeux d’une pensée, mieux dire, idéologie. Se montrer bienveillant (l’un n’empêche pas l’autre), se montrer aussi vile qu’estimable. Ces incarnations entre le bien et le mal, Cluzet les taille finement, comme un orfèvre, au fur et à mesure des situations que lui-même provoque.

Condamnation? Allégorie d’un monde actuel? Les deux à la fois? Fort probablement, et l’immeuble en question représente autant de personnages aux idées disparates, une discordance propre à nos sociétés, notamment occidentales, où les aléas du racisme endémique se filtrent sournoisement dans note horizon incertain. Danger!

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Philippe Le Guay

Scénario
Philippe Le Guay

Marc Weitzmann
Avec la collaboration de Gilles Taurand
Direction photo
Guillaume Deffontaines
Montage
Monica Coleman
Musique
Bruno Coulais

Philippe Le Guay.
Aborder le thème
en évitant la démesure.

Genre(s)
Suspense

Origine(s)
France
Année : 2021 – Durée : 1 h 54 min

Langue(s)
V.o. : français; s.-t.a.

The Man from the Basement

Dist. [ Contact ] @
K-Films Amérique
Diffusion @
Cinéma Beaubien
Cinémas Starz

Classement
Visa GÉNÉRAL

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

The Whale

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Mercredi 21 décembre 2022

SUCCINCTEMENT.
Charlie, professeur d’anglais reclus chez lui, tente de renouer avec sa fille adolescente pour une ultime chance de rédemption.

CRITIQUE.

★★★★

État

contemplatif

texte
Élie Castiel

Le nouveau film de Darren Aronofsky repose sur une proposition morale, voire philosophique, car émanant d’un regard idéologique du monde. Réaliser l’utopie tant souhaitée du bien contre le mal. Admettre que dans tout acte rédempteur, la voie de la raison peut l’emporter sur le chaos.

Un des films les plus atypiques de l’auteur, en autres, du très beau Mother! / Mère! (2017). Force est pourtant de souligner que dans The Whale, on retrouve de nombreux périmètres narratifs et de style de ses films précédents; et même cette symbolique qui s’illustre par des fréquents détournements du plan et même de la couleur et qui font partie de son univers intellectuel comme cinéaste-auteur.

Il est question ici d’un huis clos anxiogène où la parole domine – puisque tiré d’une pièce de théâtre éponyme du coscénariste Samuel D. Hunter. Pour « faire cinéma », le recours au gros plan, particulièrement en ce qui a trait au personnage de Charlie (illustre personnification de Brendan Fraser, sans doute l’une de ses meilleures prestations), qui doit composer avec les multiples états d’âme dans un espace restreint où la caméra le colonise sans cesse.

Le regard conciliateur, conscient de sa déchéance prochaine.

Prothèse exemplaire d’Adrien Morot qui donne au personnage cet aspect entre le grand-guignolesque et la réelle empathie – belles poussées de chaleur humaine entre Charlie et Liz, son infirmière attitrée; Hong Chau, exemplaire dans son humanité, rare de nos jours, et les liens authentiques qu’elle entretient avec son patient, des rapports fraternels.

Et narrativement, subtilement, ingénieusement, non pas pour porter vulgairement atteinte à la condition physique de Charlie; bien au contraire, pour mettre en perspective le sens de ce « cétacé marin » dans Moby Dick, l’œuvre de Herman Melville, dont il largement question dans le film.

Mais chez Aronofsky, persiste ce côté quasi fantomatique du plan, une dépendance avec les couleurs et les éclairages qui passe par ce refus de réalisme. Et puis, vers la fin, Elli (la fille de Charlie, celle par qui le conflit arrive – très habitée Sadie Sink – ouvre la porte de la maison et l’image s’éclaire d’une lumière quasi artificielle brillante, sur son beau visage, cette fois-ci, apaisé; comme si Aronofsky refusait ainsi le recours au concret, optant pour la métaphore.

À voir par, notamment, ceux et celles pour qui suivre la carrière d’un cinéaste qui compte est une affaire de morale.

On passe du 1.33 : 1 au 1.85, non pas par caprice, mais pour signifier la proposition, pour explique le huis clos, cet espace restreint. En quelque sorte, un voyage intime dans la pensée d’un homme qui se sait condamné.

À voir par, notamment, ceux et celles pour qui suivre la carrière d’un cinéaste qui compte est une affaire de morale.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Darren Aronofsky

Scénario
Samuel D. Hunter,

d’après sa propre pièce
Direction photo
Matthew Libatique
Montage
Andrew Weisblum
Musique
Rob Simonsen

Darren Aronofsky.
Imposer un rôle ingrat par
le biais de l’empathie.

Genre(s)
Drame

Origine(s)
États-Unis

Année : 2022 – Durée : 1 h 57 min
Langue(s)
V.o. : anglais / Version française

La baleine

Dist. [ Contact ] @
Entract Films
Diffusion @
Cinéma du Parc
Cineplex

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

 

 

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

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