Ma mère, Dieu et Sylvie Vartan

P R I M E U R
Sortie
Vendredi 4 avril 2025

RÉSUMÉ SUCCINCT
En 1963, Esther met au monde Roland, petit dernier d’une famille nombreuse. Roland naît avec un pied-bot qui l’empêche de se tenir debout. Contre l’avis de tous, elle promet à son fils qu’il marchera comme les autres et qu’il aura une vie fabuleuse.

 

CRITIQUE
Élie Castiel

★★★

Mère

Courage

En fait, s’agit-il, du moins dans notre beau coin de pays, d’encenser la carrière de Ken Scott, capable du très bon, comme l’élégant La grande séduction, le bigrement efficace Starbuck, ou du plus volatile, Les doigts croches et encore, Au revoir le bonheur ?

Toujours est-il que depuis quelques jours, les médias traditionnels écrits et Internet n’en finissent plus avec le nouveau « Ken Scott » coproduit entre la France et le Canada.

En fait, la grande originalité du film, nonobstant ses pays d’origine, est, en ce qui a trait au cinéma occidental, de mettre en scène une famille juive marocaine, le genre ou catégorie se limitant aux Juifs ashkénazes. Pour les besoins de la coproduction, les producteurs ont dû se rabattre sur un casting européen – ici, au Québec, au cas où vous ne le sauriez pas, il y a une importante communauté sépharade de langue française et dont la très grande majorité des représentants tient à préserver cette langue. Et parmi eux et elles, quelques comédiens et comédiennes qui ne rêvent que de gravir les planches ou d’être devant la caméra.

De Leïla Bekhti, elle est simplement une immense actrice ; l’émotion est palpable dans les deux parties du film, même si dans la deuxième, vieillie de plusieurs années, le poids de son exaltation est beaucoup plus prononcé et, irrémédiablement, on en sort gagnant devant sa prestance.

Tu n’as rien à craindre tant que je suis là.

Véritable Mère Courage, à l’instar de toutes les mères du bassin méditerranéen, elle impose son statut familial, ne se mêle pas de ses affaires, l’amour pour son fils souffrant d’un handicap (qu’elle ne considère pas comme tel) s’inscrivant dans un rapport freudien platoniquement incestueux.

Il en découle des situations que le grand public, avide de sensations fortes en matière de sensibilité et d’affectation, pourra savourer. Et en plus, le tout alimenté par des interprétations senties, même si parfois, frisant un tant soit peu la caricature.

La mise en scène de Scott, cinéaste ici, indéniablement en terrain inconnu, participe de cette volonté authentique à connaître l’autre, à comprendre la dynamique qui en découle de ces personnages rarement vus à l’écran.

Il en découle des situations que le grand public, avide de sensations fortes en matière de sensibilité et d’affectation, pourra savourer. Et en plus, le tout alimenté par des interprétations senties, même si parfois, frisant un tant soit peu la caricature.

Force est de souligner que Bekhti est d’origine algérienne, même si née en France, et dans ce sens, les rapports entre les communautés magrébines et juives, malgré les affres douloureux de notre époque, ont toujours (ou presque) été harmonieux. Chez la comédienne, il y a donc une connaissance réfléchie du personnage qu’elle incarne, et ça se voit.

Sincèrement, Jonathan Cohen joue probablement son meilleur rôle, entre l’attachement fusionnel à sa mère et une fois adulte, vêtant les habits d’avocat et guéri de son handicap (par la volonté divine ?) ne rêvant que d’indépendance. En jeune homme, le rôle est tenu par un Naïm Naji, d’origine marocaine, étonnant, chaque séquence dans laquelle il paraît bercée de bonheur ou de tristesse attendrissante. Un film sincère malgré ses légères failles que, franchement, personne ne retient, sympa, feel-good, et Dieu sait si on a tant besoin en ce moment. Un régal.

Et bien entendu, il y a aussi Sylvie Vartan.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Ken Scott

Scénario : Ken Scott; d’après le roman éponyme de Roland Pere. Direction photo : Guillaume Schiffman. Montage : Dorian Rigal-Ansous, Yvan Thibaudeau. Musique : Nicolas Errèra.

Genre(s)
Drame biographique
Origine(s)
France / Canada
Année : 2024 – Durée : 1 h 43 min
Langue(s)
V.o. : français; s.-t.a.
Once Upon My Mother

Dist. [ Contact ] @
Les Films Opale
[ Gaumont ]

Ken Scott

Diffusion @
Cinéma Beaubien
 Cineplex

Classement
Visa GÉNÉRAL

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

October 8

P R I M E U R
Sortie
Vendredi 4 avril 2025

RÉSUMÉ SUCCINCT
Documentaire sur l’explosion de l’antisémitisme aux États-Unis depuis le 7 octobre 2023.

 

CRITIQUE
Élie Castiel

★★★

Les raisins

de la colère

Une fureur incommensurable des deux côtés, soit ce conflit entre les belligérants du Hamas et Israël, le premier perpétrant les horribles massacres du 7 octobre 2023, les forces de défense israéliennes répondant à cette énorme Progrom de façon continue, ramenant le conflit sur la scène politique internationale avec les conséquences que l’on sait déjà.

Une chose est certaine : très vite, dans une très grande partie du monde occidental, le 7 octobre 2023 est vite devenu un simple fait divers, la quasi-totalité des chefs d’état considérant la réponse d’Israël excessive, notamment en ce qui a trait à la perte de très nombreuses victimes civiles. Oui, bien entendu, le Hamas se sert des gazaouis civils comme boucliers. On ne peut le nier. Et c’est encore le cas. Mais ignorer ces pertes civiles est aussi inexcusable.

Et puis les otages, dont il reste encore aujourd’hui un peu plus d’une cinquantaine, morts ou vivants. Des enjeux que le documentaire de Wendy Sachs aborde superficiellement, sa thèse se prononçant sur l’antisémitisme délirant qui s’est abattu sur l’hémisphère occidental dès le lendemain du 7 octobre, d’où le titre du documentaire. Principalement dans les campus américains et quelques canadiens ; comment les autorités de ces institutions ont géré la situation ? Des manifestations régulières provenant des propalestiniens arborant des slogans, si l’on en juge par ce que montre le documentaire, pancartes antisémites d’une violence intense.

D’où viennent ces propos ? Quelques enregistrements piratés montrent la façon dont se sont pris les organisateurs du Hamas et autres mouvements terroristes, pour d’autres de résistance, soit ‘parler la langue que comprennent les étudiants de ces campus pour faire passer le message’. Il s’agit d’une mise en scène orchestrée depuis des années. Mouvement réussi à en voir le résultat.

Entre revendications politiques et haine de l’autre.

Le film de Sachs le montre directement, sans passer par quatre chemins. Dans la réaction de personnes de confession juive, certains se plaignent du manque de reflexe des grands de Hollywood, sauf quelques noms plus ou moins connu que le documentaire montre – mais sur ce point, les applaudissements nourris lors de la remise du prix aux Oscars pour No Other Land est une réponse en soi, car malgré les critiques de part et d’autre, le film réalisé entre deux Palestiniens et deux Israéliens prône à sa façon un terrain possible d’entente, un territoire à deux états.

Côté palestinien, le Hamas et ses acolytes n’en veulent pas, le gouvernement israélien le plus à droite de son Histoire, non plus. Et pourtant ce qui se passe dans cette région du monde est quelque chose de plus complexe qu’on le pense.

Conflit territorial ? Conflit politique ? Guerre de religions ? Haine viscérale entre deux peuples sémites qui se perd dans la nuit des temps ? Autant d’enjeux irréconciliables.

L’antisémitisme fait un retour en force car la majorité de ses adhérents, et ils sont nombreux, au-delà de ce que peut provoquer ce qui se passe à Gaza, abordent leur parti pris sous un angle essentiellement émotif, issu et disons-le sans ambages, d’une pulsion raciste préméditée et sans doute acquise par un environnement social imprévisible.

Les revendications du Hamas ne tiennent pas debout. Ce que cherche Israël, au-delà de la libération de tous les otages qui restent est quelque chose de plus complexe vu la situation qui prévaut et que certains même dans le pays, débattent constamment.

Une chose est pourtant évidente : Israël est sans doute le pays le moins connu du monde. Entre son orientalisme fondateur issu de la religion et une occidentalisation massive qui a pris le dessus, tout en comptant une société indisciplinée prête à tout pour préserver le caractère démocratique de l’état, l’étau se resserre de plus en plus.

En attendant, l’antisémitisme croit de plus en plus, du moins tant que sévira ce sempiternel conflit. Les voix et les voies d’un possible accord de paix et de partage territorial sont loin de faire l’unanimité.

Rien d’innovant dans la réalisation de Wendy Sachs, des têtes parlantes, certes, mais la plupart du temps dans des environnements turbulents. Finalement, October 8 intéressera pour ce qu’il expose sur la question.

L’antisémitisme fait un retour en force car la majorité de ses adhérents, et ils sont nombreux, au-delà de ce que peut provoquer ce qui se passe à Gaza, abordent leur parti pris sous un angle essentiellement émotif, issu et disons-le sans ambages, d’une pulsion raciste préméditée et sans doute acquise par un environnement social imprévisible.

La raison n’existe plus.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Wendy Sachs

Scénario : Wendy Sachs, Nimrod Erez, Inbal B. Lessner. Direction photo : Tom Gut, Cam Edward Wallis. Montage : Jaki Covington. Musique : Sharon Farber.

Genre(s)
Documentaire
Origine(s)
États-Unis
Année : 2024 – Durée : 1 h 40 min
Langue(s)
V.o. : anglais
October 8

Wendy Sachs

 [ Contact ] @
Entract Films
[ Briarcliff Entertainment ]

Diffusion @
Cineplex

Classement
Visa GÉNÉRAL

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

Soundtrack to a Coup d’Etat

 

RÉSUMÉ SUCCINCT
Quand jazz, guerre froide et décolonisation se rencontrent à l’occasion de la crise du Congo en 1961.

Le FILM
de la semaine

CRITIQUE
Luc Chaput

★★★★

Partitions

dissonantes

 

Nina Simone, au piano, entonne The Ballad of Hollis Brown, blues écrit par Bob Dylan et des séquences montrant les films de famille d’Andrée Blouin, collaboratrice de Lumumba, y répondent.

Patrice Lumumba, comme le modèle politique de son époque.

Le cinéaste belge Johan Grimonprez, intrigué par une intervention célèbre de Nikita Khrouchtchev à l’assemblée générale de l’ONU, a creusé la politique coloniale de son pays en Afrique spécialement au Congo alors belge et sa marche vers l’indépendance. La montée de ces mouvements de libération africains au début des années 60 est mis en parallèles visuel et sonore avec la diffusion de plus en plus grande de différentes formes de jazz. Le département d’État américain emploie ces musiciens et interprètes comme ambassadeurs culturels car le jazz est considéré par l’Union soviétique comme décadent.

Le long métrage revient sur la conférence de Bandung des non-alignés, sur l’importance de l’uranium du Katanga dans la construction des bombes atomiques d’Hiroshima et Nagasaki dans un montage enlevé et précis de Rik Chaubet et un travail remarquable sur la bande-son par Ranko Pauković. On trouve d’ailleurs sur Internet la présentation des morceaux de musique du film en version complète pour renouer avec l’émotion suscitée par ces irruptions musicales qui enveloppent le déroulé chronologique de cette Crise du Congo.

Pour sa relecture complexe tressant deux fils conducteurs musical et factuel de cette période charnière d’il y a une soixantaine d’années, ce long métrage de deux heures et demie, qui nous interpelle directement aujourd’hui encore avec ce qui se passe dans cette région des Grands Lacs africains, mérite tous les honneurs qu’il a réussi à glaner.

Des personnalités comme Andrée Blouin reconquièrent ainsi leur place dans l’histoire universelle aux côtés de témoignages d’écrivains comme In Koli Jean Bofane, d’agents secrets, Larry Devlin ou de diplomates comme Conor Cruise O’Brien.

Des dépêches, extraits de rapports et autres textes sont aussi amenés à contribution à divers intervalles dans une typographie invitante pour décrire les tractations qui menèrent à la chute et à l’assassinat de Patrice Lumumba. L’aspect schizophrénique de ces tournées en Afrique de musiciens noirs américains dont les droits humains sont bafoués aux États-Unis culmine dans la tournée de Louis Armstrong au Congo-Kinshasa qui découvre après coup qu’il a servi de couverture à des actions funestes de la CIA.

Pour sa relecture complexe tressant deux fils conducteurs musical et factuel de cette période charnière d’il y a une soixantaine d’années, ce long métrage de deux heures et demie, qui nous interpelle directement aujourd’hui encore avec ce qui se passe dans cette région des Grands Lacs africains, mérite tous les honneurs qu’il a réussi à glaner.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Johan Grimonprez

Scénario : Johan Grimonprez – Dramaturgie : Daan Milius – Direction photo : Jonathan Wannyn. Montage : Rik Chaubet. Musique : Pièces tirées du répertoire jazz.

Genre(s)
Documentaire
Origine(s)
Belgique / France
Pays-Bas
Année : 2024 – Durée : 2 h 30 min
Langue(s)
V.o. : multilingue; s.-t.a. ou s.-t.f.
Bande-son pour un Coup d’État

Johan Grimonprez

Dist. [ Contact ] @
Enchanté Films
[ Mediawan Rights ]

Diffusion @
Cinémathèque québécoise

Classement
Visa GÉNÉRAL

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]

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