Réagissant à la grogne soulevée dans le milieu culturel québécois par le doublage en France de la série de balados tournés au Canada anglais – Alone: A Love Story (Seule : Une histoire d’amour) –, la CBC a retraité, tout en s’engageant à refaire l’adaptation et le doublage au Québec[1]. Nos industriels du doublage crient victoire, mais ils doivent maintenant faire la démonstration qu’ils peuvent aussi bien faire que les doubleurs français. Car il faut savoir que les francophones du monde entier sont habitués d’entendre les doublages français, généralement d’excellente qualité, alors que les doublages québécois ne sont pour ainsi dire connus qu’au… Québec.Suite
RÉSUMÉ SUCCINCT. Silva traverse le désert à cheval pour retrouver Jake qu’il a connu vingt-cinq ans plus tôt lorsqu’ils étaient tous deux tueurs à gages. Silva souhaite renouer avec son ami d’enfance désormais shérif, mais ces retrouvailles ne sont pas sa seule motivation.
CRITIQUE Élie Castiel
★★★
Humeurs
vagabondes
On attendait impatiemment le « western gay » de Pedro Almodóvar pour la simple raison qu’on se demandait s’il évoquerait le sensationnel long métrage Brokeback Mountain (Souvenirs de Brokeback Mountain), d’Ang Lee.
Si Strange Way of Life se démarque, c’est bien par son caractère original qui ne cède pas à la tentation de mimer. Une proposition simple qui aurait pu néanmoins se transformer en un long métrage, mais que le cinéaste espagnol a cru bon de limiter à 31 minutes. Sans doute pour de bonnes raisons.
Assez cependant pour que nous soyons les témoins passifs d’une étrange histoire d’amour entre deux hommes qui se rencontrent après de longues années sans s’être vus.
Le premier, Silva (magnifique et sensuel Pedro Pascal), qu’Almodóvar se permet de filmer de dos, sur le lit, le fessier en l’air, grâce à la caméra gourmande de José Luis Alcaine. Et le plus passionné des deux. Le second, Jake (Ethan Hawke, plus stable et confortable dans les histoires d’amour hétéros, faisant des efforts pour manifester un semblant de passion, toutefois éteinte).
Et si l’on recommançait?
On n’avancera rien sur l’intrigue. Mais la passion, après des années, se dilue. L’homosexualité est vécue, du moins pour l’un d’eux, comme un « rite » de passage, une curiosité provisoire qu’on ferait mieux d’oublier. Sauf que…
Mais chez Almodóvar, aucun signe n’expliquant ce constat. Il dirige ses acteurs, s’assure que le tout est bien filmé. Ce moyen métrage se trouve finalement à mille lieues de la cohésion et de la richesse plastique que procurait La loi du désir (La Ley del deseo), imbattable film gai de la fin des années 1980.
Reste un plan final où le personnage de Silva donne une réplique qui, à elle seule, résume le but de cette rencontre entre deux anciens supposément amants.
Ici, de courtes séquences inutiles. Des personnages aussi, mal définis. Une erreur dans la filmographie de Pedro Almodóvar, et pas la seule. Mais Strange Way of Life, titre d’autant plus paradoxal, semble suggérer que le cinéma des « homosexualités » n’est pas un genre facile à faire, même pour les cinéastes ouvertement gais. Si on se rabat sur les images vaguement érotiques, le discours, lui, celui de la passion, n’est point, ici, incarné.
Une histoire un peu compliquée de relation intime mal assumée, de vengeance après la mort de la maîtresse de l’un; de la protection du fils de l’autre. Trop complexe comme récit.
Reste un plan final où le personnage de Silva donne une réplique qui, à elle seule, résume le but de cette rencontre entre deux anciens supposément amants.
En attendant le prochain long métrage du cinéaste ibérique qui semble être un secret bien gardé.
FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation Pedro Almodóvar
Scénario Pedro Almodóvar Direction photo José Luis Alcaine Montage Teresa Font Musique Alberto Iglesias
Pedro Almodóvar
Genre(s) Comédie dramatique Origine(s) Espagne / France Année : 2022 – Durée : 31 min Langue(s) V.o. : anglais; s.-t.f. Étrange façon de vivre
Extraña forma de vida
Dist. [ Contact ] @ Métropole Films [ Mongrel Media ]
Film-somme, film-essai, mais surtout regard porté sur son propre cinéma, non pas comme s’il s’agissait d’un postulat testamentaire, mais fort heureusement élargi dans une perspective de continuité, voire même de synergie. Une façon sans doute d’envisager un nouveau cycle cinématographique.Suite