Compétition officielle

P R I M E U R
[ En Salle ]
Sortie
Vendredi 24 juin 2022

SUCCINCTEMENT.
Un homme d’affaires milliardaire décide de produire un film pour laisser une empreinte dans l’Histoire. Il engage alors les meilleurs : la célèbre cinéaste Lola Cuevas, la star hollywoodienne Félix Rivero et le comédien de théâtre radical Iván Torres. Mais…

Le FILM
de la semaine.

CRITIQUE.

★★★★

texte
Élie Castiel

Les

pièges

prévisibles

de la

création

Ensemble, on leur doit surtout l’habilement satirique Citoyen d’honneur / The Distinguished Citizen / El ciudadano ilustre (2016). Dans leur nouvel opus, l’immense comédien argentin Oscar Martínez se joint à deux grosses pointures du cinéma international, Penélope Cruz et Antonio Banderas. Et pourtant, aucun duel de stars dans Compétition officielle même si, fidèles à leur culture ibérique, PC et AB en mettent des tonnes comme si cette façon de procéder était  un geste plus que naturel vu leurs origines. Chacun conserve sa propre place et nous livre des moments hautement efficaces.

Mais Mario Cohn et Gastón Duprat savent bien doser la mise en scène, ne s’inquiètent nullement des quelques légers faux pas qui pourraient survenir en cours de route et, comme il se doit, conseillent le plus adroitement possible leurs comédiens, bénéficiant bien sûr de la caméra complice et parfois (pour ne pas dire « toujours ») intentionnellement encombrante du Catalan Arnau Valls Colomer, proche de ses cibles.

Lola Cuevas (Cruz) est une célèbre cinéaste aux extravagances dictatoriales extrêmes, soulignées par des crises d’humeur qui se transforment en caprices. La vedette internationale, Félix Rivero (Banderas) métaphoriquement face à son propre miroir, plus intéressé à son image qu’à autre chose. Et Iván Torres (Martinez), comédien issu du théâtre aux idées politiquement artistiques radicales qui ne tient pas à se faire « avaler » par les deux autres, d’autant plus qu’il est plus âgé et possède l’expérience du métier. Un trio infernal qui, dans cet étrange processus de création, transforme la gestation d’un film en un constant combat d’égos surdimensionnés, de « bitchages » inévitables (grâce à une écriture scénaristique, à laquelle s’ajoute Andrés Duprat, aux multiples envolées) et plus que tout, à cette envie malgré tout de continuer à créer et que seule la possible réconciliation, même si fausse, peut permettre. N’est-ce pas ainsi dans tout tournage?

En attendant que quelque chose leur tombe sur la tête.

La caméra est certes inquisitrice, mais c’est dans son statisme souverain qu’elle procède à ce jeu périlleux incendiaire, évitant le parti pris et surtout, en vain, de semer la controverse au sein de l’équipe.

Et un producteur, peu présent, mais aussi important puisqu’il ne comprend rien au cinéma, exige quand même des garanties irréalisables, fait valoir sa supériorité « économique ». Sans argent, rien n’est possible.

Sauf dans le cas de Lola, étant une femme sexy, attrayante, sculpturale et autoritaire, peut quand même conserver un certain pouvoir décisionnel. Des ententes, des disputes, des réconciliations, tout ce qui anime et envenime en même temps un tournage.

La superbe séquence imaginée où un immense objet extra-terrestre fait de pierre et préfabriqué pour les besoins du film… est sans doute exagérée, ringarde pour certains, gratuite, mais reflète jusqu’à quel point notre monde actuel, même dans le domaine de l’art, ne fait qu’encourager la radicalité, la superficialité, le vide et l’absurde, au risque de s’effondrer.  Puisque tout est surtout une question d’argent et de pouvoir. Et le monde du cinéma et ses participants n’y échappent pas.

Le film fonctionne à merveille malgré de légers défauts puisque tous les personnages et l’équipe de production semblent atteints d’un je-m’en-foutisme délirant, presque grand guignolesque. C’est peut-être ainsi qu’on peut, sans doute, réussir un film. Sans morale.

Par miracle, pour provoquer, Cohn et Duprat s’en fichent  (ou font semblant) de tous ces nouveaux codes éthiques établis dans les tournages depuis les derniers mouvements féministes nés aux États-Unis et exportés en Occident (dénonciations agressions et autres velléités accusatrices). Le féminisme, le machisme, le nouvel appareil social, toutes ces manifestations sont remises aux calendes grecques même si présentes dans le film, confirmant une fois de plus que la création n’est pas un processus démocratique, paritaire, syndical, mais individuel, faute de quoi le résultat, en fin de compte, ne peut s’avérer que plus encombrant.

Le film fonctionne à merveille malgré de légers défauts puisque tous les personnages et l’équipe de production semblent atteints d’un je-m’en-foutisme délirant, presque grand guignolesque. C’est peut-être ainsi qu’on peut, sans doute, réussir un film. Sans morale.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Mariano Cohn
Gastón Duprat

Scénario
Mariano Cohn
Andrés Duprat
Gastón Duprat

Direction photo
Arnaud Valls Colomer

Montage
Alberto del Campo

Musique
Eduardo Cruz

Genre(s)
Comédie satirique

Origine(s)
Espagne

Argentine

Année : 2021 – Durée : 1 h 55 min

Langue(s)
V.o. : espagnol; s.-t.f. ou s.-t.f.

Official Competition
Compentencia oficial

Dist. [ Contact ] @
Sphère Films

Classement
Visa GÉNÉRAL

Diffusion @
Cinéma Beaubien
Cinéma du Parc
Cineplex

[ Salles VIP : Interdit aux moins de 18 ans ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]