Nell Gwynn

CRITIQUE

SCÈNE

texte
Élie Castiel

★★★★

Entre la Scène et la cour du Roi

La mise en scène ludique, séduisante, de Krista Jackson, accompagnée des décors extravagants de Jawon Kang,  illumine la grande salle du Monument-National. Proposition intemporelle que cette Nell Gwynn, s’inscrivant dans l’air du temps, au moment où la mouvance artistique au féminin perce de plus en plus.  La plume de Jessica Swale évoque les grands écrits classiques où humour, drame, sentiments amoureux et demi-teintes s’expriment avec autant de légèreté que d’élégance; comme s’il s’agissait d’une petite révolution intérieure, la femme s’ouvre aux expériences que l’homme a toujours eues par défaut.

Le hasard veut que Nell devienne comédienne, provoquant chez un certain public une gêne d’abord, mais un nouveau monde auquel il faudra s’habituer, une approche près du réel – les comédiens jouant des rôles de femmes exprimaient des mouvement et des gestes exacerbés, affichant pour ainsi dire des airs de fausseté. Avec la femme, l’authenticité s’annonce et tout n’est que pour le mieux.

… ce qui est le plus touchant, c’est de constater que le spectateur est rivé à son siège, retenant son souffle devant la caresse des mots, les phrases brillantes, les double entendres, ou si vous préférez les doubles-sens, chers à la dramaturgie d’une certain époque.

Krista Jackson se dépasse. La scène, autant que la salle et les loges des deux côtés servent de lieux et de théâtre inventé. Liberté totale quant à la mise en scène, radieuse, prenant un plaisir fou à se manifester.

Jackson est intransigeante, envers elle-même et ses interprètes. Elle assume un professionnalisme contagieux que sentent les protagonistes de ce récit sur l’identité féminine et le rapport à l’Histoire de l’art dramatique. Les espace scéniques de Molière, de ses contemporains et le Globe shakespearien sont présents par le biais de leur âme théâtrale. Musique aidant, bien entendu, et surtout un rythme qui ne dément pas.

Crédit photo : @ École nationale de théâtre

Mais ce qui est le plus touchant, c’est de constater que le spectateur est rivé à son siège, retenant son souffle devant la caresse des mots, les phrases brillantes, les double entendres, ou si vous préférez les doubles-sens, chers à la dramaturgie d’une certain époque.

D’une part, tous les comédiens et comédiennes brillent par leur enthousiasme, soulignons néanmoins la ferveur, la clarté dans la voix, la projection et le timbre bien défini d’Espoir Akati Segbeaya. Brillante.

Nell Gwynn, parmi les pionnières de la scène dramatique, évacuant des siècles d’injustice. Et dans le cas de la version Swale/Jackson, une tombée de rideau où le vedettariat ne compte plus. Toutes et tous sont égaux. L’ovation debout est gracieusement méritée.

ÉQUIPE PARTIELLE DE CRÉATION
Texte
Jessica Swale

Mise en scène
Krista Jackson

Assistée de
Angelica Schwartz

Scénographie
Jawon Kang

Costumes
Alison Helmer

Éclairages
Katherine Kellner

Concept-vidéo
Christian Horosszczak

Concept-son
Michael Wanless

Interprètes
Michael Bell, Brynn Tyra Godenir

Todd Houseman, Brontae Hunter
Ray Jacildo, Patrick Forrest Jeffrey
Wahsonti: io Kirby, Sadie Laflamme Snow
Talijah Levene, Erin Loretta Mackey
Drew Moore, Erika Prevost
Savion Roach, Espoir Akati Segbeaya

Production
École national de théâtre

Durée
2 h 20 min
[ Incl. 1 entracte ]

Représentations @
Jusqu’au 29 février 2020

Monument-National

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]