No Time to Die

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 08 octobre 2021

SUCCINCTEMENT.
Alors qu’il mène une retraite paisible, le célèbre James Bond 007 reprend du service pour mettre fin au dangereux projet Héraclès.

CRITIQUE.

★★★★ ½

texte
Élie Castiel

   Dans le cas des films importants autant pour le public que pour les critiques (les vrais, ceux et celles qui vont plus loin que de raconter le récit, et surtout à ne pas confondre avec les chroniqueurs), c’est toujours la bataille futile et infantile à qui pondra le texte en premier. Mais qu’importe, ne nous laissons pas abattre par ce petit inconvénient qui est plus du goût de l’introversion inconsciente que de la coïncidence ou peut-être d’une décision éditoriale venant du pupitre. Et surtout, surtout, ne remplissons pas notre page avec le retard de sortie occasionné par la pandémie.

Un titre invitant, No Time to Die, une indication où la notion de pérennité du célèbre agent se laisse entendre malgré ce que l’on veut nous laisser croire. Question de stratégie narrative ?  Question de marketing qui assure les suites, sans doute indéfectibles aux yeux des producteurs ?  Qu’importe.

C’est indiscutablement, le film de la série le plus tragique, mélancolique, atteint d’un spleen nostalgique qui se perpétue tout le long du récit, là où même les séquences d’action qui semblent mimer celles des précédentes productions de la série atteignent un niveau non pas de lassitude, mais de déjà-vu, comme s’il s’agissait d’un album de scènes violentes, nécessaires, sadiquement agréables pour l’œil, mais encore plus important : voir le héros mythique s’en remettre, battre ceux qui veulent mettre en péril l’avenir de l’Humanité.

Et puis, ici, une histoire d’amour, quasi un conte de fées entre une femme libre qui assume sa condition contemporaine et un héraut solitaire d’un autre siècle.

James Bond Forever

Même pour James Bond, l’inévitable roue du temps qui passe.

Chez Daniel Craig, dans la peau du personnage, celui par qui le récit arrive, on sent constamment sa stupeur, nous ne pas dire la souffrance de voir le temps passer : les femmes ne se courtisent plus comme avant, la force physique n’y est plus, les ennemis sont de plus en plus sophistiqués. Bref, ce n’est plus le bon moment.

Mais entre les mains de Cary Joji Fukunaga, qui s’est parfois intéressé aux autres cultures et dont on a pu apprécié le magnifique Jane Eye (2011), une première incursion dans l’univers de Ian Fleming. Son originalité est d’avoir réussi un film aussi personnel que soit, il déçoit les puristes inconditionnels du héros britanniques ou les laissent sur leur faim.

Fukunaga mérite bien plus. Il a sans aucun doute réalisé le plus ténébreux des films de la franchise. Le film repose constamment sur la remise en question de la propre identité de 007 comme Homme et comme Héros. Et la relation avec Madeleine (formidable Léa Seydoux) est une des plus réalistes qu’on voit souvent dans des drames sentimentaux, brisant ainsi le genre que représentent les films de la série.

Le metteur en scène ose briser la trame narrative traditionnelle, certes en respectant des codes incontournables, mais dévie intentionnellement pour concocter un drame psychologique où les considérations freudiennes sont les bienvenues. Il faut savoir observer.

No Time to Die annonce-t-il une nouvelle hybridité, aussi étrange soit-elle ? Le film est comme un chant de cygne non pas désespéré, mais conscient que le temps passe irrévocablement et souligne résolument le paradoxe du titre.

Il y aura, bien sûr, des références ou si vous préférez, des clins d’œil à d’autres James Bond, comme la présentation de bases militaires ou le célèbre jardin japonais qui, dans sa sérénité, cache mille et un dangers. Il y a Cuba, presque vue comme avant la révolution castriste. Ses services secrets actuels ne ressemblent-ils pas à ceux de la CIA ?

Et un générique de début, royal. La célèbre chanson est maintenue. La femme n’est plus un objet. Elle est remplacée par des statues brisées de dieux ou déesses grecques de l’antiquité (référence au Projet Héraclès du film). Le vieux monde se juxtapose au contemporain pour que, le temps que dure la projection, s’illustre un combat parfois déloyal entre la tradition et la modernité. On ne peut plus se battre comme avant. Le travail d’espion est assujetti aujourd’hui, bien étroitement, avec les nouvelles technologies et ce qu’elles réservent comme intransigeances et dangers.

On retrouve les associés du Bureau de James Bond, certes, comme l’indispensable Moneypenny et les autres, infaillibles ; mais l’agent 007 a vieilli. Que réserve la fin ? Pour Daniel Craig, en tout cas, une tristesse dans son visage qu’il ne voile pas, un dernier rôle jamesbondien qu’il assume avec toute la charge émotive qu’elle contient. No Time to Die annonce-t-il une nouvelle hybridité, aussi étrange soit-elle ? Le film est comme un chant de cygne non pas désespéré, mais conscient que le temps passe irrévocablement et souligne résolument le paradoxe du titre.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Cary Joji Fukunaga

Scénario
Neal Purvis, Robert Wade

Cary Joji Fukunaga
D’après une idée de Neal Purvis,

Robert Wade et Cary Joji Fukunaga
Inspirée des personnages de Ian Fleming

Direction photo
Linus Sandgren

Montage
Tom Cross

Elliot Graham

Musique
Hans Zimmer

Genre(s)
Suspense d’espionnage

Origine(s)
États-Unis

Grande-Bretagne

Année : 2020 – Durée : 2 h 44 min

Langue(s)
V.o. : anglais / Version française
Mourir peut attendre

Dist. [ Contact ]
Universal Pictures Canada

Classement
Visa Général
[ Déconseillé aux jeunes enfants ]

En salle(s)
Cineplex

[ Salles VIP : Interdit aux moins de 18 ans ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]