Pig

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 16 juillet 2021

SUCCINCTEMENT.
Un chasseur de truffes qui vit seul dans la nature sauvage de l’Oregon doit retourner à Portland à la recherche de son cochon butin après son enlèvement. Un retour également sur son passé.

| LE FILM
de la semaine.

CRITIQUE.

★★★★ 

texte
Élie Castiel

Les anciennes odeurs

            La truie dont il est question est l’un de ces rares porcins en quête de nourriture qui aide les chasseurs de truffes à obtenir ces dérivés de champignons, très en demande et lucratifs pour ceux qui les négocient.

     Le chasseur de truffes dont il est question vit isolé dans la forêt, accompagné de cette adorable truie qu’il adore et qui l’aide à trouver ces précieux eumycètes. Et un jour, après une agression dont il est victime, il s’aperçoit que l’animal a disparu. Départ donc pour l’Oregon où il tente de la trouver.

     Qui est cet homme? Pourquoi a-t-il choisi l’exil? Que nous cache-t-il? La suite est une balade sauvage existentielle où le cinéaste, dans ce premier long métrage, met à nu les tourments de l’âme et expose d’autres thèmes humains.

    C’est un film qui doit son originalité à son écriture, un travail scénaristique intelligemment exécuté par Sarnoski lui-même et Vanessa Block, dont c’est ici sa première coscénarisation et figure parmi les nombreux producteurs.  Deux plumes acérées, vives, conscientes des mots, comptés, ne tenant qu’à l’essentiel, évitant la surcharge. Préférant parfois les silences ou les musiques du duo Alexis Grapsas et Philip Klein, entre la poignante et l’excité du thriller.

Un périple en dehors de la civilisation qui ressemble à une revendication existentielle.

     Et des personnages qui sortent de l’ordinaire et mènent des vies hors de l’ordinaire. Comme par magie, Rob Feld (Nicolas Cage) nous apprend à travers le récit qu’il  était un grand chef réputé dans la région. Pourquoi s’est-il exilé? Suite à la mort de sa femme, sa petite amie? Une trahison? Toujours est-il que le périple qu’il entreprend est hors de la civilisation, une prise de conscience qui ressemble à une revendication existentielle.

    Peu importe puisque l’écriture du duo Sarnoski-Block navigue dans les eaux troubles de la déception, du désir interrompu, dans l’arrêt soudain de continuer à créer. Et d’une autre époque, que différentes pièces musicales viennent confirmer. Mais il y a aussi, extrinsèquement, de la part de Sarnoski, ce délicat souhait de redonner à Nicolas Cage, qui, dans le passé, a été bon, moins bon et parfois même mauvais, une seconde chance. Malgré un rôle atypique dans Pig, ou peut-être grâce à lui, Cage s’engage totalement dans ce projet quasi insensé, un récit sans vraiment d’histoire. Il se donne carrément, mal en point, ou du moins en apparence, s’investissant dans ce jeu improbable pour encore croire au cinéma. Pour croire que cet art ne l’a pas laissé tomber.

    Un film d’atmosphères, de paysages sauvages et urbains glauques, menaçants, de personnages introvertis et, lorsqu’il s’agit de survivre, chacun à sa façon, libéré, puissant, se défendant à corps perdu pour en fin de compte, mener une lutte existentielle.

   Des séquences d’anthologie comme celle où Nicolas Cage s’adresse indirectement (lors d’un champ/contrechamp) aux spectateurs en leur rappelant qu’il a été oublié et que le rôle qu’il tente de défendre par tous ses moyens est une sorte de sauf-conduit, un cri de ralliement qui, espère-t-il, pourrait relancer sa carrière.

Un film d’atmosphères, de paysages sauvages et urbains glauques, menaçants, de personnages introvertis et, lorsqu’il s’agit de survivre, chacun à sa façon, libéré, puissant, se défendant à corps perdu pour en fin de compte, mener une lutte existentielle.

   Mais c’est aussi un film sur l’oubli, sur les changements sociaux qui s’opèrent dans nos vies, à cause de nos convictions, grâce à nos convictions, à cause aussi du temps qui passe. D’où une atmosphère d’amertume, un sentiment de mélancolie qui traverse le film du début à la fin.

   Et comme pièce de résistance, montrer la nourriture, celle qu’on crée avec amour et doigté comme un antidote à la dépression, un plat qu’on apprécie car on l’a déjà servi, qui nous ramène dans la temporalité du moment dû à son goût et aux odeurs anciennes qu’il dégage, imperceptible mais présente comme si le passé revenait hanter le présent, soigneusement, tendrement. Mais surtout pour que l’ennemi, le puissant d’aujourd’hui, finisse par se débarrasser de ses instinct nocifs et puisse reconnaître ses torts, perdre le pouvoir que l’on garde sur le plus faible, alors que jadis il le tenait.

   La réalisation de Michael Sarnoski, que vient appuyer la bande sonore de Grapsas et de Klein, faisant également écho à des pièces du répertoire classique (Mozart, Verdi…), est enivrante, presque voilée, désinvolte et intentionnellement brouillonne.

   Mais avant tout, Pig est une arme qui conduit vers la rédemption, une prise de conscience dans cet anti-récit qui, ultimement, mène à la redécouverte de soi.

   Et la charmante truie dans toute cette histoire?

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Michael Sarnoski

Scénario
Michel Sarnoski

D’après une idée de Vanessa Block

Direction photo
Patric Scola

Montage
Brett W. Bachman

Musique
Alexis Grapsas

Philip Klein

Michael Sarnoski et Vanessa Block
en pause professionnelle.
NEON

Genre(s)
Drame

Origine(s)
États-Unis
Grande-Bretagne

Année : 2020 – Durée : 1 h 32 min

Langue(s)
V.o. : anglais

Pig

Dist. [ Contact ] @
Entract Films

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

En salle(s) @
Cinéma du Parc

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]