Just Like Water

EN EXERGUE.
‘ Four souls it is death to become water, and for water, death to become earth; but existence comes out of earth, and soul out of water.’

« Pour les âmes, mort de devenir eau, pour l’eau, mort de devenir terre; mais de la terre naît l’eau, et de l’eau l’âme. »

Héraclite

CRITIQUE.
[ Court métrage ]

★ ★ ★ ★

texte
Élie Castiel

 

Au fil

de l’eau

À partir de ce fragment d’Héraclite en exergue, une idée singulière, une pensée immédiate, une envie de mettre en images ce que l’on sent dans son for intérieur.

Manos Triantafillakis a joué dans une dizaine de films en Grèce, notamment pour la télé. Et puis, du coup, cette envie de tourner. Un sujet personnel, intime, d’où ce choix d’éviter le dialogue, les souvenirs illustrés en images éparses, diaphanes, idéalisées comme on les aime toujours, telles que rêvées sans doute. Le soleil brille, l’eau est omniprésente, servant d’agent  purificateur, mais dans le même temps obtempère au propre désir du réalisateur de croire. D’où la citation du philosophe Héraclite sur notre existence. Proposition ambitieuse, mais qui dans Just Like Water, fonctionne à plusieurs niveaux. Le son de Manos Tsirigotakis, cité en exemple, y participe de manière élégiaque, mais pas pour autant triste ou tragique; jusqu’à en devenir en quelque sorte une pierre angulaire.Suite

L’autre rive

SUCCINCTEMENT.
À Montréal, des itinérants s’organisent du mieux qu’ils peuvent pour survivre dans la rue en s’abritant dans des campings urbains de fortune. Des migrants dans leur propre ville.

CRITIQUE.
[ Court métrage ]

★ ★ ★ ★

texte
Élie Castiel

Sommes-nous en droit d’affirmer que nous assistons à un « nouveau cinéma québécois », comme c’est le cas à chaque génération; cette fois-ci axé sur cet amalgame, parfois réussi, entre la fiction et le documentaire. Nous évoquons ici la stratégie mise en place par les jeunes cinéastes, celles et ceux soucieux des enjeux sociaux de la québécitude, même si parfois, le nombrilisme se manifeste et l’ego s’affiche sans crier gare, notamment chez les cinéastes-hommes, sauf bien entendu dans le genre documentaire, les principaux intéressés plus soucieux des enjeux proposés.

Si le politique est pratiquement absent du discours, il n’en demeure pas moins que les images véhiculées aujourd’hui conduisent vers une prise en charge du regard de la part des spectateurs et spectatrices que l’on somme de participer à chaque nouvelle aventure.

C’est le cas de Gaëlle Graton. Avec L’autre rive, titre on ne peut plus limitrophe, la jeune réalisatrice nous conduit dans une sorte de no man’s land, que l’on pourrait traduire en français par « terrain à découvert », voire neutre, sans frontières puisque les déjouant. Ici, des itinérants qui, faute de politiques gouvernementales (voire municipales), se construisent leurs propres territoires. D’une certaine façon,  paradoxalement, créant leurs lignes de démarcation. Cette stratégie n’est-elle pas en quelque sorte une façon « pratique » d’exprimer le discours, de formuler la parole citoyenne?

Les réfugié(e)sSuite

The One Dollar Story

CRITIQUE.
[ Scène ]

★★★★ ½

texte
Élie Castiel

Tout d’abord une écriture, une plume ciselée, celle de Fabrice Melquiot, également metteur en scène, interprète et essayiste aguerri. Bref, quelqu’un qui se prête à corps perdu sur ce qui implique l’intellect.

Le titre anglophone de ce récit intentionnellement et farouchement exsangue n’est pas une trahison à la langue de Molière, mais une tentative de s’impliquer dans une certaine Amérique, l’intellectuelle, celle de ces individus en constante crise existentielle, défiant par là-même les mythes fondateurs d’un large territoire qui ne cesse de se redéfinir, voire de revendiquer le lieu, l’instant, le moment où la mémoire ou son manque, le souvenir et son absence oblige à déblatérer.

Elle est seule sur scène, Jodie Casterman, au chevet de son père mourant. Elle va dévoiler à chacune et à chacun dans l’auditoire les secrets de ses origines. Une confession qui ressemble plus à une autothérapie à la cadence des mensonges et des vérités que lui administre son cerveau. Elle se défend bien, se perd à l’intérieur de ces mondes qu’elle s’invente, ou peut-être pas.

La scène, plutôt un décor unique qui s’approche du néant, le blanc domine et s’accapare du Prospero, ce théâtre intime devenant quasi-victime de l’écrit de Melquiot et des agissements de l’unique interprète. Une glacière (frigo) commerciale où « siègent » quelques bouteilles (eau et autres), des mandarines… On saura plus tard que ce grand objet banal vient peut-être d’un autre monde. Ne pas oublier les chaises de fortune qu’on peut utiliser comme des ballons de jeu puisqu’elles ne peuvent jamais être brisées.

On the RoadSuite

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