The One Dollar Story

CRITIQUE.
[ Scène ]

★★★★ ½

texte
Élie Castiel

Tout d’abord une écriture, une plume ciselée, celle de Fabrice Melquiot, également metteur en scène, interprète et essayiste aguerri. Bref, quelqu’un qui se prête à corps perdu sur ce qui implique l’intellect.

Le titre anglophone de ce récit intentionnellement et farouchement exsangue n’est pas une trahison à la langue de Molière, mais une tentative de s’impliquer dans une certaine Amérique, l’intellectuelle, celle de ces individus en constante crise existentielle, défiant par là-même les mythes fondateurs d’un large territoire qui ne cesse de se redéfinir, voire de revendiquer le lieu, l’instant, le moment où la mémoire ou son manque, le souvenir et son absence oblige à déblatérer.

Elle est seule sur scène, Jodie Casterman, au chevet de son père mourant. Elle va dévoiler à chacune et à chacun dans l’auditoire les secrets de ses origines. Une confession qui ressemble plus à une autothérapie à la cadence des mensonges et des vérités que lui administre son cerveau. Elle se défend bien, se perd à l’intérieur de ces mondes qu’elle s’invente, ou peut-être pas.

La scène, plutôt un décor unique qui s’approche du néant, le blanc domine et s’accapare du Prospero, ce théâtre intime devenant quasi-victime de l’écrit de Melquiot et des agissements de l’unique interprète. Une glacière (frigo) commerciale où « siègent » quelques bouteilles (eau et autres), des mandarines… On saura plus tard que ce grand objet banal vient peut-être d’un autre monde. Ne pas oublier les chaises de fortune qu’on peut utiliser comme des ballons de jeu puisqu’elles ne peuvent jamais être brisées.

On the RoadSuite

Roméo et Juliette

CRITIQUE.
[ Danse ]

★★★★ ½

texte
Élie Castiel

Pour donner la possibilité à la majorité des danseuses et des danseurs du corps de Ballet, les interprètes changent selon la journée de représentation. Ce soir de Première, Kiara DeNae Felder et Hamilton Nieh campent une Juliette et un Roméo impeccables, notamment dans le sprint final que tout le monde connaît et attend avec fébrilité. Sens de la sens, comme c’est tout à fait naturel, mais aussi et surtout de la dramaturgie, tous deux investis dans leur personnage. Tout en soulignant leur pas de deux transcendant.

Le tragique a

toujours raison

Puisque cela relève du travail d’Ivan Cavallari, juxtaposant les origines théâtrales de l’œuvre et ballet. Ici, ces deux disciplines artistiques s’enchevêtrent l’une à l’autre pour constituer une sorte « d’opéra dansé ».

Le rythme, la cadence, les correspondances physiques entre les danseurs, leurs rapprochements essentiels selon l’oeuve de Shakespeare sont constamment sentis. Ce mélange de disciplines nous laisse pantois. Ça faisait des lustres qui, pour des raisons qui m’échappent, je n’avais pas été convié aux spectacles des Grands Ballets.

Kiara DeNae Felder (Juliette) et Hamilton Nieh (Roméo). Une symbiose amoureuse.
Crédit : Sasha Onyshchenko

Suite

Un ennemi du peuple

CRITIQUE.
[ Scène ]

★★★

texte
Élie Castiel

Convictions

et

trahisons

Ce n’est plus le docteur Tomas Stockmann, mais la docteure Katrine Stockmann, telle que conçue dans cette libre adaptation de Sarah Berthiaume, mise en scène par Edith Patenaude. Force est de souligner que les nouvelles voix de la création théâtrale au Québec se conjuguent de plus en plus, ou du moins, essaient, au féminin. Une rareté si l’on en juge par ces quelques dernières années où les signes masculins dominaient.

Si la version-TNM transpose l’action à l’époque actuelle, bien que si à en juger par le décor et les costumes, les années 70 se font sentir, force est de souligner cette tendance (très québécoise) à déconstruire, à réanimer certains fantômes dramaturgiques du passé. On peut ou pas être d’accord, c’est une question de perception.

En quelques mots, vite dit : la docteure Stockmann – Ève Landry, à la voix puissante dans la première partie où il est parfois difficile de saisir ce qu’elle dit, gardant néanmoins une stature altière, mais réaliste; plus posée et combattante dans la deuxième – découvre que les eaux de la station thermale de son village sont contaminées. La suite, prévenir le public, au grand dam de son frère Peter (excellent Jean-Sébastien Ouellette), maire de la ville.Suite

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