Danses buissonnières 2021

CRITIQUE.
[ Danse ]

★★★ ½

texte
Élie Castiel

      Trois courtes chorégraphies constituent le programme de cette édition de «Danses buissonnières», spectacle d’ouverture de la saison 2021-2022 à Tangente, un  des lieux de créations alternatives en ce qui a trait à la danse contemporaine.

En huit minutes, Godlin, du chorégraphe Jontae McCrory, expose plusieurs thèmes comme la rencontre, les revendications sociales, le geste instinctif, l’incessant rapport entre le corps et l’espace, endroit où tout se saborde, se crée et devient comme un sanctuaire de tous les possibles, voire même impossibles. La vidéo diffusée est une course vers l’autre, un face-à-face masculin des plus sensuellement évoqué – si ce n’est pas ça, c’est quoi alors? – Le spectateur hésite entre l’écran et l’espace dansé. Provocation de la part de McCrory ou pure intention pour que le regard du public puisse naviguer autour des discours choisis, le politique, le social, l’individuel. En fin de parcours, une courte chorégraphie plus proche du geste désincarné que de la chorégraphie. Nos recherches indiquent que les origines de Godlin viennent de « Gift of God », ou cadeau de Dieu. Peut-être que c’est ainsi que se cache le mystère de cette œuvre inusitée.

Manipuler le corps par consonnes et voyelles

Godlin.
Crédit : David Wong

Et puis, une deuxième partie, un solo d’Alexandra Caron, Abyssale solitude, occupant admirablement bien l’espace, d’une rayonnante luminosité que les éclairages rendent encore plus poignant. La majeure partie du temps, le corps s’extasie devant l’ardeur du geste circulaire, tournant par moments horizontalement. Le regard doit suivre constamment. Le défi est grand. Le pari risqué. Le combat réussi. Une victoire chorégraphique qui, à l’instar de celle de McCrory souligne avec insistance ce refus catégorique au recours à la musique accessible. Une façon comme une autre de situer la danse contemporaine et la musique intermittente aux mêmes degrés de création. On savoure ces 16 minutes avec autant d’enthousiasme.

Pour les créateurs, jongler avec les gestes chorégraphiques avec des idées bien nettes en tête, presque grammaticales.

Abyssale solitude.
Crédit : Vanessa Fortin

Finalement, Djata : Conversations du Manden, là où Aly Keita, accompagné des gestes subtiles et de la voix rituelle d’Ariane Benoit, rivalise avec les deux parties précédentes. La vigueur musicale de Trevor John Ferrier scande l’africanité primaire, dans son sens vierge et abstrait; une musique issue d’une contrée du monde où s’est créée sans aucun doute la civilisation. Keita secoue le corps, sensualise la démarche artistique en exposant sa propre physicalité, ici, masculine, dans une sorte de rituel païen qui se perd dans la nuit des temps. Ode à la beauté du corps, aux incessants recours aux divinités créés, aux moyens inventés pour, ultimement, ne pas cesser d’exister.

Pour les créateurs, jongler avec les gestes chorégraphiques avec des idées bien nettes en tête, presque grammaticales.

Djata : Conversations du Manden.
Crédit : Vanessa Fortin

Durée
1 h 05 min
[ Incluant courtes pauses ]

Diffusion @
Tangente 
Jusqu’au 14 septembre 2021

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]