Memory House

SUCCINCTEMENT
Un homme d’âge moyen, noir de peau, Cristovam, travaille dans une usine d’une région du Brésil dirigée par un autrichien. Il découvre une maison quelque part perdue dans la région. Le lieu et les objets qu’il y trouve évoquent en lui ses propres racines.

CRITIQUE.
[ Inédit]
« Discovery » / TIFF 2020

Texte.
Élie Castiel

★★★

Un film austère, idéologiquement délinéaire, puisque la narration classique n’a pas ici droit de cité. Il  est ici question d’un scénario original du réalisateur, cosigné avec Felipe Sholl, à qui l’on doit quelques projets d’écriture, deux courts et un long métrage en 2016, Talk to Me (The Other End / Fala comigo).

Le titre original de l’opera prima de João Paulo Miranda Maria s’harmonise davantage avec cet anti-récit qui va intentionnellement dans tous les sens, sans points d’appui. Tout le contraire, observant une sorte de religiosité maladive à brouiller les pistes, à présenter des personnages qui ne sortent on ne sait d’où. Et peu de dialogues, préférant que la caméra de Benjamin Echazarreta brosse des portraits originaux, des canevas hors du temps, parfois anachroniques, posant un geste inquiétant envers le spectateur, l’obligeant à essayer de donner un sens à ce qui se passe à l’écran.

Pour revenir au titre original, Casa de Antiguidades (Maison d’antiquités) est sans doute le seul élément qui prédispose Cristovam, le (anti)héros de ce drôle de récit à découvrir des objets, des artéfacts d’une autre époque, à creuser (briser) un mur portant un graffiti raciste pour découvrir une affiche d’un film western (est-ce bien de cela qu’il s’agit?) pour que plus tard, ce même bout de papier devienne une sorte de dessin paléolithique.

Un folklore

intentionnellement désincarné

Les pistes sont volontairement brouillées et cela fait partie d’un certain Cinéma Novo brésilien, si cher aux années 70 et qui a permis à Antonio Pitanga (ici, Cristovam) de signer son seul long métrage en 1978 – In the Mouth of the World / Na Boca do Mundo – coscénarisé par l’incontournable Carlos Diegues et moins connu, Leopoldo Serran, signataire de l’écriture de Bye Bye Brésil / Bye Bye Brasil (1980), de Diegues. Travail d’artisans d’une certain époque du cinéma brésilien dont les membres collaborent souvent ensemble, en équipes harmonisées. Et si c’était le cas de Miranda Maria, lui aussi porté par ce cinéma national d’un autre temps, quitte à prendre des risques énormes et s’attendre au pire.

La première séquence ressemble à un plan-séquence tant le patron de l’usine prend un temps fou pour annoncer à Cristovam qu’il sera licencié. Âge? Raisons économiques? Peu importe puisque le reste du film est un va-et-vient continuel entre des séquences métaphoriques et d’autres plus réalistes qui font le parcours d’un racisme institutionnalisé, de l’indifférence de l’Être et particulièment d’une certaine forme de violence. Le colonialisme n’est pas mort. Il arbore un nouveau visage.

Quelques panoramiques, même si le plan fixe est facilité dans l’ensemble, projettent une vision partagée des lieux clos et de la liberté de certains extérieurs, comme ce petit troupeau de vaches dans un pré verdoyant, contrastant avec la décrépitude de la maison abandonnée.

Pas de direction d’acteurs, mais une tentative de collaboration commune entre tous les participants/protagonistes. D’où ce laxisme dans certains gestes qui paraissent intentionnellement improvisés.

Quelques panoramiques, même si le plan fixe est facilité dans l’ensemble, projettent une vision partagée des lieux clos et de la liberté de certains extérieurs, comme ce petit troupeau de vaches dans un pré verdoyant, contrastant avec la décrépitude de la maison abandonnée. Lieu où Cristovam découvrira deux jeunes hommes en train de copuler – Pourquoi de ce court moment tout à fait inutile – Homophobie? Provocation? Humour mal placé?  Mais bon, on pardonnera cet écart à João Paulo Miranda Maria tant il semble possédé par un genre de cinéma qui le hante et qui nous a ébloui à une certaine époque.

Mais au fond, le folklore dont il est question, du moins en apparence, se trouve étrangement désincarné, perdu dans les méandres d’une symbolique démesurée.

FICHE TECHNIQUE
Réalisation
João Paul Miranda Maria

Scénario : João Paul Miranda Maria, Felipe Sholl

Origine : Brésil / France

Langue(s)
V.o. : portugais, allemand; s.-t.a.
Casa de Antiguidades

Année : 2020 – Durée : 1 h 30 min

Image : Benjamin Echazarreta

Montage : Benjamin Mirguet

Musique : Nicolas Becker

Son : Guillermo Farkas
Assisté de Ariel Enrique, Luana Leobas
Léo Bortolin & Isadora Torres

Direction artistique : Isabelle Bittencourt

Interprètes
Antonio Pitanga, Ana Flavia Cavalcanti
Sam Louwyck, Soren Helterup

Producteur(s)
Paula Cosenza, Didar Domehri
Denise Gomes, Ariene Ferreira

Contact @
Bossa Nova Films [ São Paul – BRÉSIL ]
Maneki Films [ Paris – FRANCE

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]