Mōnad
@ La Chapelle

CRITIQUE
[ danse — cité ]
Élie Castiel

★★★ ½

 

Happening

urbain

jubilatoire

Partout, non seulement sur scène, mais s’insérant dans l’auditoire, se mêlant aux spectateurs dans un jeu de provocation aussi fou, bordélique et orgastique que totalement insensé, selon sa propre morale. Alexandra ‘Spicey’ Landé jubile dans tous ses états de corps et d’âme.

Mōnad est une parodie des temps modernes, tumultueux, insensé, un moment de rêve éveillé qu’on se donne la peine de créer, non seulement pour soi, pour s’affirmer en tant qu’artiste de scène, vouant à l’improvisation – qui domine en ce moment un peu partout dans les scènes alternatives, du moins en Occident, dans ces contrées libres qui donnent la possibilité de s’exprimer selon ses propres convictions – son bien-être le plus réconfortant.

Déconner, investir la scène le temps que dure le spectacle, s’approprier le conscient et l’inconscient des spectatrices et spectateurs, entrer dans leur fantasmes qu’elles/ils n’osent afficher dans la vie de tous les jours.

Une folie du moment que de se vêtir de bouts de papier d’emballage, pour s’inventer un attirail « comme ça’se peut pas ». frivole, dingue, mais bouleversant dans sa douce folie et sa dignité à exister, à ne pas se cacher son identitaire multiple.

Le breakdance, le rap, le street-dance, la street-smartness, street-bullshit aussi, ce qui nuit innocemment à l’ordre public, sans ravages, au contraire suivant un rythme qui ne laisse pas indifférent, comme pour valider l’être et la multitude.

Les paroles des raps, sexistes, vulgaires, très « what the fuck! », « so what! », et ce « mother-fucking » devenu option obligatoire dans cet argot de rue qui combat la rectitude politique et parfois s’engage dans des manifestations de soutien à…

Plus rien ne compte que le mouvement.
Crédit : @ David Wong

Mōnad est le fruit d’une idée de l’art, autre, subversive, intransigeante, radicale dans le bon sens du terme, et qui par son étrangeté pure, par sa délicieuse volupté à nous éveiller de notre torpeur, jeune d’esprit et de corps, suscite notre admiration. Impossible de ne pas bouger, de ne pas suivre les ordres de cette Capitaine au service de la performance. Et puis, comme par enchantement, « Fuck le corps parfait ». On n’en veut plus. C’est ludique, fucké dans tous ses états, mais d’une beauté radicale qu’on aurait voulu voir plus souvent.

Puis, alors qu’on ne s’attend pas, une finale sublime, déchirante, bouleversante, d’une force dramatique insoutenable, non seulement de la part de la formidable artiste en question, mais également du D.J. accompagnateur qui plonge lui aussi dans l’action, en fait l’inaction, pour calmer le tout, pendant quelques minutes qui nous semblent longues (que va-t-il se passer?). C’est bien lui, Jai Nitai Lotus.

Mōnad est le fruit d’une idée de l’art, autre, subversive, intransigeante, radicale dans le bon sens du terme, et qui par son étrangeté pure, par sa délicieuse volupté à nous éveiller de notre torpeur, jeune d’esprit et de corps, suscite notre admiration.

Finalement, les accessoires que sont une vieille machine à écrire d’un autre siècle et une à coudre, probablement une Bernina d’un temps révolu, nous procurenr un air de nostalgie et de mélancolie.

Durant le spectacle, ne serait-ce que pendant quelques brèves et rapides secondes, il faut jeter son regard sur le maître de musique, pour voir la complicité qui le lie à la performeuse qui, elle, affiche sa désinvolture.

Au cours de cette finale, elle et lui projettent des visages sérieux, interrogateurs, sans rien faire d’autre, comme si le show qui avait précédé n’était que le résultat d’un cœur qui bat au rythme de revigorantes pulsations.

 

Mōnad
d’Alexandra ‘Spicey’ Landé

FICHE ARTISTIQUE PARTIELLE
Directrice artistique et Performance
Alexandra ‘Spicey’ Landé

Conception sonore et Performance
Jai Nitai Lotus

Éclairages
Leticia Hamaoui

Costumes
Nalo Soyini Bruce

Scénographie
Alexandra ‘Spicey’ Landé

Leticia Hamaoui

Durée
1 h 05 min
[ Sans entracte ]
Public
Déconseillé aux moins de 13 ans

Diffusion & Billets @
La Chapelle scènes contemporaines
Jusqu’au 7 avril et
du 10 au 13 avril 2024

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Sans intérêt. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]