Myth of A Colorblind France

Sortie
Vendredi 25 septembre 2020

SUCCINCTEMENT
À travers le temps et jusqu’à aujourd’hui, l’apport culturel des Afro-Américains en France, et particulièrement à Paris.

Critique.
[ Numérique ]

Texte.
Élie Castiel

★★★

Certains sont connus, d’autres peu; on découvre quelques-uns. Ils sont Afro-Américains et ont choisi la France pour exercer leurs métiers, le plus souvent dans le domaine de la culture; la musique surtout, la littérature pour certains, la peinture. S’exprimer dans un lieu du monde connu pour sa « liberté, égalité, fraternité », mais qui, au fond, n’a pas hésité à coloniser des terres en Afrique. Mais il n’est pas tout à fait question dans Myth of a Colorblind France.

Les époques se mélangent comme si d’une façon, l’Histoire n’était qu’un va-et-vient incessant de récits humains qui se répètent, à chaque fois avec des acteurs différents. Aux Joséphine Baker, James Baldwin (l’un des rarissimes noirs homosexuels de la diaspora artistique), Beauford Delaney, Barbara Chase-Riboud et de nombreux d’une autre époque où ils vivaient leur condition dans une certaine harmonie, l’exotisme légendaire (en fait, une sorte de racisme en soi) et le talent (caractéristique plus sincère) aidant, mais tous et toutes dans une France différente de celle d’aujourd’hui où l’immigration massive (comme dans la plupart des pays de l’EU) a pris des proportions inimaginables et le rapport de forces est souvent politisé jusqu’au plus haut point.

Ils ont dû dire « Paris, je t’aime »

James Baldwin

En fait, le film de Alan Govenar n’innove en rien le genre classique par l’intervention des têtes parlantes, procédé appliqué dans la plupart des documentaires conçus pour la télé, mais selon les propos des intervenants, nous éclairent sur des périodes précises.

Une chose est claire, en France, ces expatrié(es) ont souffert de beaucoup moins de discriminations qu’aux États-Unis. Mais il ne faut pas oublier que la très grande majorité s’est installée à Paris, ville des Lumières et dans un sens, de tous les possibles pour qui sait se débrouiller.

Ils ont fréquenté le Paris de la faune de Saint-Germain, les caves à Jazz. Il sera question un peu longuement pour un documentaire de courte durée de l’iconoclaste Baker, ses spectacles dans les lieux les plus branchés du Tout-Paris, l’adoption d’une ribambelle d’enfants orphelins de toutes races et nationalités après la Seconde Guerre mondiale . On se souviendra qu’elle a été, à sa façon, de la Résistance française.

Govenar, plusieurs courts et quelques documentaires, signent un album nostalgique, d’une franchise totale, tentant d’expliquer ces diverses époques montées de belles images d’archives, plaçant l’artiste Noir dans sa forme la plus illustre possible.

Myth of a Colorblind France ou la possibilité de voir l’évolution de l’individu par le grand bout de la lorgnette, comme pour affronter le monde, chacun à sa propre façon.

Barbara Chase-Riboud est la plus vocale, exprimant des sensations à la fois intimes, personnelles et liées aux différents courants de la mouvance culturelle noire à Paris. Et le plus important, c’est de constater que dans les colonies françaises en Afrique, le racisme était plus percutant qu’en France. Paradoxes raciaux; ambiguïtés incompréhensibles de l’individu; « l’insoutenable légèreté de l’être » pour ne plagier Kundera. À Paris, par contre, l’assimilation et l’intégration sont possibles, du moins à une certaine époque. On retiendra par contre les commentaires de l’historien de Jaz Dan Morgenstern et l’apport considérable de l’essayiste Michel Fabre et du batteur africain Karim Touré, aux propos édifiants.

Et aujourd’hui, le hip-hop, le rap et autres manifestations qui se confondent avec un nouveau siècle, un temps autre, où des Blancs, en Occident, et au nom d’une suprématie abominable, pensent avoir perdu l’équilibre de leur supériorité d’antan. La thèse de Govenar, l’intellectuel, l’artiste, l’anthropologue, le curieux des autres ne dit pas grand-chose sur cette question. Dommage. Quoique le documentariste est un Américain blanc qui dépassent les frontières de son continent, aujourd’hui, une Terre qui saigne de ses disparités sociales, raciales et particulièrement politiques.

Myth of a Colorblind France ou la possibilité de voir l’évolution de l’individu par le grand bout de la lorgnette, comme pour affronter le monde, chacun à sa propre façon.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Alan Govenar

Origine(s)
États-Unis

Langue(s)
V.o. : anglais, français; s.-t.a.
Myth of a Colorblind France

Année : 2020 – Durée : 1 h 26 min

Dist. @
[ First Run Features ]

Diffusion @
Pour des liens (payants) de visionnement
[ dans la mesure du possible, s’adresser en anglais ]
kelly.hargraves@firstrunfeatures.com

ÉTOILES FILANTES
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★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]